Heiderich D. (2020) affirme que « la planification est
surtout envisageable dans un univers figé et dont l'horizon lointain
peut être déterminé, ce qui est rarement le cas des crises
qui nous imposent d'autres formes de gestion ». C'est pourquoi il
considère que « l'avenir de la gestion de crise appartient au
management de l'imprévisible » et propose un certain nombre de
pistes de réflexion et d'action.
· Gérer l'imprévisible nécessite de
dépasser les plans d'intervention élaborés qui sont
très détaillés et qui intègrent des
procédures de gestion et de communication de crise. Il faut au contraire
penser à instaurer une véritable culture de
l'imprévisible, du risque et de la gestion de crise au sein des
organisations.
· Se préparer à la crise consiste à
la fois à établir des relations publiques de crise et à
permettre que les acteurs « nouveaux venus » dans l'entreprise jouent
un rôle déterminant.
· Fixer des objectifs doit passer avant l'attente des
résultats car une logique d'objectifs laisse la place à
l'imagination et autorise le dépassement. Ainsi, il est possible de voir
les bénéfices non mesurés d'une gestion de crise
réussie.
· Coopérer permet d'agrandir le cercle des
alliés et génère du profit immatériel puisqu'il
devient possible d'ouvrir des opportunités.
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De son côté, Boyer F. (2022) présente un
certain nombre de recommandations qui pourront aider les entreprises à
s'adapter à l'environnement VUCA. Selon lui, elles seront capables de
faire preuve de sérénité dans un contexte
anxiogène, en différenciant ce qui est possible en termes
d'actions à réaliser, en prenant du recul, en faisant preuve de
discernement et en se montrant audacieuses et proactives. Par
conséquent, elles auront la possibilité de saisir des
opportunités d'évolution ou de renouveau.
Selon l'auteur, les sociétés doivent miser sur
l'agilité et la réactivité, afin de faire face à la
volatilité. Cela nécessite « d'assouplir les règles,
voire d'en supprimer certaines qui constitueraient un frein à
l'adaptation, de privilégier la culture du résultat à
celle du respect des procédés, ce qui suppose d'offrir plus
d'autonomie, d'adopter des « cycles courts » de production, pour
avoir un feed-back régulier de ce qu'il convient d'ajuster ou de
modifier avant que cela ne soit trop tard » (Idem.). En outre, les
entreprises devront mutualiser la diversité des talents et relier les
différents réseaux d'expertises, en valorisant l'intelligence
collective de leurs équipes dans le but de surmonter la
complexité de leur environnement. Enfin, elles sont amenées
à adopter une culture spécifique, celle du «Test &
Learn». Celle-ci consiste à expérimenter, à
s'autoriser à échouer et à apprendre de
l'expérience vécue. Ainsi, pour atteindre de tels objectifs,
à savoir, « évoluer avec sérénité et
efficacité dans un environnement en perpétuelle mutation,
imprévisible, complexe à comprendre et paradoxal » (Idem.),
les entreprises doivent développer de nouvelles aptitudes :
l'humilité, la confiance en soi, l'audace, la coopération, le
relativisme et le positivisme.
Chaminade B. (2021) précise que cela implique de la
part des décideurs de clarifier les objectifs, de focaliser, d'une part,
sur l'orientation stratégique et les valeurs de l'organisation, et
d'autre part, sur les attentes des employés par rapport à leur
rôle. Ces derniers doivent savoir clairement où l'entreprise se
dirige à long terme. En effet, l'incertitude et l'ambiguïté
ne peuvent pas empêcher l'entreprise de travailler sur une
variété de scénarios possibles, d'avoir une vision qui
évolue de même que les chemins qui permettent de l'atteindre. En
travaillant avec des informations toujours mises à jour,
consolidées et partagées, les directions peuvent réduire
les risques de l'incertitude. Elles peuvent même en profiter en les
combinant à une politique d'innovation plus forte, dans le but de les
transformer en avantages concurrentiels, qui renforcent leur
compétitivité. Il s'agit aussi de miser sur le collaboratif et la
transversalité. Les décideurs sont toujours à la recherche
de connaissances, d'informations et d'expertises sur des sujets toujours plus
variés, car prendre une décision sans disposer d'une vue
d'ensemble représente un risque que personne ne souhaite prendre. En
plus, chaque opportunité qui n'est pas saisie est une perte pour
l'organisation et offre des marges de manoeuvre à la concurrence. Alors,
les décideurs doivent mobiliser des savoirs présents au sein de
l'organisation, parfois dans ses territoires les plus éloignés.
Ils sont amenés à
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promouvoir l'intelligence collective car elle est
considérée comme la meilleure solution pour obtenir une vision
d'ensemble et trouver des solutions.
Les chercheurs et les leaders d'opinion conseillent de
s'assurer que les dirigeants ont les compétences et la formation
nécessaires pour mener leurs équipes au succès. Ils ont
opté pour trois compétences clés à maîtriser
par l'ensemble des décisionnaires (L'équipe Proevolution,
2020).
La première compétence est la connexion avec
les personnes. Elle implique que les leaders proposent une direction claire et
se font comprendre par tous les acteurs de l'entreprise. Ils doivent
démontrer une vraie volonté d'écoute et de
compréhension des autres. De plus, leur communication doit être
claire, fréquente, directe et ouverte. Ces leaders doivent avoir la
capacité d'inspirer les autres. La deuxième compétence est
la crédibilité. Elle engage les décisionnaires à
inspirer la confiance des supérieurs et des collaborateurs. Ils doivent
aussi être en mesure de prendre des décisions efficaces et
courageuses. La troisième compétence est l'agilité
intellectuelle. Elle nécessite que les leaders sachent
appréhender les situations changeantes. Ils doivent donc accroître
leurs capacités cognitives, s'engager dans une dynamique d'apprentissage
continu et s'impliquer dans une ouverture au changement.
Junod Berger N. (2020) insiste sur le rôle central que
joue la technologie afin d'aider les organisations à prospérer
dans le monde VUCA. Celles-ci doivent investir dans des outils qui facilitent
la collaboration et améliorent la mise en oeuvre stratégique.
Mais de nombreux auteurs dont Robinson R. (2017), Cavazza F. (2017), Amiri H.
(2022) focalisent sur les défis auxquels les dirigeants d'entreprises
sont confrontés et qui sont liés aux transformations des
pratiques de travail et des changements culturels induits par la
technologie.
Nous nous proposons dans les sections suivantes de
décrire plus en détails les principaux concepts,
mentionnés en amont, et considérés comme étant les
principes de gestion de VUCA.