De la responsabilité du médecin découlant de la violation du secret professionnel médical en droit congolais. étude jurisprudentielle.par Dieudonné Bulambo Batumujaye Université Libre de Grands Lacs ULGL/BUKAVU - Licence en droit 2018 |
§4. De l'autorisation légale de l'article 458bis du Code pénal et des exceptions légales à l'obligation au secret professionnelC'est lors de l'adoption de la loi du 28 novembre 2000 relative à la protection pénale des mineurs60(*) que l'article 458bis a été introduit dans le Code pénal. Le législateur a ainsi ajouté une autorisation légale, pour les personnes tenues au secret professionnel, de révéler les mauvais traitements infligés à des mineurs d'âge moyennant le respect de conditions précises61(*). Les infractions pour lesquelles une permission légale
de déroger au secret professionnel est accordée par l'article
458bis du Code pénal sont énumérées de
façon limitative: l'attentat à la pudeur, le viol, l'homicide et
les lésions corporelles volontaires, la provocation, la mutilation des
organes génitaux, l'abandon d'enfants, la privation d'aliments ou de
soins infligées à des mineurs. Il est requis, outre l'existence
d'un danger grave et imminent pour l'intégrité physique ou
mentale du mineur, un examen préalable de la victime ou une
réception directe des confidences de celle-ci ainsi que le respect d'un
principe de subsidiarité (c'est-à-dire que le confident ne soit
pas en mesure, lui-même ou avec l'aide de tiers, de protéger cette
intégrité). Ce principe signifie que le médecin ou le
thérapeute doit, dans S'agissant des exceptions légales à l'obligation au secret professionnel, L'article 458 du Code pénal énonce lui-même deux exceptions à l'obligation au secret professionnel66(*). La première vise les cas où la loi oblige (ou autorise) les révélations (déclarations de naissance, de morts suspectes, de certaines maladies contagieuses ou sexuellement transmissibles,...), La seconde porte sur le témoignage en justice (ou devant une commission d'enquête parlementaire)67(*). La révélation spontanée et
indiscrète à l'autorité judiciaire n'est pas couverte par
l'exception du témoignage en justice68(*). En effet, pour être autorisé à
lever le secret professionnel, le dépositaire du secret doit être
appelé comme témoin devant une juridiction pénale ou
civile. Dans un arrêt du 14 juin 196569(*), la Cour de cassation a rappelé que les
révélations faites spontanément à l'autorité
judiciaire ne tombaient pas dans l'exception du témoignage en justice.
En cette cause, les poursuites du chef d'avortement, fondées uniquement
sur une révélation spontanée de faits et confidences
couverts par le secret professionnel, ont dès lors été
déclarées irrecevables, à l'égard non seulement de
la femme qui s'était confiée au médecin mais aussi de la
personne qui l'avait fait avorter. S'agissant des juridictions pénales,
le confident peut être appelé à témoigner devant une
juridiction de fond ou encore devant le juge d'instruction. La Cour de
cassation a indiqué Relevons par ailleurs que l'article 61 du Code de déontologie médicale, qui autorise également le médecin à informer le procureur du Roi de ses constatations si un enfant est exposé à un danger grave et imminent73(*), ne constitue pas une exception légale à l'obligation au secret. L'effet de cette disposition déontologique consiste simplement en l'absence de sanctions disciplinaires lorsque l'intervenant s'est conformé au prescrit de ces normes. §5. De la Comparaison entre l'article 458bis du Code pénal et l'état de nécessité. Alors que l'état de nécessité peut
justifier toutes les infractions, l'article 458bis du Code
pénal revêt, quant à lui, un champ d'application plus
circonscrit. Cet article s'applique, de façon limitative, aux
révélations de certaines infractions concernant les mineurs.
Cette disposition est aussi plus restrictive dans ses conditions d'admission
que l'état de nécessité. En effet, elle ajoute deux
conditions supplémentaires et cumulatives à ce qui était
jusque-là unanimement admis par les cours et tribunaux à propos
de l'état de nécessité. Elle requiert un examen
préalable de la victime ou une réception directe des confidences
de celle-ci. En outre, elle exige que le confident ne soit pas en mesure,
lui-même ou avec l'aide de tiers, de protéger cette
intégrité. Les informations (par exemple, des aveux de l'auteur)
fournies Précisons par ailleurs que, lors des travaux préparatoires de la loi du 28 novembre 2000, il n'a pas été clairement indiqué si l'état de nécessité peut encore être soulevé pour le cas où le médecin, confronté à l'une des situations prévues à l'article 458bis du Code pénal, procède à des révélations sans respecter toutes les conditions de cette disposition légale. Pour notre part, nous ne voyons aucune raison d'exclure, dans pareille hypothèse, la possibilité d'invoquer l'état de nécessité qui revêt une portée générale. * 60Art. 33 de la loi du 28 novembre 2000 relative à la protection pénale des mineurs, Mon.b. 17 mars 2001, entrée en vigueur le 1er avril 2001. * 61N. colette-BASECQZ, Le secret professionnel face à l'enfance maltraitée, Ann.dr.Louvain 2002, pp. 3-30. * 62Projet de loi relatif à la protection pénale des mineurs, Rapport fait au nom de la Commission de la Justice du Sénat par Mme Nathalie de T'Serclaes, Discussion, Doc.parl. Sén., sess. ord. 2000-01, n° 2-280/13, p. 15 * 63Justification de l'amendement n° 3 du Gouvernement, Doc.parl. Sén., sess. ord. 1999-2000, n°2-280/2, p. 4. * 64I. wattier, La loi du 28 novembre 2000 relative à la protection pénale des mineurs, J.T. 2001, p. * 65A. De nauw, Initiation au droit pénal spécial, Waterloo, Kluwer, 2008, p. 391. * 66L'art. 458 du Code pénal belge. * 67Ch. hennau-hublet, Le secret médical et ses limites. La dynamique du secret tend-elle vers son occultation?, o.c., p. 178. * 68NYPELS, Le Code pénal belge interprété principalement au point de vue de la pratique, Bruxelles, Bruylant, 1898, t. III, p. 542 * 69Cass., 14 juin 1965, Pas. I, 1965, p. 1102. * 70Cass., 15 mai 1985, Pas. 1985, I, p. 1147. * 71Ch. hennau-hublet et J. Verhaegen, Recherche policière et secret médical, o.c., pp. 164-167. * 72 G. BOURDOUX, L'intervention médicale urgente. Le secret médical et les nécessités de l'information et de l'instruction judiciaires pénales, in Formation permanente CUP, «Droit et médecine», vol. XI, 11 novembre 1996, p. 117 * 73Art. 61 du Code de déontologie médicale. * 74Discussion des articles, Doc.parl. Ch., Repr., sess. ord. 2000-01, n° 0695/009, p. 52. * 75Projet de loi relative à la protection pénale des mineurs, discussion des articles, Doc.parl. Ch. Repr., sess. ord. 2000-01, n° 0695/009, p. 52. * 76M. HIRSCH et N. KUMPS,
Secret professionnel et violence à l'égard des mineurs,
o.c., pp. 245-246. |
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