Gestion de l'éducation en situation de crise sécuritaire au Burkina Faso: état des lieux et perspectives dans la commune de Titaopar Moctar Abdoulaye SANA Institut de Formation et de Recherche interdisciplinaire en Sciences de la Santé et de l'Education (IFRISSE)/Ouagadougou - Master II en sciences de l'éducation 2021 |
I.1.2) Les obstacles à l'éducation pour tousAu Burkina Faso, les taux brut de scolarisation de 2017-2018, respectivement au primaire, post primaire et secondaire de 90,7% ; 52% et 17% (voir graphique 1) permettent d'affirmer que malgré les efforts fournis par l'Etat, les collectivités, les partenaires techniques et financiers et les ménages, un nombre important d'enfants en âge d'être à l'école et d'adolescents sont malheureusement hors des structures éducatives. Ces taux brut de scolarisation permettent de déduire qu'au Burkina Faso, jusqu'en 2018, plus de 9,3% des enfants dont l'âge est compris entre 6 et 11 ans ne fréquentent pas le sous cycle primaire. Ce taux est de plus en plus important lorsqu'on évolue dans les cycles post primaire et secondaire. Il est de 48% au post primaire et de 83% au secondaire. Par ailleurs, les taux d'achèvement respectivement au primaire, au post primaire et au secondaire en 2018 sont de 63%, 40,6% et 14,8% (annuaire statistique, 2017-2018). Ces faibles taux d'achèvement laissent percevoir une faible efficacité interne du système éducatif car nombreux sont les enfants et adolescents qui n'achèvent pas leur cursus scolaire. 1 Taux d'accroissement moyen annuel 9 Les raisons de la non scolarisation et/ou de la déscolarisation des enfants au Burkina Faso sont légions. Pour KONKOBO (2008), les causes de la non scolarisation ou de la déscolarisation des enfants sont essentiellement d'ordre économique et social. Il soutient que le faible revenu des parents d'élèves conjugué aux coûts très élevés de la scolarité constitue un facteur majeur de la déperdition scolaire. Aussi, la mauvaise perception que certains parents ont de l'école est source de déscolarisation. Cependant, un phénomène nouveau vient s'ajouter à la liste des raisons de la non scolarisation ou de la déscolarisation des enfants au Burkina Faso. Il s'agit de la crise sécuritaire dans plusieurs localités du pays. En effet, depuis l'année scolaire 2016-2017, l'école burkinabè est la cible d'attaques terroristes récurrentes de la part de groupes armés dans certaines régions du pays. Ces régions à forts défis sécuritaires sont la région du Nord, du Sahel, du Centre-Nord, de l'Est, de la Boucle du Mouhoun et du Centre-Est. Cette situation a créé la psychose dans le monde éducatif, entrainant l'interruption des activités d'apprentissage, la fermeture et la destruction de plusieurs établissements, la destruction du matériel, l'abandon forcé des classes par les enseignants, la déscolarisation massive des élèves ainsi que le déplacement des populations à l'intérieur du pays. Cette nouvelle situation vient accroitre le taux de déperdition scolaire au niveau national. Le ministre de l'éducation national, de l'alphabétisation et de la promotion des langues nationales, dans un point de presse en date du 15 février 2019 publié par le Service d'Information du Gouvernement (SIG) dans son site www.sig.bf, faisait la situation des établissements fermés. En effet, à cette date, la situation faisait ressortir 1135 établissements fermés empêchant 154 233 élèves de jouir de leur droit à l'éducation. La menace qui pèse sur le monde éducatif dans ce contexte d'insécurité a aussi fait l'objet d'une déclaration de la Coordination Nationale des Syndicats de l'Education(CNSE). En effet, la CNSE, dans sa déclaration du 06 Mars 2017 publiée par le site news.aouaga.com, a informé l'opinion de la situation sécuritaire délétère dans les établissements d'enseignement de la région du sahel. Selon ses informations, L'école de Petèga dans le Département de Diguel a reçu des visiteurs peu ordinaires le 25 janvier 2017 aux environs de 16h. Armés et cagoulés, ils ont proféré des menaces à l'endroit de l'enseignant qu'ils ont trouvé en lui enjoignant d'enseigner désormais en arabe ou de quitter le village ( www.news.aouaga.com). Aussi, le 31 janvier 2017 les écoles des villages de Kouyé, de Goundoumbou et de Lassa dans le département de Baraboulé reçurent la visite de ces individus avec pour injonctions, l'enseignement 10 du coran et le port du voile par les enseignantes. En outre, le vendredi 03 Mars 2017, les différentes menaces de ces hommes ont été mises à exécution par l'assassinat de l'enseignant Salifou Badini, Directeur de l'Ecole Primaire de Kourfayel dans l'enceinte de son l'école. Depuis l'incident de Kourfayel, beaucoup d'établissements furent obligés de fermer les portes. Dans un second communiqué de presse en date du 23 mai 2019 publié par le SIG, le Ministre portait à nouveau à la connaissance de l'opinion publique qu'à cette date, 1933 écoles étaient fermées sur toute l'étendue du territoire burkinabè laissant ainsi 326 152 élèves hors des structures éducatives. Face à cette nouvelle situation, des mesures ont été prises par l'Etat burkinabè afin que ces milliers d'enfants et adolescents des zones d'insécurité puissent avoir accès aux structures éducatives. Les plus illustratives sont l'organisation, en 2017-2018, d'examens spéciaux au profit des candidats du Nord et du Sahel et l'élaboration d'une stratégie nationale de scolarisation des élèves des zones à forts défis sécuritaires. D'énormes efforts ont été consentis au Burkina Faso pour assurer l'éducation pour tous. Cependant, il convient de souligner que de nouveaux défis se présentent aux acteurs et partenaires de l'éducation. Parmi ces défis figure en bonne position la question de l'offre éducative en situation de crise sécuritaire. Cette problématique retient notre attention pour diverses raisons. |
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