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L'image de la femme dans les jeux vidéo


par Valentine Petit
Kedge Business School - Master 2 - Communication / Marketing / Management  2022
  

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3.1.2 L'évolution de la représentation de la femme au sein des jeux

Comme nous l'évoquions dans la précédente partie, le monde du jeu est un reflet de la société actuelle. Dans une société où les hommes ont toujours été au pouvoir, il est tout naturel que ceux-ci se soient emparés en premier de ce nouveau monde virtuel que formaient la technologie, Internet et les jeux vidéo. Louis Di Battista nous le rappelle très bien, à la création d'Internet, des « règles » plus ou moins informelles ont été édictées et la règle numéro 30 spécifiait clairement « There are no girls on the internet ». Bien entendu, ces règles n'ont rien d'officiel, elles ont été publiées par les Anonymous sur un Wiki satirique mais restent très connues notamment pour tous les aspects sexuels qu'elles couvrent, la numéro 34 étant la plus connue de toutes : « There is porn of it. No exceptions. » (Rules of the Internet, s. d.).

Cette société médiatisée a donc commencé en baignant dans des principes relativement sexistes puisque les femmes étaient considérées comme des êtres à bannir de ces plateformes sauf pour les contenus pornographiques où elles étaient cette fois ci les bienvenues. Par conséquent, le contenu des jeux « s'adressait clairement à des joueurs masculins » (Omega Zell) puisque les réalisateurs et les concepteurs des jeux étaient aussi des hommes qui n'envisageaient pas un instant de devoir créer des jeux convenant à toute la population. Et si les studios ont continué dans cette voie, c'est aussi parce que la sexualisation des personnages féminins a été une sorte de fantasme pour de nombreux consommateurs et donc que les réalisateurs avaient une clientèle toujours prête à acheter les nouveaux produits.

Par ailleurs, lors de la création des premiers jeux, la technologie était bien moins développée que la nôtre. Par conséquent, pour être certains que tout le monde distingue les hommes des femmes, ces dernières ont d'emblée été dotées d'une très forte poitrine, de cheveux longs et blonds et de costumes roses très voyants. « Le bal de la représentation sexiste et hypersexualisée était lancé » (Massicolli, 2012).

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Dès les premiers jeux, « dans les Mario et dans les Zelda on incarne un homme qui va sauver une femme des griffes du personnage maléfique » (Mme Dupont). Il y a toujours ce rapport de force qui est mis en place pour valoriser l'homme, le héros, le guerrier, le mâle dominant qui vient secourir la demoiselle en détresse, qui est faible et incapable de se débrouiller seule. C'est une vision très étriquée mais qui est malheureusement celle véhiculée dans de nombreux jeux. L'autre penchant est la version sexualisée comme dans le jeu Dead or Alive qui est « clairement conçu pour [être vendu] à des hommes gonflés aux hormones qui souffrent d'un manque affection » (JC Daull) où les filles sont toutes très jeunes et ont un corps complètement surréaliste. En voyant ce genre de jeux, il faut s'imaginer les répercussions que cela peut avoir sur les hommes dans leur quotidien, sur leur manière de voir les femmes et il faut sincèrement s'interroger pour savoir si cela a une réelle influence sur le comportement. Nous avons analysé l'étude de Dill, Brown et Collins (2008) dans la première partie qui étudie les conséquences des jeux vidéo sur les genres et le harcèlement, et la conclusion aboutissait à une corrélation entre la hausse du harcèlement envers les femmes et le fait d'avoir été soumis à des images sexualisée pendant une période donnée.

Par conséquent, en se fondant sur ces analyses, il apparait nécessaire de souhaiter un changement dans les jeux pour que ceux-ci promeuvent une vision plus respectueuse de la femme et des êtres humains en général. Mais cela ne veut pas dire tout changer, tout modifier et ne plus jamais produire un tel contenu : « On n'a pas besoin de tout lisser entièrement parce que la richesse du jeu vidéo c'est aussi sa diversité » (Julie Bonnecarrere). Ce qui est essentiel, c'est de parvenir à une égalité dans les contenus produits et que la majorité ne soient plus des contenus ultra sexualisés. Pour établir un parallèle avec le cinéma, de nombreux studios cassent les codes ces dernières années en employant des femmes ou des acteurs de couleur pour jouer des rôles traditionnellement donnés à des acteurs cisgenres blancs. C'est une démarche qui permet de promouvoir l'inclusivité mais on ne doit pas tomber dans l'extrême opposé et permettre aux hommes et aux femmes quelle que soit leur couleur ou leur orientation d'avoir un rôle. De même, un jeu hyper sexualisé n'est pas un problème : ce qui pose problème, c'est quand l'ensemble des jeux sont conçus ainsi. Par exemple, avoir une personne sourde-muette, quasiment nue en train de se tortiller sous la pluie dans Metal Gear Solid est dérangeant parce que c'est une vision totalement erronée et qui n'a rien à faire là (Mme Dupont).

Se rendre compte de la sexualisation des personnages féminins est somme toute assez facile, il

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suffit de comparer la même armure pour un homme ou pour une femme et voir que l'armure suprême masculine va être une armure imposante, qui ne laisse rien voir, qui fait très peur, tandis que l'armure féminine est un bikini ou alors quelques bouts de tissu assemblés et ces deux armures vont être de rang égal, vont pouvoir prendre le même montant de dégâts malgré leurs différences apparentes (JC Daull). Dans les jeux où il y a des skins pour les personnages c'est pareil, la plupart sont beaux, très sexy, avec peu de tissu et montrant beaucoup de peau.

Heureusement les mentalités changent et les initiatives pleuvent. Par exemple, Riot Games a su tirer un enseignement de League of Legends lorsque la scène compétitive de Valorant a été mise en place. Il y a eu un réel désir d'inclusivité, de diversité et ce n'était pas juste « une scène pour faire plaisir » (Servane Fisher). En revanche, il faut bien se rendre compte que malgré toute la bonne volonté qu'ils y ont mise, il est difficile d'attirer les femmes et que même si certaines sont présentes dans les tournois, elles restent une minorité et ont donc peu de chances d'arriver jusqu'en finale et donc de se démarquer. Mais cela reste malgré tout une avancée importante.

De la même manière, il y a de plus en plus de jeux qui mettent en avant des femmes ou qui au moins laissent le choix du genre du personnage principal au lieu d'avoir directement un personnage masculin. Les jeux sont beaucoup moins sexistes ou alors il s'agit de franchises connues pour leur contenu et où le client est prévenu en amont. Mais il n'y a quasiment plus de contenu ultra sexualisé au milieu d'un jeu sans aucune raison comme on a pu l'avoir pendant des années (Cholé Brissaud). Des héroïnes fortes et indépendantes comme Ellie dans The Last of Us ou Aloy dans Horizon sont mises en avant. Mais une fois de plus c'est une victoire modérée : bien que des femmes soient désormais les personnages principaux, ces deux-là sont celles que tout le monde va citer parce qu'il n'en existe pas assez pour en citer d'autres. De plus, un personnage comme celui d'Aloy a réussi à faire polémique pour le simple fait que son visage a des poils comme n'importe quel être humain. Cela peut sembler surréaliste mais c'est la stricte réalité, comme le montre cette réponse à un tweet : l'auteur initial s'étonne et demande à ce qu'on lui explique pourquoi Aloy a de la barbe... Alors que non il s'agit juste de la pilosité féminine que nous avons toutes.

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Figure 14: Screenshot d'un poste Twitter concernant le jeu Horizon Zero Dawn

Si cette remarque peut faire sourire, elle soulève pourtant un débat important au sujet du réalisme accordé aux personnages dans les jeux. Dans les jeux, les personnages sont tous très beaux, les femmes sont des entités aux proportions surdimensionnées qui ont pour but de faire fantasmer. Pour les hommes c'est pareil, ils sont tous musclés, jeunes, beaux, attirants. Si des personnages sont laids, c'est parce que ça a été voulu très spécifiquement par le scénario, que c'est l'objet de tout le jeu ou que souvent il s'agit de la race ennemie. Mais les personnages principaux sont toujours beaux tout simplement parce que ça se vend mieux et qu'on a plus de facilité à s'associer à ce genre de personnage (Alexandre Dachary). Si on considère les remarques au sujet d'Aloy, peut-on en déduire qu'un personnage ressemblant réellement à une femme est moins vendeur, moins attractif et que seuls les corps irréalistes séduisent le public ? Pour beaucoup, le physique n'entre désormais plus en considération lorsqu'il s'agit de choisir un jeu mais c'est bien davantage l'histoire et la description des personnages qui influencent les mentalités (Arborealkey).

Pour conclure, la manière dont les femmes sont représentées dans les jeux n'a eu de cesse

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d'évoluer ces dernières années, allant de la représentation ultra sexualisée des femmes en bikini ou à moitié nues, aux héroïnes en combinaison, équipée pour la guerre ou la survie, fortes et indépendantes. Cette vision-là qui est donnée des femmes est à mon sens une bonne chose s'il elle n'est pas unanime. De la même manière que toutes les femmes ne sont pas des objets de plaisir, toutes ne sont pas des aventurières courageuses. Il faut que les enfants ou les jeunes qui choisissent un jeu puissent faire leur choix parmi un certain nombre de possibilités aussi bien physiques que mentales et aient le choix d'être brave ou timide ou sexy etc...

L'important selon moi est d'explorer le plus large champ des possibles afin de ne pas se retrouver cantonné à une seule façon de voir les choses. De cette façon, il y aura peut-être des femmes ou des hommes sexualisés dans les jeux mais ils ne représenteront pas la majorité et cela aidera très certainement à redorer l'image des femmes et à en convaincre certaines de se lancer de manière professionnelle dans le jeu.

Oui, je pense, mais je pense que la société a évolué. Ce n'était pas forcément quelque chose de négatif à l'époque dans les années 1970 à 1990, on aimait beaucoup les clichés, on mettait beaucoup les gens dans des cases donc on pouvait sexualiser les femmes et en faire des objets sans avoir conscience des répercussions sur la société et pour les femmes. (Servane Fisher)

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"Il faudrait pour le bonheur des états que les philosophes fussent roi ou que les rois fussent philosophes"   Platon