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L'image de la femme dans les jeux vidéo


par Valentine Petit
Kedge Business School - Master 2 - Communication / Marketing / Management  2022
  

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1.3.3 Harcèlement et pouvoir de l'anonymat

Malgré des changements encourageants comme le montre la sortie du jeu Horizon, les mentalités des joueurs restent largement affectées par une perception genrée des rapports homme-femme et une certaine idée de la place des femmes dans les jeux. Bien que la moitié des joueurs soient en réalité des joueuses, ces dernières restent la cible d'insultes, de harcèlement et de préjugés qui découlent pour une partie de comportements calqués sur ceux des personnages masculins dans les jeux et pour une autre partie des rapports sociaux de genre dans lesquels nous sommes immergés.

Ce sexisme grandissant a atteint un paroxysme avec le hashtag #1ReasonWhy qui dénonce le sexisme et le harcèlement que subissent les femmes dans l'industrie du jeu ainsi que le hashtag #gamergate qui expose une culture misogyne en place depuis de nombreuses années (Dewey, 2014). Deux camps se font face : l'un principalement composé de femmes travaillant dans l'industrie du jeu et militant pour plus d'égalité concernant notamment les salaires et la manière dont elles sont considérées, et l'autre d'une population à tendance traditionnaliste, le plus souvent misogyne, et pour certains ne supportant pas l'introduction des femmes dans leur soi-disant univers. C'est une opposition entre un ancien et un nouveau mode de fonctionnement qui était recevable jusqu'ici mais dont les contradictions sont de plus en plus visibles avec les

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évolutions sociétales contemporaines. Ce scandale débute à la suite d'accusations envers Zoe Quinn, une créatrice de jeu accusée d'avoir échangé des services sexuels contre une couverture médiatique pour son jeu. Ces accusations se sont révélées fausses, dictées par la jalousie et par un désir de vengeance envers Quinn. À la suite du Gamergate une peur s'installe d'être encore plus harcelée car certaines ont osé prendre la parole.

« Ce que je tiens à dire, c'est que la prolifération d'images de moi nue, de menaces de mort, de vandalisme, de publication d'informations personnelles sur mes amis trans (...), la divulgation de mon adresse postale, les menaces de viol, les memes de moi en prostituée, les incitations à me suicider, les insultes en tout genre (...), tout ça, est inexcusable et continuera d'arriver aux femmes tant que cette culture ne changera pas. Je ne suis certainement pas la première. J'espère que je pourrai être la dernière » Zoe Quinn sur son compte Twitter, 2014

À la suite de ces mouvements, une certaine prise de conscience a pu être observée. Des plateformes comme Twitch ont présenté leurs excuses pour ne pas avoir agi plus tôt et ont promis de mettre en place plus de règles et de cadres. D'autre part, certaines personnes mises en cause ont présenté des excuses publiques, assurant ne pas avoir pris conscience de la gravité de leurs actes. La simple prise de conscience est déjà une avancée importante quand on sait à quel point la culture du jeu vidéo est machiste.

Au niveau des entreprises, Ubisoft est l'exemple le plus parlant en raison de nombreuses affaires de harcèlements et d'agressions sexuelles au sein de ses équipes. Après le mouvement #MeToo, ces témoignages ont été largement entendus et certaines mesures ont été prises. Certains dénoncent même parfois un laxisme vis-à-vis des accusations émises. En effet, plusieurs femmes ont publié leur histoire, ce qu'il leur était arrivé avec des collègues, des supérieurs, des journalistes, aussi bien des avances ou des remarques déplacées que du harcèlement continu pouvant parfois aller jusqu'au viol. Le plus grave est que nombre de cadres de l'entreprise étaient au courant mais avaient gardé le silence, dans un contexte de culture d'entreprise toxique et négative qui valorise le harcèlement jusqu'à le voir comme un signe de pouvoir.

De la même manière, Activision Blizzard a été accusé de favoriser le harcèlement en contribuant à des carrières inégalitaires. Des avances, des commentaires sexistes ou encore des attouchements étaient le quotidien des collaboratrices de l'entreprise c'est pourquoi le

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Department of Fair Employment a décidé de déposer plainte.

Ces réflexions permettent de faire émerger une question : y a-t-il un rapport entre les jeux vidéo hyper sexualisés et le harcèlement sexiste en vigueur en leur sein ? Plusieurs études ont souligné les conséquences négatives à observer et manipuler une femme qui ne sert que de décor en petite tenue. Une étude de Dill, Brown et Collins (2008) analyse les conséquences des jeux vidéo sur les genres et donc le harcèlement souvent subi par les femmes ou les personnes LGBT. Le principe de l'étude est simple : il s'agit de montrer à des hommes des photos de personnages très sexualisés dans un jeu vidéo ainsi que des photos de personnes dans leur environnement professionnel. Par la suite ces personnes étaient interrogées sur le harcèlement sexuel et ce qu'ils en pensaient. Il est avéré que le fait d'avoir été mis au contact d'images suggestives les a rendus plus enclins à tolérer voire à accepter ce harcèlement. Face à ces images où la femme est vue comme inférieure à l'homme, les auteurs notent deux types de réactions et soulignent leur dimension genrée : pour les hommes il s'agit de laisser les femmes à leur place tandis que les femmes s'élèvent contre cette injustice et cherchent à se faire entendre. Enfin, l'étude montre qu'une exposition à long terme à ce genre de représentations encourage un comportement plus tolérant vis-à-vis du harcèlement.

Figure 8: Étude du cabinet Accenture

L'anonymat contribue très largement à ce harcèlement : pour 92% des personnes, Internet leur permet d'être plus critiques que dans la vraie vie (Wright et al., 2002). Les harceleurs peuvent en effet se cacher derrière un pseudonyme et ne jamais avoir à faire face aux conséquences dans la vie réelle. Une étude concernant la manière dont les gens se comportent dans les jeux vidéo

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montre par ailleurs que des comportements comme le trash-talk, c'est-à-dire le fait de particulièrement mal parler à une personne, est toléré dans les jeux alors que ça ne serait pas en situation réelle. De la même manière, l'étude du cabinet Accenture déjà citée montre que 44% des joueurs considèrent les jeux vidéo comme une bonne plateforme pour se défouler et « trash-talk ». Harcèlement et représentation stéréotypée des femmes dans les jeux vidéo semblent donc bel et bien liés.

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"L'ignorant affirme, le savant doute, le sage réfléchit"   Aristote