La préparation de la loi de finances au Sénégalpar Babacar CISS Université Gaston Berger de Saint-Louis - Master 2 en Droit Public 2020 |
Paragraphe 2 : La mise en vigueur de la loi de finances par voie règlementairePour rappel, le projet de loi de finances est déposé sur lebureau de l'Assemblée nationale au plus tard le jour de l'ouverture de la session ordinaireunique ; soit le 15 octobre de l'année en cours. A la suite de ce dépôt du projet au bureau de l'Assemblée Nationale, celle-ci dispose de soixante jours au maximum pour procéder à son adoption définitive.Cependant, il peut y arriver que le Parlement retarde volontairement ou de manière non intentionnelle le vote du projet de loi de finances. Cette raison explique le pourquoi de certains aménagements de nature légale qui ont pour objet d'apporter des solutions aux impasses probables. Sous le régime financier du cadre harmoniser des finances publiques de l'union économique et monétaire ouest-africaine,il est convenu la possibilité, lorsque le projet de loi de finances est déposé à temps sur le bureau du parlement par l'exécutif et qu'il n'est pas adopté à la clôture de la session budgétaire, qu'il puisse être mis en exécution à partir d'une ordonnance. Cette mesure vise à permettre au Gouvernement d'ouvrir les crédits nécessaires au fonctionnement des services publicssur la base de ce qui est proposé dans le budget soumis à l'approbationdes parlementaires. Sur ce point, l'article 58 de la directive n°6-2009 de l'UEMOA portant loi de finances indique dans son alinéa 2 qu'à défaut d'adoption du projet de loi de finances avant la date de clôture de la session budgétaire, il peut être mise en vigueur par ordonnance. Dans le même sillage, la Constitution du Sénégal prévoit que lorsque le projet de loi de finances n'est pas voté définitivement à l'expiration du délai desoixante jours prévus, il est mis en vigueur par décret, compte tenu desamendements votés par l'Assemblée nationale et acceptés par le Président de laRépublique.145(*)En outre, si compte tenu de la procédure prévue ci-dessus, la loi de finances n'a pu être mis en vigueur avant le début de l'année financière, le Président de la République est autorisé à reconduire par décret les services votés.146(*)Il pourra ainsi poursuivre le recouvrement des recettes conformément aux dispositions législatives et réglementaires en vigueur, à l'exception des recettes dont il est prévu l'annulation dans le projet de loi de finances. Pour les recettes dont le projet prévoit de réduire les quotités, la perception s'effectue sur la base des nouveaux taux proposés.Ceci signifie pratiquement que le pouvoir exécutif est autorisé à mettre en exécution le projet de loi de finances par le biais d'un texte à caractère réglementaire, ce qui équivaut à une sanction du Parlement pour son manque de diligence dans l'accomplissement de sa tâche dans les délais requis. Cette autorisation relève d'une attitude liée à l'objectif suprême de régularité et de continuité de l'action publique. Elle relève plutôt de l'exception. De l'autre côté, l'article 57, alinéa 4ème de la loi organique relative aux lois de finances nous renseigne sur la possibilité pour le chef de l'Etat de continuer et sans autorisation parlementaire, à percevoir les impôts qui existent et à faire des dépenses sur la base des crédits de l'autorisation précédente. Aux termes de cet article, « Si la loi de finances de l'année n'a pu être promulguée avant le début de l'année financière, le Président de la République est autorisé, conformément aux dispositions de l'article 68 de la Constitution, à continuer de percevoir les impôts existants et à reconduire par décrets les autorisations budgétaires. » Par autorisations budgétaires, la présente loi organique vise le volume de crédits nécessaire pour reconduire, à périmètre constant, les actions publiques dont les crédits ont fait l'objet de vote l'année précédente. Au final, ce qu'on peut retenir c'est que le Parlement dispose du pouvoir d'adoption finale des projets de lois de finances et de tout autre projet de loi d'ailleurs. Cette validation donne à tout projet son caractère légal sans laquelle son opposabilité et son application serait problématique. L'approbation de la loi de finances doit ainsi respecter la procédure, les délais et les modalités de vote sous lesquels elle est soumise à défaut, la loi peut subir une sanction constitutionnelle. Toutefois, pour des circonstances exceptionnelles pouvant découler de l'urgence, des procédures dérogatoires sont aménagées pour permettre à l'administration de pouvoir poursuivre sa mission de satisfaction de l'intérêt général. * 145Article 68 de la Constitution du Sénégal, alinéa 5. * 146Article 68 de la Constitution du Sénégal, alinéa 6 |
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