CONCLUSION DU CHAPITRE I
Dans ce chapitre, il était question pour nous de vous
présenter les principes juridiques et économiques auxquels le
législateur camerounais a adhéré afin d'accroitre son
attractivité économique. Il en ressort que le législateur
a opté pour le libéralisme économique sur le plan
national. Cette attractivité est renforcée par l'adoption de
règles juridiques modernes, prévisibles et harmonisées au
plan régional d'où l'OHADA qui comble les attentes des
investisseurs. Elle lui fournit un corps de règles claires et modernes
qui régissent le droit des affaires. Le tout chapeauté par une
juridiction supra étatique qui juge en dernier ressort dans toutes les
matières régies par le droit OHADA.
Qu'en est-il des règles de mesures d'incitations
propres aux investissements directs étrangers au Cameroun ?
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CHAPITRE II : LA MISE EN OEUVRE DES MESURES LEGALES DE
PROMOTION DES INVESTISSEMENTS DIRECTS ETRANGERS AU
CAMEROUN
Il n'est pas rare que les Etats mettent en place des mesures
incitatives pour attirer les investisseurs étrangers sur leur
territoire. Celles-ci sont généralement de trois ordres: les
incitations fiscales, les incitations financières et les autres types de
mesures108. Le législateur camerounais ne déroge pas
à cette mesure. En effet, il a toujours participé activement
à l'attraction des investisseurs étrangers à travers
l'adoption de dispositions toujours plus incitatives. Le premier code des
investissements camerounais a été adopté un peu
après l'indépendance du pays, avec la loi de 1964 portant code
des investissements. Depuis lors une pléthore de textes contenant des
mesures incitatives s'est succédé. Cependant dans les
développements suivants, nous nous pencherons sur les plus
récents à savoir : la loi n°2202004 du 19 avril 2002 portant
charte des investissements ainsi que la loi n°2013/004 du 18 avril 2013
portant incitations aux investissements. Il convient de présenter les
mesures matérielles qui concourent à la promotion des
investissements (SECTION 1) avant de nous intéresser aux institutions
chargées d'accompagner les investisseurs (SECTION 2).
Section I: Les mesures d'ordre matériel
Deux types d'incitations seront examinés dans les
lignes suivantes. Il s'agit d'une part des incitations fiscales et
douanières (paragraphe 1), d'autre part, les incitations
financières (paragraphe 2).
Paragraphe 1: les incitations fiscales et douanières
contenues dans la loi de 2013
La loi n°2013/004 du 18 Avril 2013 sur les incitations
à l'investissement privé en république est la loi de droit
commun fixant le régime incitatif au Cameroun. Dans ce paragraphe, nous
traiterons principalement des incitations fiscales et douanières. Le
régime de droit commun (A) ensuite le régime particulier des
incitations (B).
108 S. ROBERT-CUENDET, Spécificité et
privilèges dans le droit international de la protection des
investisseurs étrangers, in, Droit international des
investissements perspectives croisées, (sous la dir. de) Bruxelles,
Bruylant, 2017, pp 672
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A) Les incitations communes
Sont contenues toutes les incitations de droit commun
dévolues à tout investisseur qui remplit les conditions
prévues au titre deux de la loi de 2013 précitée. Les
incitations varient selon que l'on se trouve en face d'une entreprise
nouvellement créée (1) ou d'une entreprise existante (2).
1) Les incitations accordées aux entreprises
nouvelles
Les avantages portent sur la fiscalité interne. Ils
varient selon que l'on se trouve dans la phase d'installation ou
d'exploitation. Le législateur camerounais a prévu une
durée de cinq (05) années d'avantages particulièrement
dévolus aux entreprises en phase d'installation au Cameroun et une
dizaine d'années pour celles qui exploitent leur activité depuis
plus de cinq années sur le territoire Camerounais.
a) Les avantages accordés aux entreprises pendant
la phase d'installation : Ils sont de deux ordres à la fois
douaniers et fiscaux
i) Les avantages douaniers
Les entreprises nouvelles sont exonérées des
taxes et droits de douane sur les équipements et matériels
liés au programme d'investissement. De plus elles
bénéficient également d'un enlèvement direct de ces
mêmes équipements lors des opérations de
dédouanement109. Tout cela évite une perte de temps et
des frais liés au dédouanement des nouveaux investissements et
par conséquent rentabilise leurs opérations.
ii) Les avantages fiscaux
Les avantages portent sur la fiscalité interne.
L'investisseur est exonéré des droits d'enregistrement pour tous
les actes et transactions indispensables à la réalisation du
programme d'investissement en cours ou projeté110. Il s'agit
en outre d'exonérations portant sur les contrats de concession,
augmentation de capital, sur les droits de baux d'immeubles à usage
professionnel lié au programme d'investissement ainsi que sur les droits
de mutation sur l'acquisition d'immeubles et bâtiments indispensables
à l'opération d'investissement et enfin sur les droits
d'enregistrement des contrats de fournitures.
109 Article 6 de la loi précité
110 Elles sont contenues à l'article 4 de
l'arrêté n°366 du 19 novembre 2013 précisant les
modalités de mise en oeuvre des avantages fiscaux et douaniers de la loi
n°2013.
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Voilà énoncé de manière exhaustive
les droits fiscaux et douaniers auxquels peuvent prétendre des
opérateurs économiques étrangers désireux
s'installer au Cameroun. Les entreprises en phase d'exploitation peuvent
également bénéficier d'avantages fiscaux.
b) Les avantages accordés aux entreprises en phase
d'exploitation
Avant d'énoncer ces avantages (ii), il sera tout
d'abord question pour nous d'énoncer les conditions pour pouvoir en
bénéficier(i).
i) Critères d'éligibilité
La phase d'installation est définie à l'article
3 de la loi de 2013. Il s'agit d'une : « période
n'excédant pas cinq (05) ans, consacrée à la construction
et à l'aménagement des infrastructures et des équipements
nécessaires à la mise en place d'une unité de production
». Pour bénéficier des incitations, des critères
sont à remplir. Il s'agit de conditions quant au montant du capital
investi et à la valorisation du développement de
l'économie camerounaise.
? Montant du capital investi
Peuvent prétendre au bénéfice des
incitations contenues dans la loi n°2013 les investisseurs qui
réalisent durant la période des cinq années d'exploitation
un investissement d'un montant d'au moins un (01) milliard de francs CFA en ce
qui concerne la première catégorie, Entre un (01) et cinq (05)
milliards de francs CFA en ce qui concerne la catégorie B ; et enfin un
investissement supérieur à cinq (05) milliards en ce qui concerne
la catégorie
C111.
? Développement de l'économie camerounaise
Le législateur a par ailleurs joint à ce montant
d'autres conditions. On les retrouves dans le dispositif de l'article 4 de
l'arrêté précité. Elles sont communes à
toutes les trois catégories d'investissement. Il s'agit de la
création d'emploi par tranche de vingt (20) millions d'investissements
dans des secteurs définis dans ladite loi112. Augmenter la
balance commerciale à travers de fortes exportations représentant
au moins 20% du chiffre d'affaires hors-taxes au cours des cinq premiers
exercices de production ; utiliser les ressources naturelles nationales
à hauteur d'au moins 25% de la valeur des intrants ; et enfin
générer une augmentation de la valeur ajoutée d'au moins
25% dans les secteurs d'activités cités ci-
111 Article 4 de l'arrêté n°336
précité
112 Il s'agit du tourisme, l'industrie, l'artisanat, la
culture, le sport, le domaine sanitaire, éducatif,
énergétique, agricole, l'élevage et la pisciculture,
l'habitat social et enfin le transport urbain.
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dessus. L'investisseur devra en plus du capital investit
satisfaire au moins une des conditions ci-dessus citées pour pouvoir
bénéficier des incitations de la loi de 2013.
Après une lecture de la lettre de la loi nous nous
rendons compte que le législateur veut promouvoir le
développement du Cameroun à travers les investissements. Il le
fait dans divers secteur notamment en réduisant le taux de
chômage, en augmentant les exportations et de fait augmentant la balance
commerciale113, Enfin en favorisant l'exploitation des ressources
naturelles locales.
ii) Avantages proprement accordés aux entreprises en phase
d'exploitation
D'après la loi de 2013 précitée, la phase
d'exploitation est de dix114 ans. Elle est définie par la loi
: « Période de réalisation effective des
activités de production»115. Pour les entreprises
nouvelles, elle débute à la fin de la phase d'installation ou
dès la commercialisation des produits. Les entreprises
déjà installées peuvent également en
bénéficier ceci dès qu'elles mettent en oeuvre de nouveaux
investissements. Contrairement à la phase d'installation, l'investisseur
ici ne bénéficie non plus d'exonération mais plutôt
des réductions fiscales et douanières. Contenus à
l'article 7 de la loi précitée, ces avantages s'appliquent aux
droits d'enregistrement relatifs aux opérations financières
menées116 par l'entreprise.
? Réduction de 50% de l'impôt sur les
sociétés ou de l'impôt sur les bénéfices
industriels et commerciaux pour une durée de cinq (05) ans pour les deux
premières catégories et de 75% pour la troisième. Cette
réduction se poursuit lors de la sixième année
d'exploitation pour les entreprises appartenant aux deux dernières
catégories. Elles bénéficient d'une réduction de
25% et 50% respectivement lors de celle-ci ;
? Une exonération des droits d'enregistrement relatifs
aux prêts, emprunts, avances en compte courant et cautionnement pendant
cinq (05) ans ;
? Réduction de 50% de l'impôt sur le revenu des
capitaux mobiliers à l'occasion de la distribution des revenus de la
sixième à la dixième année ;
? Réduction de 50% des droits relatifs aux actes de
transfert de propriété ou de jouissance immobilière et de
baux pendant cinq (05) ans ;
113Ratio qui mesure la différence entre
la valeur des exportations et des importations et tient compte également
du solde du négoce international in Dictionnaire de finance de J.
et M. PEYRARD Op.cit .
114 Art 5 de la loi de 2013 portant incitations aux
investissements.
115 Art 3 de la loi de 2013 portant incitations aux
investissements.
116 C'est également le cas des prêts, avances en
compte courant, cautionnement, augmentation, réduction ou liquidation du
capital social etc.
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? Réduction de 25% de l'impôt sur le revenu de la
sixième année à la dixième année
Au plan douanier, des avantages sont également
accordés. Il s'agit de réductions sur les importations
d'équipement de matériaux de construction, l'exportation
d'équipements de construction et équipements des usines de
transformation.
Au terme de la phase d'exploitation qui au total dure quinze
années, phase d'installation comprise, l'investisseur est reversé
au régime du droit commun. Cependant d'autres moyens sont mis en oeuvre
pour lui permettre de bénéficier d'avantages de toutes sortes.
2) Les avantages accordés aux entreprises
existantes.
Il convient de rappeler que les entreprises existantes sont
celles qui ont bénéficié du régime d'incitations
prévue dans la loi de 2013 durant la phase de quinze ans (phase
d'installation et exploitation). Les entreprises existantes recouvrent
également celles qui réalisent un programme d'investissement
visant à étendre ses capacités de production et par la
même occasion augmente la production de biens et de services du
camerounais à hauteur de
20%117.
a) Sur le plan fiscal
Les avantages dont l'entreprise pourrait se prévaloir
ne saurait aller au-delà de la limite de cinq (05) ans. De plus ils
devraient être la conséquence du développement
d'activités portant sur l'un des secteurs prioritaires. L'investisseur
peut aussi bénéficier d'une exemption de paiement de
l'impôt sur les sociétés ou de l'impôt sur les
bénéfices industriels et commerciaux (Ceci sur la base de 25% du
montant des investissements sans excéder la moitié du
bénéfice déclaré pendant l'année fiscale en
question). L'alinéa 2 de la l'article précité
prévoit en outre un report des déficits sur quatre exercices clos
suivant l'année de la survenance desdits déficits.
b) Sur le plan douanier
L'importation des équipements liés à
l'extension de l'entreprise dont le taux du droit de douane sont réduit
de 5%. A l'exception d'une éventuelle redevance non fiscale ayant le
caractère d'une rémunération de services.
117 Art 17 de la loi de 2013 portant incitations aux
investissements.
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De tout ceci il en ressort que l'Etat camerounais à
travers cette loi donne la possibilité à tout investisseur
étranger ou local de bien se déployer sur le marché
camerounais. Cependant certains investisseurs du fait de leur secteur
d'activité bénéficient davantage d'incitations.
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