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L'image de la femme dans les jeux vidéo


par Valentine Petit
Kedge Business School - Master 2 - Communication / Marketing / Management  2022
  

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3.3 L'image de la femme au coeur de la consommation 3.3.1 La vision marketing des entreprises

Les entreprises, à savoir les studios derrière le développement des jeux, ont une priorité, c'est de vendre leur produit. Pour cela, elles réalisent un certain nombre d'études afin de connaître le marché et de répondre à la demande. Pour certaines franchises très connues, c'est désormais assez facile, on peut notamment penser aux jeux FIFA : un nouvel opus sort tous les ans sans gros changement dans le jeu si ce n'est une actualisation des équipes et des joueurs, mais le jeu reste vendu à plusieurs centaines de milliers d'exemplaires dès sa sortie. Avec une moyenne de 89 millions de parties jouées par jour à peine un mois après sa sortie, un éditeur comme EA sait qu'il peut compter sur la renommée de l'entreprise pour vendre (L'Éclaireur Fnac, 2022). Mais cette renommée ne vient pas de nulle part : ce jeu tourne exclusivement autour du football qui est aujourd'hui le sport le plus visionné au monde et qui rassemble le plus de fans et de supporters.

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Pour de nombreux jeux, les studios s'appuient sur les instincts primaires de l'humain, à savoir

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la sexualité, en utilisant donc le corps de la femme de manière sexy et sexualisé pour vendre. Bien entendu, une fois de plus, il ne faut pas associer la situation d'il y a dix ou vingt ans avec la situation actuelle qui a grandement évolué. Pourtant, son héritage est toujours présent et les conséquences des choix qui ont été faits se ressentent toujours aujourd'hui. C'est bien connu : les seins vendent (Ilunaree). Si Lara Croft a eu autant de succès dès le début, ce n'était pas pour l'histoire ou pour le caractère particulièrement fort du personnage. Lorsque le jeu est sorti, la majorité des joueurs et donc des éditeurs étaient des hommes et ne pensaient donc qu'à une clientèle masculine et c'est pour ça qu'ils se sont concentrés davantage sur les attributs physiques de l'héroïne plutôt que sur sa personnalité. Dans certains jeux, il y a un travail énorme qui est fait autour de l'animation des seins féminins pour qu'ils bougent d'une certaine façon, souvent la plus aguicheuse possible, lors d'actions en jeu. À en croire Louis Di Battista « ça ne sert à rien et ça prend de la RAM », de manière générale ça n'apporte strictement rien au jeu, mais tant qu'il y aura des clients ça restera.

La question qu'il faut se poser est de savoir s'il s'agit, ou ou non d'un choix conscient des entreprises. Mais comme le souligne Alexandre Dachary, si les entreprises ne sont pas conscientes qu'avec une pochette de jeu de Senran Kagura comme celle-ci, la sexualisation des personnages est très clairement un outil marketing, c'est qu'il y a un problème.

Figure 20: Pochette de jeu de Senran Kagura

Ce côté sexualisant peut être utilisé de différentes manières, par exemple de nombreux jeux ont des publicités très sexualisées avec une histoire qui tourne autour d'un chevalier, de sa femme qui lui est soumise sous peine d'être emprisonnée alors que parfois le jeu en lui-même n'a plus rien à voir avec cela. Heroes Wars suit notamment cette logique : c'est un jeu d'aventure où nous incarnons des héros qui doivent avancer à travers une carte et obtenir des récompenses. Pourtant les publicités montrent tantôt un couple en train de se disputer, une autre fois des tours

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à détruire, une fois encore une femme en train de se faire écarteler.

De même, un style de jeu mobile qui a beaucoup émergé ces dernières années est celui d'incarner une femme laide, malodorante et mal vêtue qui se voit être rejetée par l'amour de sa vie : il faut l'apprêter pour que celui-ci revienne une fois l'aspect physique changé. Il y a toujours une logique d'humiliation vis-à-vis de la femme puisqu'elle n'est qu'un accessoire à mettre en avant le jeu : ainsi le joueur doit choisir entre une fille moche mais riche, ou belle et pauvre et assumer les conséquences de son choix. Dans d'autres jeux, le personnage principal est une femme qui doit choisir entre devenir cheffe de la mafia ou être kidnappée par son ancien mari (Rahmil, 2022). Pour beaucoup de jeux, la publicité n'est qu'un écran, une façade pour attirer les joueurs vers le jeu même si le contenu est différent. Les joueurs vont être intrigués ou se dire que le contenu de la publicité sera débloqué plus tard ou de manière payante : c'est sur ces joueurs que misent les créateurs. Un jeu de poker permettait également de dévêtir des filles pour chaque manche gagnée et ici la publicité était aussi fidèle que le jeu.

Alors pourquoi ce genre de pratiques sont-elles utilisées ? Pour commencer « le marketing n'a fait que suivre la demande, ils ont vu que ça marchait donc ils ont continué » (Servane Fisher) à produire des contenus sexy pour attirer la clientèle qui consommait. La société était déjà comme cela, à préférer « la beauté, la féminité, la douceur, le désir » (Aymeric Simeon) qu'incarnent les femmes plutôt que la force brute de l'homme. L'aspect masculin va les intéresser quand il s'agira d'incarner le personnage et de se glisser dans sa peau. À ce moment-là, les éditeurs vont prendre soin de remplir les idéaux de force, de courage, de puissance, de grandeur que tout jeune homme voudrait atteindre. Mais quand il s'agit du contenu du jeu en tant que tel, c'est ce qu'on voit qui est privilégié donc des femmes attirantes, qui sont souvent soumises au personnage incarné ou là pour le servir. On cherche à attirer grâce aux fantasmes en utilisant la femme comme une sorte d'hameçon, « il suffit de voir les thumbnails des vidéos YouTube c'est des fesses ou une poitrine alors que la vidéo n'a rien à voir derrière » (Mr Smith).

Est-ce un bien ou un mal, je ne pense pas qu'il soit vraiment possible de répondre à cette question. C'était un fait, un état qui était normal lorsque les ventes ont commencé parce que l'ensemble du marché était comme cela. Il suffit de regarder les publicités pour des boissons ou des voitures ou même pour un dentifrice pour en trouver très rapidement qui mettent une femme à moitié nue en avant alors que ça n'avait aucun rapport avec le produit mais que ça attire le regard. Peut-on donc blâmer les producteurs d'avoir voulu vendre ? Comme dans beaucoup de

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décisions il est rare que la morale entre en considération pour laisser une place plus importante au rendement. Et en partant du principe que les concurrents agissaient de cette manière, tout le monde se devait de suivre le mouvement pour rester compétitif.

En revanche, les choses ont évolué. Si on reprend l'exemple cité plus haut des publicités pour jeux mobiles, il y a toujours cette sexualisation mais les jeux mobiles sont souvent considérés comme une catégorie bien à part. Dans d'autres jeux la situation est différente et il existe donc des barrières au contenu sexualisé qui n'existait pas il y a quelques années. Les plus grandes franchises comme Riot ou Blizzard sont conscientes de ces enjeux et cherchent désormais à favoriser le lore ainsi que l'histoire plutôt que le physique (Lara Lunardi). Ce sont les qualités du gameplay, des quêtes, du graphisme, en bref du jeu en tant que tel qui sont vantées.

Le corps de la femme est donc aujourd'hui bien moins mis en avant que par le passé. Mais est-ce que cela a changé quelque chose pour les consommateurs ? Est-ce que cela a eu un réel impact sur leurs choix au moment de l'achat ?

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"Enrichissons-nous de nos différences mutuelles "   Paul Valery