A. La multitude des facteurs de dissolution de la
société
La société en commandite simple est une
société qui ne dure pas longtemps. En France, par exemple, des
travaux de recherche ont permis de démontrer la rapidité avec
laquelle les sociétés en commandite simple ont disparu sans avoir
eu d'existence réelle à long terme.
Une équipe dirigée par le Doyen Alain VIANDIER a
retracé la vie des sociétés en commandite en
général. Sur les premières lignes de l'introduction du
document156 qu'ils ont
155 Décret n° 2012-038/PR du 27
juin 2012 portant révision des taux de cotisation à la caisse
nationale de sécurité sociale, art. 3.
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produit, il est repris partiellement l'affirmation de Pierre
CATALA en ces termes : « Des espèces en voie de disparition.
... Si la suggestion de créer un mouvement d'écologie
pour la survie des espèces juridiques était retenue, l'une des
manifestations de ce groupement devrait être en faveur des
sociétés en commandite »157. Cette
affirmation fait transparaître l'idée selon laquelle la commandite
simple, première forme de commandite, court le risque de disparition
encore plus accru du fait de son utilisation
restreinte158 et de la multiplicité des
causes de sa dissolution. La disparition de la SCS obéit aux causes
communes de dissolution posées par le droit commun des
sociétés159.
En dehors de ces causes de dissolution communes à
toutes les sociétés, il existe des causes de dissolution
spécifiques à la société en commandite simple.
Ainsi, la société est dissoute de plein droit par le
décès de l'associé commandité, sauf stipulation
contraire160. Il peut, en effet, être stipulé dans les
statuts que la société pourra continuer avec les héritiers
ou successeurs de l'associé commandité
décédé. En outre, dans le cas où les
héritiers sont des mineurs émancipés et que
l'associé décédé était l'unique
commandité, il faudra procéder à son remplacement. Si
aucun remplaçant n'a été trouvé, la
société devra être transformée dans un délai
d'un an, à compter de la date du décès de l'associé
commandité. A défaut, la société prendra fin
à l'expiration de ce délai161. De même, la
disparition d'une des deux catégories d'associés entraine la
dissolution de la société, dans la mesure où elle est
caractérisée par le seul associé commandité aux
commanditaires162.
La longueur de la liste de ces causes de dissolution prouve
suffisamment la fragilité de la vie d'une société en
commandité simple. La SCS la société est la
première société commerciale qui disparait à
rapidement et facilement. La transformation reste aussi un facteur de
disparition facile de la SCS.
156 A. VIANDIER (Dir.), J. HILAIRE, H. MERLE
et H. SERBAT, op. cit., pp. 19 s., Ce document retrace de façon
claire et pertinente l'évolution des sociétés en
commandite en France depuis 1840 jusqu'en 1978.
157 Idem., p. 1, n° 1.
158 L'utilisation restreinte de la
société en commandite simple est justifiée par les
inconvénients qui caractérisent cette forme sociale et par
l'avènement des sociétés à risque limité.
159 AUSCGIE, Art. 200.
160 AUSCGIE, art. 308, préc. ; B. LE
BARS, Droit des sociétés et de l'arbitrage
international, Pratique en droit de l'Ohada, Joly, Paris, 2011, p. 257.
161 A. FENEON, Droit des
sociétés en Afrique (OHADA), Issy-les-Moulineaux, LGDJ,
2015, p. 762.
162 N. DIOUF, « Les
sociétés de personnes », in Sociétés
commerciales et G.I.E., Bruxelles, Bruylant, 2002, pp. 363-364.
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B. La transformation comme facteur facile de
disparition
La société en commandite simple peut
disparaître sous sa forme originaire et renaître sous une autre
forme de société, c'est la transformation. Il s'agit du passage
d'une forme de société à une
autre163. La transformation est un facile pour la
disparition de la SCS.
L'Acte Uniforme n'a prévu, à cet égard,
aucune disposition spécifique pour la transformation de la
société en commandite simple. Il y a donc lieu de se
référer aux dispositions communes de transformation des
sociétés commerciales issues de l'article 181, alinéa 2 de
l'Acte uniforme. La transformation ne constitue qu'une modification des statuts
et qu'elle est soumise aux mêmes conditions de forme et délais
qu'une modification des statuts. Ainsi, elle doit être prise à
l'unanimité des associés commandités et à la
majorité en nombre et en capital des associés
commanditaires164. La transformation permettrait aux associés
commandités ne voulant plus courir le risque permanent d'une
responsabilité illimitée de se donner, le statut
d'associés d'une société à risque
limité165. Mais, jamais ceux-ci ne
pourraient opter pour une SNC lorsque la cause de la transformation est le
défaut d'associé commandité.
Toutefois, au cas où la voudrait se transformer en une
société en nom collectif, les associés commandités
doivent se prononcer à l'unanimité166.
Néanmoins, en cas de transformation de la société en
commandite simple en une société à risque limité,
les créanciers sociaux conservent leurs droits contre la
société et ses associés167. Ces derniers,
« pour autant qu'ils appartiennent à la catégorie des
commandités, restent alors indéfiniment et solidairement
responsables des dettes contractées par la société
antérieurement à sa transformation »168.
Tout compte fait, pour les associés commandités,
l'intérêt de la transformation de la SCS en une
société à risque limité est de ne plus être
tenu solidairement et indéfiniment des futures dettes sociales. C'est ce
mobile phare qui justifie la tentation constante de faire disparaître la
SCS pour une forme sociale plus avantageuse. D'où la fragilité de
l'existence des sociétés en commandite simple. Leur
quasi-inexistence dans l'espace OHADA se jusitifie par le fait que les
entrepreneurs préfèrent constituer les sociétés
à risque limité.
163 J. ISSA-SAYEGH, P-G POUGOUE et F. M.
SAWADOGO (dir.), Traité et Actes uniformes annotés
OHADA, Juriscope, 2018, op. cit., p. 448.
164 N. DIOUF, « Les sociétés
de personnes », in Sociétés commerciales et G.I.E, op.
cit., p. 363.
165 La société à risque
limité est celle dans laquelle les associés ne sont tenus des
dettes sociales qu'à concurrence de leurs apports.
166 AUSCGIE, Art. 186, al. 3.
167 Ibidem
168 A. FENEON, op. cit., p. 762.
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Les inconvénients émanant de la fin de la SCS
vont au-delà de la fragilité de l'existence de cette forme
sociale pour s'accentuer davantage sur l'incertitude du sort de cette
société du seul défaut de l'associé
commandité.
§2. LE SORT INCERTAIN DE LA COMMANDITE SIMPLE SANS
COMMANDITÉ
Une SCS sans un associé commandité ne peut
continuer qu'en cas de mention préalable d'une continuation avec les
héritiers de celui-ci (A), à défaut, la
société doit être dissoute (B).
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