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La sociotherapie et la résilience communautaire en situation des conflits en groupement Mbinga-sud, territoire de Kalehe


par Solange FURAHA BAHIZIRE
ISTD/Kalehe  - Graduat 2022
  

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I.1.2. Nature des conflits

Il va de soi que pour comprendre les conflits, on doit être capable d'examiner la nature des relations entre les individus et pouvoir s'appuyer sur le fait que la qualité de ces relations peut être responsable des différends. Lorsqu'on s'intéresse aux conflits, on doit alors être capable de les catégoriser. En gestion de conflit, il existe six grandes catégories de conflits (MARSAN C., 2005):

- Le conflitinterpersonnel.

Ce type de conflit est distinct de ce que l'on appelle aussi conflit intrapsychique. Ce dernier concerne le conflit entre les différentes instances psychiques de l'individu, tandis que le conflit interpersonnel concerne, soit des conflits cognitifs, soit des conflits d'objectifs.

Le conflit interpersonnel est donc un conflit qui implique deux individus au moins, qui peuvent se sentir en opposition sur des questions d'objectifs, de valeurs et de comportement.

- Le conflitintercommunautaire.

Ce type de conflit concerne les tensions qui surgissent au sein d'une communauté et qui peuvent affecter son fonctionnement. La plupart du temps, les causes du conflit résident dans la nature des intérêts, dans les rôles alloués aux acteurs ou encore dans les processus relationnels. Néanmoins, au sein des organisations et/ou communautés, les conflits peuvent avoir lieu entre certains groupes sans qu'il s'agisse pour autant de conflit social.

- Le conflitorganisationnel.

Le conflit organisationnel provient de l'opposition et des heurts suscités principalement par l'organisation de communauté,

- Le conflitd'objectif.

Ce conflit prend naissance lorsque les issues recherchées par les acteurs de la communauté divergent.

- Le conflitcognitif.

Le conflit cognitif naît au moment où les réflexions faites par les membres de la communauté ne suivent pas leur cours, c'est-à-dire que les membres de la communauté n'arrivent pas à trouver un compromis sur le mode de raisonnement approprié pour la gestion des questions spécifiques d'organisation de la communauté.

- Le conflitaffectif.

Ce genre de conflit se fait ressentir lorsque les sentiments d'un ou de plusieurs membres de la communauté restent incompatibles avec le reste de la communauté.

Il est à noter qu'au-delà de ces six grandes catégories, les conflits peuvent être encore :

Ø Intracommunautaires, lorsqu'ils divisent les membres d'une même communauté, d'une même famille, village, entités, au sujet des intérêts internes,

Ø Extracommunautaires, quand des divergences remarquables naissent entre plusieurs communautés, pouvant finir par déclencher des tueries ; massacres et/ ou génocide.

Ø inter sociaux : l'intérêt de ces expériences est considérable, mais il est essentiel de distinguer deux processus différents, lorsqu'on sépare un groupe large en deux groupes, on observe une redistribution des relations sociométriques, les paires dont les membres se trouvent placés dans deux groupes nouveaux se défont rapidement, un esprit de groupe se forme, un stéréotype généralement négatif de l'autre apparait et des réactions agressives se développent, comme insultes, injures, ironies ;

Ø religieux : les conflits religieux opposent les partisans des religions différentes sur une croyance quelconque, parfois, les divisions inter sociaux s'observent à l'intérieur des communautés, mais son ampleur est à basse intensité, en général, le terme est utilisé au pluriel avec un article défini : « les guerres de religion, pour désigner spécifiquement les conflits qui, en Europe opposèrent les catholiques et protestants aux XVI et XVIIème siècle ;

Ø lié au pouvoir : l'analyse qu'on vient d'évoquer et qui ont le grand mérite de réintroduire au coeur des organisations l'existence des conflits relèvent cependant une certaine ambiguïté, l'usage qui est fait du terme « pouvoir » pratiquement confondu avec celui d'influence, ce dernier montre bien la capacité d'un acteur de modifier le comportement d'un autre en fonction de ses objectifs, définit son influence, et ce terme s'oppose clairement à celui d'autorité qui introduit au contraire l'existence d'une règle centrale appliquée par une délégation.

Les conflits peuvent avoir ainsi de graves conséquences pour la gestion d'une communauté.

Pour le dirigeant d'une communauté et surtout multiculturelle, gérer un conflit peut être une tâche difficile car les éléments à l'origine du déclenchement du processus conflictuel sont divers : la langue (différences sur le plan de la communication), la distance hiérarchique, les attitudes ethnocentriques, les stéréotypes et préjugés, les jugements de valeurs, la migration, l'ingérence, etc. Ces jugements et ces erreurs de perception biaisent la perception que l'on peut se faire des autres. Ces éléments se regroupent ensuite autour de trois catégories essentielles : la variable individuelle, la variable structurelle, et la variable situationnelle comme le démontre la figure ci-dessous (PELLETIER M., 1994) :

Variables individuelles

- Valeurs

- Attitudes

- Croyances

- Besoins

- Personnalité

- Perceptions

- Motivation

Variables situationnelles

Ø Besoins d'interaction

Ø Besoins de consensus

Ø Différence de statut

Ø Personnalité

Ø Etc.

Variables structurelles

Ø Différenciation,

Ø Spécialisation

Ø Interdépendance identitaire

Ø Objectifs

Ø Rareté des sources

Ø Autorité multiple

Ø Règles, procédures, etc

Conditions pour débuter un processus de conflits

Figure 1. Les antécédents et causes des conflits

I.1.3 La gestion des conflits

Le conflit incarne une des préoccupations fondamentales dans la société contemporaine.
Comme soutenu par plusieurs chercheurs, le conflit possède un pouvoir destructeur ainsi qu'un pouvoir constructif. Les conflits font partie intégrante de la vie courante, ils sont naturels et inévitables (Katzenbach et Smith, 1993). Les théoriciens affirment même qu'un certain niveau de conflit doit être généré pour qu'un groupe connaisse le succès (Rahim, 2002).

Bien entendu, ces conflits doivent être constructifs pour le système. Ce qui donne ce caractère positif aux conflits, c'est la façon dont ils sont gérés (Thompson, 2004; Tjosvold et al., 2005).

C'est pourquoi, dans le but d'être efficace, une société doit développer ses habiletés à résoudre les conflits (Stevens et Campion, 1994; Cannon-Bowers, et al., 1995). La gestion des conflits représente donc une tâche centrale pour un groupe (Alper et al., 2000), mais surtout un élément clé pour le succès de celle-ci autant au niveau du bien-être que des résultats (Esquivel et Kleiner, 1997).
En raison de l'importance de la gestion des conflits dans les sociétés, les paragraphes qui suivent sont consacrés à ce sujet. Plus spécialement, différents modèles de gestion des conflits sont présentés, l'efficacité des différentes stratégies est aussi démontrée.


I.1.4. Définition et historique des modèles de gestion des conflits

Tout d'abord, il faut définir ce que signifie la gestion des conflits.

Pour De Dreu et Weingart (2003a), cela réfère au comportement orienté vers l'intensification, la réduction ou la résolution du conflit. Tandis que pour Rahim (2002), il s'agit d'un besoin de gérer et non pas de résoudre. La gestion des conflits n'implique pas nécessairement la réduction, l'élimination ou la suppression du conflit. C'est plutôt de trouver des stratégies pour diminuer les éléments destructeurs du conflit et augmenter les fonctions constructives et ainsi encourager l'apprentissage et l'efficacité sociétaux. Thomas (1992), quant à lui, prétend que la gestion des conflits doit faire en sorte que le conflit reste productif, créatif et utile. En résumé, la gestion d'un conflit représente les intentions stratégiques d'une partie lors d'un épisode conflictuel. Cette intention stratégique est connue aussi sous les noms d'orientation, d'approche, de style, de stratégie, de comportement et de gestion des conflits (Thomas, 1992).
Peu importe le nom, la définition et la vision des auteurs, ce qui compte c'est la connaissance des modèles qui mettent tout d'abord en lumière les différents comportements possibles lorsqu'un épisode conflictuel fait son apparition.

La façon de gérer les conflits dans les sociétés a été étudiée autant en laboratoire que sur le
terrain (De Dreu et Van Vianen, 2001). Les premières recherches définissaient les comportements de gestion des conflits en termes d'attributs de personnalités.

Graduellement, la vision a changé et l'emphase a été mise davantage sur l'interaction entre la personne et la situation conflictuelle (Knapp et al., 1988).

Plusieurs chercheurs ont présenté des travaux sur les styles de gestion des conflits (Rahim et Magner, 1995). Malgré une abondance de modèles en gestion des conflits, la recherche et la théorie tendent à converger vers le concept de deux dimensions de la gestion qui provient de l'anglais dual concernsoumis par Blake et Mouton (1972). Au départ, ce modèle visait à détecter les différents comportements des gestionnaires pour, ensuite, s'appliquer aux autres personnes que les gestionnaires et plus tard, être utilisé pour la gestion des conflits.

Cette théorie propose deux dimensions pour classer les modes de gestion des conflits: l'intérêt pour les gens et l'intérêt pour la production(Drory et Ritov,
1997).

Chacune de ces dimensions peut se retrouver fortement ou faiblement dans le
comportement adopté (De Dreu et al., 2001). C'est ainsi que cinq styles de gestion des conflits sont créés: la contrainte, l'accommodation, l'évitement, le compromis et la résolution
de problème. Ce modèle de Blake et Mouton (1972) a été repris et réinterprété par plusieurs
auteurs. Voici maintenant la description de ces différents modèles inspirés par celui de Blake
et Mouton (1972):



· Modèle à deux styles

Cette représentation de la gestion des conflits tourne autour de deux axes : la coopération et la
compétition.

Lorsque la coopération est utilisée comme stratégie de gestion des conflits, le conflit est alors
vu comme un problème mutuel. Dans ce contexte, les protagonistes sont persuadés que l'autre
partie va tenter de trouver une solution commune et bénéfique pour les deux parties (Alper et
al., 2000). À l'opposé, dans les situations où la compétition est envisagée pour gérer le
différend, le conflit est considéré comme une confrontation des intérêts; si une partie connaît
du succès, l'autre s'éloigne de son but (Alper et al., 2000).

Les fervents de cette théorie suggèrent que la coopération représente un choix plus approprié pour résoudre un conflit.


· Modèle à trois styles

Certains auteurs ont trouvé de façon empirique qu'il y avait trois styles de gestion des conflits
(Tjosvold; 1986). Les bases théoriques de ce modèle sont floues. Pour qu'il soit jugé
pertinent, les chercheurs devraient démontrer comment le modèle à trois styles peut influencer
les comportements des individus et la gestion en organisation. Jusqu'à aujourd'hui, les
recherches n'ont fourni aucune évidence de ce lien (Rahim, 1997).



· Modèle à quatre styles

La grande différence de ce modèle, en comparaison avec le modèle à cinq styles, consiste à ne
pas considérer le compromis comme une stratégie possible de gestion des conflits. Les quatre
autres catégories (l'accommodation, la confrontation, l'évitement et la résolution de
problème) quant à elles, sont reconnues. Pour les adeptes de cette approche (Pruitt, 1983; De
Dreu, 1997 ; Rahim, 1997), le compromis représente une sous-catégorie de la résolution de problème. Contrairement au modèle à trois styles, une évidence empirique a été démontrée en
laboratoire sur l'existence de quatre styles de gestion des conflits. Ce modèle se base aussi sur
deux dimensions soit le désir de satisfaire ses propres besoins, bas ou élevé, soit le désir de
satisfaire les besoins des autres, bas ou élevé. Cette théorie soutient aussi que la résolution de
problème est la meilleure façon de résoudre le conflit (Rahim, 1997 ; Rahim, 2002).
Malgré le fait que le nombre de styles diffère, les trois théories présentées précédemment
possèdent certains éléments en commun. Tout d'abord, elles contestent l'existence du
compromis comme une stratégie de gestion des conflits. De plus, elles s'accordent pour dire
que la collaboration ou la résolution de problème représente la meilleure option pour régler
une situation conflictuelle dans une société (Rahim, 1997).

· Modèle à cinq styles

Follett en 1926 est la première chercheure à conceptualiser les stratégies de gestion des
conflits en cinq modes distincts. En réalité, elle a trouvé trois façons principales de gérer le
conflit: la domination, le compromis et l'intégration ainsi que deux autres plus secondaires:
l'évitement et la suppression (Rahim et Magner, 1995; Rahim 1997 ; Rahim 2002). Par la
suite, Blake et Mouton (1972) ont, eux aussi, soutenu qu'il existait cinq styles de gestion des
conflits. Comme exposé antérieurement, cette théorie est développée autour de deux axes:
l'intérêt pour les gens et l'intérêt pour la production. Pour la première fois, une grille était
disponible pour permettre la classification des différents modes (Rahim et Magner, 1995;
Rahim 1997). Ensuite, ce modèle fut réinterprété par Thomas (1992). Tout comme les auteurs
précédents, la conception de Thomas comporte cinq styles. Par contre, contrairement à Blake
et Mouton (1972), les deux axes qui servent d'assises à la création des cinq stratégies sont,
non pas l'intérêt pour les gens et l'intérêt pour la production, mais bien le désir de satisfaire
ses propres besoins et le désir de satisfaire les besoins des autres (De Dreu, 1997 ; Rahim et
Magner, 1995 ; Rahim, 2002).

Tous ces modèles à cinq stratégies de gestion soutiennent qu'il n'y a pas une meilleure façon
de régler un conflit. Cette théorie penche davantage vers un modèle de contingence pour
expliquer le lien entre le conflit et les stratégies. Un modèle de contingence signifie que
chaque situation conflictuelle requiert un mode de gestion différent et adapté (Rahim, 1997 ;
Rahim, 2002).

Il est clair qu'aucun consensus sur la taxonomie n'est atteint dans la littérature en ce qui
concerne les comportements utilisés lors de conflit à l'intérieur d'un groupe (Van de Vliert et
Janssen, 2001). Cependant, tous ces modèles considèrent les stratégies indépendantes les unes
des autres et elles sont étudiées séparément (Munduate et al., 1999). De plus, ces différents
modèles ont une base commune, la théorie des deux dimensions de Blake et Mouton (1972). Il
faut noter que la popularité de cette théorie fait en sorte que celle-ci bénéficie d'un support
important au niveau des recherches en laboratoires (De Dreu et al., 2000) ainsi que des études
menées en entreprises (Thomas, 1992). Toutes ces investigations ont permis de découvrir et
de dégager diverses tendances et certains éléments dominants relatifs aux modèles de gestion
des conflits dans les sociétés de travail. Premièrement, les recherches effectuées ont permis
d'établir que la théorie de Blake et Mouton (1972) est plus appropriée que celle de la
compétition et de la coopération de Deutsch (1973) puisqu'elle offre une analyse plus
détaillée et complète (De Dreu et al., 2001 ; Tjosvold, Poon et Yu, 2005). Deuxièmement, des
chercheurs (Rahim, 1983 ; De Dreu et al., 2001) se sont penchés sur la question à savoir si le
compromis représente un style distinct de gestion des conflits. Une réponse affirmative a été
établie empiriquement par ces chercheurs. Donc, on peut conclure que le compromis constitue
une stratégie à part entière pour résoudre une impasse. Par la même occasion, le modèle à
cinq composantes devient plus approprié pour une gestion efficace des conflits (Rahim,
1997). Celui-ci donne aux sociétés plus d'options pour gérer les conflits que ne le font les
autres modèles (De Dreu, 1997).

Parfois, il arrive que les parties soient incapables de gérer elles-mêmes le conflit. Elles ont
essayé toutes les stratégies décrites ci-haut, mais le conflit est trop intense pour aboutir à un
dénouement satisfaisant. Cette situation survient souvent lorsque les sociétés ne partagent plus
de relations positives pour encourager la coopération. Dans ce cas, la négociation, la médiation ou l'arbitrage peut aider à résoudre les conflits (Levi, 2001).

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"Piètre disciple, qui ne surpasse pas son maitre !"   Léonard de Vinci