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Crise de la société et mouvements sociaux: étude des mouvements estudiantins à l'Université de Lomé

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par Komi Mawunam VIAGBO
Université de Lomé - Maîtrise en sociologie politique 2007
  

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I.5 Historique des mouvements sociaux de l'indépendance à 1990

Le 27 avril 1960 fut proclamée l'indépendance du Togo. Le Comité de l'Unité Togolaise (CUT) avait le pouvoir. Toutefois, l'arrivée du CUT au pouvoir correspond à une période de tension sociale que la seule euphorie de la victoire ne justifie pas. Des heurts et des échauffourées violents, parfois sanglants, opposant les partisans du CUT et du PTP sont constamment rapportés dans la presse. Par exemple, à Lomé le 12 mai 1958, à l'occasion du procès intenté par deux candidats battus du CUT et leurs adversaires élus du PTP, on compte plusieurs blessés. Le 16 juin de la même année, à 15 km de Lomé, un incident opposant les deux formations fait un mort et une soixantaine de blessés. (Le monde, 18 juin 1958). Tout au long de cette période qui va de 1960 à 1963, fréquents sont les incendies de maisons, les brimades, les cas de violence caractérisée, les chasses aux sorcières entraînant mort d'hommes.

En 1961, le CUT devenu Parti de l'Unité Togolaise (PUT) fait de S. OLYMPIO, le président à vie du Togo au cours de son congrès annuel (TOULABOR, op.cit. : 22).

Le 13 janvier 1962, le gouvernement dissout toutes les associations constituées au Togo, les responsables étant accusés de fomenter un coup d'Etat. Le Togo connaît de fait un régime à parti unique. C'est dans ce contexte qu'intervint le 13 janvier 1963, un coup d'Etat militaire qui met fin à la Première République.

Ce coup d'Etat a conduit à la constitution d'un régime civil reposant sur le bicéphalisme. Ce nouveau régime n'allait que de crises en crises.

En effet, le 21 novembre 1966, à la suite d'une grave crise entre le Président GRUNITZKY et son vice MEATCHI, le PUT, en association avec le camp de MEATCHI dont une partie de la hiérarchie militaire, convia la population dans les rues. Les manifestants réclamaient le départ de GRUNITZKY, de nouvelles élections mais aussi la traduction en justice des auteurs du coup d'Etat du 13 janvier 1963. Sur ce dernier point, le mouvement fut sévèrement réprimé.

Un nouveau coup d'Etat orchestré le 13 janvier 1967 mit, aux commandes de l'Etat, un régime militaire dirigé d'abord par le Colonel Kléber DADJO, puis par Etienne Eyadéma.

Le 13 mai 1968, la confédération syndicale, Union Nationale des Travailleurs du Togo (UNTT) lançait un mouvement de grève qui était le tout premier auquel le nouveau régime du général Eyadéma était confronté. En effet, à la suite de l'arrestation et de l'expulsion du nouveau président de l'UNTT issu du sixième congrès statutaire du 10 au 12 mai 1968, les dirigeants syndicalistes lancèrent une grève générale à partir du 13 mai. Cette grève fut totalement suivie par les enseignants des établissements officiels et les employés de banque. Ce n'est qu'après la libération et le rétablissement dans ses fonctions du syndicaliste arrêté que la grève prit fin le 25 mai 1968.

Malgré les tentatives de contrôle de l'action syndicale par l'Etat dans les années suivantes, la base de l'UNTT n'a cessé de rester remuante. Aussi recense-t-on au long de l'année 1972, de nombreux mouvements de grève dans les sociétés d'Etat comme les chemins de fer du Togo, le port autonome de Lomé, la féculerie de Ganavé, la CTMB.

Tout ceci conduisit le 04 décembre 1972, à la dissolution de tous les syndicats existant dans le pays. En janvier 1973 fut créée la centrale syndicale unique : la Confédération Nationale des Travailleurs du Togo (CNTT).

Cependant, le problème de la contestation ouvrière ne fut pas pour autant résolu. Des grèves organisées en dehors des structures officielles sont recensées. En témoignent la grève des dockers de Lomé en 1978 pour protester contre les salaires et les conditions difficiles de travail, celle des chauffeurs de taxi en mai 1980 contre la baisse de leur pouvoir d'achat consécutive à un fort relèvement du prix de l'essence et au blocage des tarifs de la prise en charge décidés par les autorités publiques. La protestation la plus spectaculaire dans ce contexte fut le hold-up organisé en 1975 par les ouvriers de la CTMB à la suite de la nationalisation de la société avec comme conséquences, la diminution du salaire plafond des ouvriers de 17000 FCFA à 12000 FCFA, la remise en cause de tous les acquis sociaux et salariaux, le retard dans les payements.

Ces revendications ouvrières allaient de pair avec celles du monde universitaire.

Le 15 novembre 1968, les étudiants de la section littéraire du Centre d'Enseignement Supérieur (CES), embryon de la future Université de Lomé se mettaient en grève pour protester contre le non paiement des bourses d'études et des primes d'équipement. Ils obtiennent satisfaction quatre mois plus tard. Le 13 mai 1969, les étudiants du CES de Lomé cessèrent les cours en guise de solidarité avec leurs camarades du CES de Porto-Novo en grève depuis le 09 mai pour protester contre une décision du gouvernement dahoméen de construire la cité universitaire dans l'enceinte du Lycée Béhanzin.

En avril 1975, habilement abritée derrière le slogan du parti unique « RPT, haut lieu de dialogue », l'Association des Etudiants de l'Université de Lomé, dans une lettre ouverte, mettait le chef de l'Etat devant ses responsabilités au sujet de l'implantation à l'université de cellules de la JRPT à laquelle elle était farouchement opposée.

En avril 1977, des tracts soulignant la nature « pro impérialiste », « anti-populaire » et « régionaliste » du régime du général Eyadéma circulent à Lomé. Le Président est traité de « valet de l'impérialisme international notamment français », et les tracts s'interrogent sur sa « capacité » à gouverner vraiment le pays dans « l'intérêt général ». Le pouvoir réagit vivement en procédant à d'innombrables perquisitions et arrestations. Ainsi, le 18 avril 1977, une trentaine de personnes soupçonnées sont arrêtées dont 12 professeurs du Syndicat National de l'Enseignement Technique Secondaire et Supérieur (SNETSS) et 4 étudiants voltaïques.

Il faut dire que jusqu'en 1977, le SNETSS a réussi à garder son autonomie par rapport à la CNTT que le chef de l'Etat a voulu imposer à l'ensemble des travailleurs.

Il est enfin indispensable de souligner que de 1960 à 1990, une forme de protestation occulte est remarquable chez les Togolais. C'est le cas des prénoms qui dénoncent les différents actes du régime. Cet aspect a été déjà abordé dans la revue de la littérature.

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"Il faudrait pour le bonheur des états que les philosophes fussent roi ou que les rois fussent philosophes"   Platon