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L'image de la femme dans les jeux vidéo


par Valentine Petit
Kedge Business School - Master 2 - Communication / Marketing / Management  2022
  

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3.2.2 Les ligues féminines sont-elles une véritable aide pour la place des femmes ?

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Comme nombre de questions, la réponse que nous pouvons apporter à celle-ci est loin d'être unanime. Dans les compétitions esportive, hommes et femmes sont autorisés à concourir de la même façon, avec les mêmes règles et les mêmes contraintes. Cependant, trouver une femme dans des compétitions officielles et de haut niveau relève du miracle car celles-ci en sont absentes. Quelle en sont donc les raisons ? Contrairement aux disciplines purement sportives qui viennent justifier d'une différence sur le plan physique et qui justifient donc la séparation des deux sexes pour les compétitions, l'esport est quant à lui bien plus égalitaire. Le cerveau de l'homme et celui de la femme sont globalement similaires, tout du moins sur l'aspect ludique. Pourtant, pour rappeler ce que disait Borkowski dans son mémoire de recherche, les hommes émettent plusieurs justifications à cette désertion tel qu'un « niveau plus faible, une attirance moins forte pour la compétition, une appréhension à aller en compétition en tant que joueuse, de faire face aux regards masculins ».

Ainsi, malgré ces capacités similaires, les femmes sont tout de mêmes laissées sur le côté. Parmi les 500 premiers joueurs au niveau mondial, il n'y a qu'une seule femme. Par conséquent, celles-ci sont évidemment moins nombreuses sur le plan compétitif. La solution qui pourrait apparaitre comme idéale serait donc la mise en place de ligues purement féminines, mais sur ce projet, les avis divergent.

Dans un premier temps, vient l'argument de dire que les ligues féminines permettraient à davantage de femmes de se présenter au niveau compétitif. En effet, étant donné qu'elles ne sont pas toujours au même niveau que les hommes, jouer entre elles pourrait leur permettre d'accéder à la compétition et il y aurait sûrement beaucoup plus de femmes dans les compétitions en général. Par ailleurs, « peut-être que des ligues féminines pourraient être la solution pour être sûrs de ne pas avoir d'inégalités entre les deux sexes » (JC Daull). Même si le physique n'entre pas en compte, on ne peut pas savoir avec exactitude s'il n'y a pas une différence aussi au niveau des réflexes entre les deux sexes. Peut-être celle-ci n'est-elle qu'au niveau des individus mais pour le moment nous n'en savons rien. Par conséquent, faire cette distinction permet de prévenir de toute inégalité. De plus, les femmes bénéficient de manière générale de bien moins de visibilité que les hommes et cela quelle que soit la discipline.

L'infographie ci-dessous date de 2019 et indique la médiatisation du football masculin et féminin. Pour le moment, l'esport et les ligues féminines sont à peine développés donc une telle infographie n'aurait pas de sens. En revanche, il est facile d'établir un parallèle entre ces deux

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domaines puisque les footballeuses font face aux même contraintes et problèmes que les joueuses d'esport en termes d'audience, de sponsors, de communauté. Comme le montre ce rapport, entre le footballeur le plus suivi et la footballeuse la plus suivie, on peut multiplier le nombre d'abonnés sur Instagram par plus de 137 000 fois. L'écart est donc monumental et est dû à la visibilité dont bénéficient les hommes, à la publicité et aux sponsors qui les entoure ainsi qu'à l'engouement qui existe bien plus autour du sport masculin que féminin dans sa globalité.

Figure 16: larevuedesmedias.ina.fr, 2019

Pour beaucoup d'autres personnes interrogées, les ligues féminines seraient l'occasion de prouver que les femmes ont un niveau similaire aux hommes. Mais il faudrait que ces ligues aient des moyens afin d'offrir le même cadre et le même budget que celui accordé aux équipes masculines (Louis Di Battista). Pour cela, il faut donc des sponsors et donc des personnes regardant les matchs. C'est donc un cercle vertueux ou vicieux en fonction du point de départ. Pour le moment les femmes ne sont pas autant mises en avant que les hommes et bénéficient de bien moins de visibilité, par conséquent les sponsors sont absents. Si beaucoup de publicité était faite en faveur des ligues féminines pour inciter à regarder, cela attirerait au contraire du

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monde donc des sponsors et cela permettrait aux femmes de prendre en compétence grâce à de meilleurs équipements et un meilleur encadrement global.

Enfin, la dernière chose qui est mise en avant par les défenseurs de ces ligues est que ces évènements permettraient de donner la parole aux femmes afin qu'elles puissent s'exprimer, se mettre en avant, sans qu'il y ait en permanence l'ombre d'un homme derrière elle dans toutes leurs actions. Quand on sait qu'il y a une femme qui brille pour plus de 500 hommes, ouvrir ces ligues permettrait à toutes les femmes qui n'ont pas eu la chance d'être aussi haut niveau ou qui se seraient perdues dans la masse de personnes dans un tournoi classique, d'être sur le devant de la scène et de devenir des rôle modèles.

Mais beaucoup restent sceptiques. Bien que sur le fond, le principe des ligues féminines soit une bonne chose, créer une « ligue spéciale [reviendrait à] masquer le problème de base » (Bilel Naouar) à savoir celui du sexisme et de la discrimination. Est-ce que mettre les femmes à part de la sorte ne reviendrait pas finalement à « ghettoïser un sexe » et donc venir à l'encontre de « l'objectif final qui est de créer de la mixité » ? (Mr Smith). C'est en effet une question essentielle parce qu'en théorie aujourd'hui les femmes ont leur place en compétition. Elles ne sont pas interdites. Certes il n'y en a pas mais personne ne les empêche de s'inscrire. En revanche, peu d'entre elles ont le niveau ou peu d'entre elles ont l'envie de se mettre autant en avant : une femme qui parviendra à se hisser au milieu d'une équipe masculine sera forcément sous le feu des projecteurs et sera scrutée avec d'autant plus de force et d'intensité ce qui est une pression énorme que les joueuses n'ont pas forcément envie d'endurer.

Enfin, d'autres sont très clairement contre et souvent en raison de ce que nous avons abordé juste avant comme le problème de visibilité. Malgré le fait d'avoir une ligue consacrée aux femmes, si celle-ci n'est pas mise en avant cela ne permettra pas d'avancer et cela peut même venir desservir la cause des femmes qui sont du coup relégué à un second plan parce qu'elles ne sont pas parvenues à se hisser comme égales des hommes.

L'association Game'Her s'était d'ailleurs exprimée à ce sujet par rapport à la mise en place de La Ligue féminine, un tournoi féminin communautaire organisé sur League of Legends et sur le fait que ce genre de tournoi se devait de n'être qu'une passerelle à court terme et non quelque chose de fixe (La Ligue Féminine : une ligue aux saveurs d'esport et d'émancipation - Game'Her, 2018). Le but de ces ligues est d'aider les femmes à se lancer vers une situation plus

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permanente mais cela ne doit pas être permanent au risque de mener à un « clivage compétitif hommes / femmes ». De plus, pour certaines entreprises ou organisateurs, les ligues féminines ne sont qu'un effet de mode, sans réelle vision et ambition derrière. Si ces ligues avaient pour but de former et de porter les femmes, cela serait quelque chose d'intéressant à envisager mais par exemple « sur Counter Strike ils ont vraiment séparé les deux ligues et ils ont fait en sorte que les femmes jouent en elles et n'aient pas forcément accès aux tournois réguliers » (Servane Fisher). Il y avait un espace pour les femmes mais parce qu'elles l'avaient réclamé et que c'était une bonne chose pour la presse, non parce que c'était quelque chose pouvant vraiment aider les femmes à avancer dans des compétitions formatrices et professionnalisantes.

Enfin, les tournois actuels sont mixtes car rien ne laisse penser que les hommes et les femmes différent dans leurs capacités mentales pour jouer aux jeux vidéo, alors pourquoi diviser une fois de plus les hommes et les femmes ? C'est un « split qui est hérité du modèle sportif traditionnel [mais dans l'esport] ça n'a pas de sens de séparer les deux » (Cholé Brissaud).

Alors pour conclure, est-ce une bonne chose ? Personnellement, je pense qu'à court terme c'est une mesure qui va aider les femmes à se construire une communauté, à se faire connaitre et à être mises en relation avec des sponsors. Mais cela ne doit pas devenir un état permanent. De nombreuses femmes ne se lancent déjà pas dans la compétition à l'heure actuelle simplement par peur de ne pas être pris au sérieux. C'était le cas de Chloé « Zelha » Bocobza, qui est aujourd'hui manageuse de l'équipe Exalt et pour qui le sexisme omniprésent dans ces compétitions a été un blocage énorme (Boquen, 2019).

Le niveau masculin est aujourd'hui considéré comme bien supérieur notamment parce que les hommes bénéficient d'un coaching spécialisé et personnalisé en fonction de leurs besoins et de leurs attentes. Si cette possibilité est donnée aux femmes, nombre d'entre elle atteindront facilement le niveau des hommes et pourront donc participer aux tournois mixtes sans se soucier d'un quelconque écart de niveau. Il faut également que les mentalités changent car aujourd'hui il est d'usage de croire que les femmes ne sont capables de jouer que des roles de support donc des roles de soin ou de bouclier pour soutenir l'équipe et non des roles clés.

Ce sexisme a été vécu en direct par le roster féminin Vaevictis eSports, un roster russe évoluant en LCL en 2019. Très clairement ce roster n'était pas du tout au niveau mais a été présenté pour faire bonne figure, pour justement mettre des femmes en avant. Sauf qu'au final celles ont fini

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la compétition en 0-28 avec une moyenne de 26 décès par match, montrant donc un niveau dont il était facile de se moquer. Les joueurs en face ont commencé à jouer des champions totalement hors de la meta pour se moquer d'elles et ont banni seulement des supports car, il faut le rappeler, les femmes ne sont capables de jouer que ce genre de champions.

Le problème de cette situation est qu'on se retrouve typiquement dans cette mode de mettre des femmes en avant même si elles n'ont pas le niveau. Et en effet, Anastasiya "HellMa" Pleyko, la toplaneuse de l'équipe l'explique tout simplement parce qu'elles étaient toutes les cinq diamant face à des joueurs challenger donc forcément il y avait encore un très gros écart de niveau entre ces divisions, en plus à cause du manque de joueuses professionnelles, il n'y avait pas de joueuses pour tous les postes donc certaines ont été autofill c'est-à-dire qu'elles ne jouaient pas à leur poste habituel ce qui les handicapent forcément (Flamm, 2020).

Figure 17: Screenshot de la partie de League of Legends jouée par Vaevictis Esports

On se retrouve à obtenir l'effet inverse de celui désiré, ce roster s'est retrouvé être la source de moqueries, de manque de respect et est donc venu desservir la cause des femmes qu'il tendait à défendre initialement. Dans ce cas précis, une ligue féminine aurait été bénéfique car comme le disait l'une des joueuses, aucune femme n'avait le niveau pour s'opposer aux ligues masculines, ils ont pris les meilleures femmes mais celles-ci avaient toujours un niveau inférieur, et le résultat est finalement négatif.

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"Ceux qui vivent sont ceux qui luttent"   Victor Hugo