Paragraphe II. L'enjeu d'une distinction claire entre les
différentes catégories de SADO
Varient d'une catégorie juridique à l'autre les
obligations prévues par la CMB quant à la mise en place,
l'utilisation et le retrait des différents types de SADO (A) dans le
respect de certaines conditions de sécurité (B).
A. Les conditions relatives à la présence
des SADO dans les différentes zones maritimes
D'abord, la CMB prévoit que les navires affectés
à la recherche scientifique marine et aux levés hydrographiques
n'ont pas le droit de collecter des données marines pendant leur passage
inoffensif dans la mer territoriale479, leur passage
archipélagique480 ou leur passage en transit481,
sans l'autorisation préalable de l'Etat côtier. Dans la ZEE ou sur
le plateau continental, le nom, le tonnage, le type et la catégorie des
navires482 utilisés dans le cadre d'un projet de recherche
scientifique marine doivent être précisés à l'Etat
côtier six mois au moins avant leur entrée dans ces zones pour
procéder à la collecte des données marines. Dans la haute
mer, les navires naviguent sous le pavillon d'un seul Etat à la
juridiction exclusive duquel ils sont soumis483. Les chercheurs
doivent se servir de ces SADO à des fins exclusivement
pacifiques484 en tenant dûment compte de
l'intérêt que présente l'exercice de la liberté de
la haute mer pour ses autres usagers.
479 Article 19 de la CMB précitée.
480 Article 54 de la CMB précitée.
481 Article 40 de la CMB précitée.
482 Article 248 de la CMB précitée.
483 L'article 92.1 de la CMB précitée
prévoit: «Les navires naviguent sous le pavillon d'un seul
État et sont soumis, sauf dans les cas exceptionnels expressément
prévus par des traités internationaux ou par la Convention,
à sa juridiction exclusive en haute mer. Aucun changement de pavillon ne
peut intervenir au cours d'un voyage ou d'une escale, sauf en cas de transfert
réel de la propriété ou de changement
d'immatriculation».
484 Article 88 de la CMB précitée.
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Ensuite, l'article 258 de ladite Convention prévoit que
«la mise en place et l'utilisation d'installations ou de matériel
de recherche scientifique de tout type dans une zone quelconque du milieu marin
sont subordonnées aux mêmes conditions que celles prévues
par la Convention pour la conduite de la recherche scientifique marine dans la
zone considérée», en précisant que ces SADO
«n'ont pas le statut d'îles [et] n'ont pas de mer territoriale qui
leur soit propre»485. Leur présence n'a par
conséquent «pas d'incidence sur la délimitation de la mer
territoriale, de la ZEE ou du plateau continental»486. Ainsi,
dans la mer territoriale le matériel et les installations ne peuvent
être placés qu'avec le consentement express de l'Etat
côtier487 qui peut réglementer et refuser à sa
guise la mise en place et l'utilisation de ces SADO dans sa zone de
souveraineté488.
Dans la ZEE et sur le plateau continental, les installations
relèvent des droits et de la juridiction exclusifs de l'Etat
côtier. Celui-ci a le droit exclusif de construire et d'autoriser et
réglementer la construction, l'exploitation et l'utilisation des
installations affectées à des fins économiques telles que
l'exploration des ressources naturelles par exemple. L'Etat côtier a
également juridiction exclusive sur ces installations en matière
de lois et règlements douaniers, fiscaux, sanitaires, de
sécurité et d'immigration489.
Dans la haute mer, les installations et le matériel de
recherche scientifique marine doivent être affectés à des
fins exclusivement pacifiques et ne pas nuire
485 L'article 259 de la CMB précitée
prévoit: «Les installations ou le matériel visés dans
la présente section n'ont pas le statut d'îles. Elles n'ont pas de
mer territoriale qui leur soit propre, et leur présence n'influe pas sur
la délimitation de la mer territoriale, de la zone économique
exclusive ou du plateau continental».
486 L'article 60.8 de la CMB précitée
prévoit: «Les îles artificielles, installations et ouvrages
n'ont pas le statut d'îles. Ils n'ont pas de mer territoriale qui leur
soit propre et leur présence n'a pas d'incidence sur la
délimitation de la mer territoriale, de la zone économique
exclusive ou du plateau continental».
487 FREYMOND (O.), op. cit., p. 112.
488 Ibidem.
489 Articles 60 et 80 de la CMB précitée.
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à l'environnement490. Dans la Zone, les
installations en particulier doivent être montées et mises en
place conformément aux procédures prévues par
l'Autorité491.
Enfin, le retrait des installations et du matériel de
recherche scientifique marine varie lui aussi selon la zone maritime. Ainsi,
dans la mer territoriale, celui-ci est subordonné à la
réglementation de l'Etat côtier492. Dans la ZEE et sur
le plateau continental, les installations et le matériel sont
enlevés par l'Etat chercheur ou l'organisation internationale une fois
les recherches terminées, «à moins qu'il n'en soit convenu
autrement»493. Il est procédé à
l'enlèvement des installations en particulier «en tenant
dûment compte de la pêche, de la protection du milieu marin et des
droits et obligations des autres Etats. Une publicité adéquate
est donnée à la position, aux dimensions et à la
profondeur des éléments restant d'une installation [...] qui n'a
pas été complètement
enlevée»494.
Dans la haute mer par contre, la CMB garde le silence quant
à qui incombe l'obligation de retirer les SADO à la fin du projet
de recherche alors que repêcher
490 Article 240 de la CMB précitée.
491 L'article 147.2.a CMB précitée
prévoit: «Les installations utilisées pour des
activités menées dans la Zone [...] ne doivent être
montées, mises en place et enlevées que conformément
à la présente partie et dans les conditions fixées par les
règles, règlements et procédures de l'Autorité.
Leur montage, leur mise en place et leur enlèvement doivent être
dûment notifiés et l'entretien de moyens permanents pour signaler
leur présence doit être assuré».
492 Article 245 de la CMB précitée.
493 Article 249.1.g de la CMB précitée
prévoit: «Les États et les organisations internationales
compétentes qui effectuent des recherches scientifiques marines dans la
zone économique exclusive ou sur le plateau continental d'un État
côtier doivent [...] enlever les installations ou le matériel de
recherche scientifique, une fois les recherches terminées, à
moins qu'il n'en soit convenu autrement».
494 L'article 60.3 de la CMB précitée
prévoit: «La construction de ces îles artificielles,
installations et ouvrages doit être dûment notifiée et
l'entretien de moyens permanents pour signaler leur présence doit
être assuré. Les installations ou ouvrages abandonnés ou
désaffectés doivent être enlevés afin d'assurer la
sécurité de la navigation, compte tenu des normes internationales
généralement acceptées établies en la
matière par l'organisation internationale compétente. Il est
procédé à leur enlèvement en tenant dûment
compte aussi de la pêche, de la protection du milieu marin et des droits
et obligations des autres États. Une publicité adéquate
est donnée à la position, aux dimensions et à la
profondeur des éléments restant d'une installation ou d'un
ouvrage qui n'a pas été complètement
enlevé».
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certains SADO tels que les flotteurs profileurs devient
difficile voir impossible. En effet, ce matériel devient difficilement
localisable une fois la radio-transmission coupée à la fin de la
mission de collecte des données marines, et risque d'être perdu en
mer, ce qui pose un problème de pollution marine. Une partie de la
doctrine appelle à relativiser cette obligation si les SADO restent
introuvables après que des efforts raisonnables aient été
déployés et si ceux-ci ne peuvent être enlevés
qu'à un prix élevé alors qu'ils ne sont pas nocifs pour
l'environnement495.
La perte des flotteurs profileurs pose un problème de
pollution marine mais aussi de propriété intellectuelle. En
effet, les données marines collectées par ces SADO sont
transmises au laboratoire des chercheurs par satellite mais restent
enregistrées sur le flotteur. Aucune norme du Droit de la mer ne
répond à la question de savoir ce qu'un autre utilisateur de la
mer qui retrouve ce matériel perdu a le droit de faire de ces
données enregistrées496.
La CMB prévoit ainsi pour toutes les zones maritimes
des conditions relatives à l'installation, à l'utilisation et au
retrait de ces SADO ainsi que des règles de sécurité.
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