B- Les débats environnementaux
Les plans d'actions que peuvent mettre en place les Parties
sont capitaux. Ce motif est largement suffisant pour que ceux-ci soient
confrontés à ceux qui devront les appliquer. Le mécanisme
de diffusion n'a d'utilité que s'il s'accompagne d'une transparence du
processus de prise de décision et permet au public d'exprimer ses
réticences avant qu'il ne soit trop tard123. Les
débats portant sur les plans dans le cadre de la lutte contre le
réchauffement climatique supposent ainsi une participation active de la
société civile.
121 SAMASSEKOU (A.), « La société civile,
acteur clé de l'information », Annuaire suisse de
politique de développement, novembre 2018
122 MISONNE (D.), « Access to information, the hidden
human rights touched of the Paris Agreement? », Intersentia, 2018
123 PRIEUR (M.), « Les principes généraux
du droit de l'environnement », Centre International du Droit
Comparé de l'Environnement, p. 44
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Le Protocole de Kyoto reste silencieux sur ce sujet. Il ne
prévoit ni la participation publique à l'examen des
données sur les changements climatiques ni la contribution du public aux
débats qui touchent au climat. En aucune manière il n'aborde la
question. Cela démontre une nette volonté d'écarter la
population de l'établissement des stratégies de lutte contre le
réchauffement planétaire. Plus grave, l'allure du Protocole
semble vomir l'idée de discuter les stratégies établies
par les gouvernants au niveau étatique avec la société
civile. L'Accord de Paris admet, dans son article 12 et dans la décision
1/COP 21 en son paragraphe 84, que les Parties promeuvent la participation du
public. Cette participation ne peut être effective que s'il y a
possibilité de débattre librement sur les questions
environnementales. Elle ne concerne plus l'administré en tant qu'atteint
dans ses droits propres, mais le citoyen en tant que garant et protecteur d'une
valeur collective supérieure124. La participation devient
réellement un instrument au service de l'intérêt
général faisant de l'administré un citoyen actif. Cela
peut consister à construire les stratégies et essayer de mieux
les adapter aux situations locales particulières. La concertation et la
participation du public, dans le cadre de l'Accord, doivent se faire le plus en
amont possible.
Au niveau national, cela signifie que chaque personne doit
avoir la possibilité de participer au processus
décisionnel125. On sait déjà que la
société civile comprend aussi bien les individus que les
associations et ONG. Ces dernières sont représentatives des
différentes catégories sociales. Les pouvoirs publics ne
sauraient les écarter du processus de décision, tant l'expertise
qu'elles apportent est riche et l'image qu'elles véhiculent
positive126. Et la matière environnementale ne fait pas
l'exception. D'un côté, elles disposent de ressources et de
données d'une qualité précieuse. Ainsi, elles sont bien
outillées pour participer au processus décisionnel.
En effet, la participation des ignorants est un
alibi127. L'implication des ONG vient pallier les carences que
peuvent révéler les actions individuelles non-coordonnées.
Elles peuvent servir de courroie de transmission des informations. Les enjeux
de la participation du public sont d'améliorer la qualité et
l'acceptabilité des décisions128. La
société civile peut faire part de son expertise au niveau
international sans gâcher toutefois le caractère gouvernemental
des débats.
124PRIEUR (M.), « Le droit à
l'environnement et les citoyens : la participation », Revue juridique
de l'environnement, n°4, 1998, p. 403
125 LEME MACHADO (P.A.), Mondialisation et droit de
l'environnement, p. 23
126 DESFORGES (D.), LEBEL (D.), « Les ONG de défense
de l'environnement », Regards croisés sur l'économie, vol.
2, n°6, 2009, p. 1
127 MONEDAIRE (B.), « La décision publique en
matière d'environnement », Les Transformations de la
régulation juridique, Paris, RED, 1998
128 MAKOWIAK (J.), « La participation de la
société civile au développement durable », Revue
juridique de l'environnement, n°4, 2012, p. 621
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Quelles soient activistes ou collaboratives, les ONG mettent
en lumière certaines défaillances du système
environnemental. Elles ont un rôle officieux important129.
Elles disposent le plus souvent d'une expertise affûtée que la
plupart des États ne possèdent pas. Elles savent, grâce aux
études approfondies qu'elles mènent, discerner les zones d'ombres
et proposer aux gouvernants des solutions idoines. Le fait que l'Accord
concède une place de choix à la société civile est
d'une modernité et d'un réalisme criard. Grâce à
l'Accord, elle est au-devant de la scène. Libres de mener leurs
investigations, les ONG sont à même de discuter en profondeur les
plans que souhaitent mettre en place les gouvernants. Leur impartialité
est un autre facteur qui joue en leur faveur. De cette manière, on peut
imaginer que la participation de la société civile favorisera
l'augmentation de l'intérêt général pour les
politiques environnementales130. Les individus les plus
isolés n'ont pas la facilité d'être écoutés
par les gouvernants et les entreprises. C'est pourquoi la participation des
associations et ONG qu'annonce l'Accord se présente comme un grand bond
en avant. Il est impérieux de préciser que celles-ci ne sont pas
concurrentes du système exécutif mais interviennent de
façon complémentaire en donnant leur contribution. À
l'issue des débats, les antagonistes trouveront probablement des
terrains d'entente.
Cette intégration de la société civile
dans les objectifs de l'Accord est essentielle pour la meilleure application
des décisions. À côté de la société
civile, l'Accord met en avant le rôle des acteurs du secteur
privé.
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