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L'accord de Paris dans l'enjeu climatique


par Assiri A. Ephraïm OBROU
Université Catholique de l'Afrique de l'ouest- Unité Universitaire à Abidjan (UCAO-UUA) - Master en droit public 2019
  

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A- Un financement global massif

Le volet financier est omniprésent dans les défis mondiaux et le domaine de l'environnement ne fait pas l'exception.

Le mécanisme financier posé par la CCNUCC trouve un retentissement dans les articles du Protocole de Kyoto et de l'Accord de Paris tout en variant. Le Protocole de Kyoto ne fait pas

80 Art. 4 § 3, Accord de Paris

81 « Le principe selon lequel la protection de l'environnement ne peut faire l'objet que d'une amélioration constante, compte tenu des connaissances scientifiques et techniques du moment », DUTHEILLET DE LAMOTHE (L.), « Principe de non-régression », Revue juridique de l'environnement, vol. 43 n° 1, 2018

82 Art. 4 § 5 Accord de Paris

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de commentaire sur la hauteur des financements sollicités des pays développés. Il se cantonne à annoncer que ceux-ci apporteront leur soutien financier aux fins d'accomplissement des objectifs du Protocole par voie bilatérale, régionale ou multilatérale83. Le Protocole reprend par endroit les mécanismes de la CCNUCC relatifs au financement. Il indique des montants attribuables à chacune des Parties en cas de besoin, mais ne donne pas de plancher minimum du financement global présumé assurer le fonctionnement dudit mécanisme.

L'Accord de Paris se montre relativement explicite sur cette matière. En effet, l'Accord met en évidence le plancher du financement requis des pays développés et qui s'attachera au fonds prévu pour la mise en oeuvre des objectifs de l'Accord. Il fixe le montant des financements demandés à un plancher de 100 milliards de dollars par an84. Cette somme relativement colossale peut se justifier en raison du caractère incommensurable et urgent des problèmes liés à la montée des températures. Grâce au cadre de transparence établi, l'Accord permet de savoir si les pays développés de qui le financement est demandé ont effectivement apporté leur pierre à l'édifice. Entre autres, il va faciliter l'inventaire des sommes octroyées aux pays en développement. En définitive, ce mécanisme servira de base pour l'attribution du financement aux pays en développement. L'accent est plus mis sur les pays développés car ils disposent de moyens suffisants comparés aux pays en voie de développement.

S'agissant du caractère du financement, une distinction démarque le Protocole de Kyoto de l'Accord de Paris. Le premier, c'est-à-dire le Protocole de Kyoto, ne précise pas si les financements doivent être constants ou évoluer avec le temps. En l'absence de plus d'informations, on peut aisément croire que les financements exigés des Parties doivent se situer dans la constance. A ce niveau, une avancée est à relever dans l'architecture financière que propose l'Accord de Paris. Comme précédemment relevé, les pays développés aussi bien Parties au Protocole que ceux Parties à l'Accord sont censés financer durablement la lutte et l'adaptation au changement climatique des pays en voie de développement85. Malgré tout, l'Accord se montre plus percutant. En effet, il marque le caractère croissant du financement. Ainsi, la mobilisation de moyens financiers devrait représenter une progression par rapport aux efforts antérieurs86. Le fonds de 100 milliards de dollars est donc appelé à être revu à la hausse dans le but d'aider les pays en développement Parties à réduire leurs émissions de gaz

83 Art. 11 § 3 Protocole de Kyoto

84 § 54 de la Décision 1/COP 21, 12 décembre 2015

85 « La COP 21 sur le climat : définition, enjeux et résumé », Agence Parisienne du Climat http://www.apc-paris.com/

86 Art. 9 § 3 Accord de Paris

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à effet de serre ainsi qu'à s'adapter et à accroître leur résilience aux évolutions du climat87. Cette précision n'est pas faite dans le Protocole de Kyoto ce qui laisse croire que les financements sont statiques. Il est important de noter que le plancher fixé à 100 milliards de dollars est annuel. Le coût de l'adaptation englobe, dans l'Accord, celui des projets de développement intégrant des fonctions préventives face à de potentiels risques climatiques élevés. Un fonds pour l'adaptation créé par le Protocole de Kyoto est établi pour financer des programmes concrets88. Contrairement à celui-ci, l'Accord de Paris prend en compte, dans le financement, le coût de l'adaptation et de l'atténuation. La principale difficulté ne réside pas dans le coût global de l'action mais consiste à trouver un mode de répartition efficace et équitable de ce coût89.

Aussi, là où le Protocole de Kyoto demande aux Parties développées de fournir des ressources financières nouvelles et additionnelles90, l'Accord impose à ses Parties d'accroître les ressources qu'elles allouent. Il indique que l'effort financier est à pérenniser, il doit augmenter dans la durée91. La finance doit être en phase avec le long terme92. Cela requiert donc des pays Parties de ne pas atrophier leurs contributions financières. C'est pour s'assurer de l'effectivité de cette obligation qu'il est mis en place un jeu de transparence au sein de l'Accord de Paris. Les pays développés sont ainsi tenus de communiquer les informations cohérentes et transparentes relatives à l'appui financier qu'ils ont fourni et qu'ils fournissent. Capables d'élaborer des stratégies sur le long terme, les pays développés sont ceux-là qui peuvent soutenir et permettre à l'humanité d'arriver à résorber les catastrophes liées au réchauffement planétaire. Les pays en développement ont eux aussi le devoir de faire parvenir les renseignements pertinents sur l'appui qu'ils ont reçu.

B- Un fonds principalement alimenté par les pays développés Parties

87 AUVERLOT (D.), « L'Accord de Paris : un accord Bottom-up universel qui doit être traduit dans les actes », 18 décembre 2015,

http://www.strategie.gouv.fr/point-de-vue/laccord-de-paris-un-accord-bottom-universel-etre-traduit-actes/

88 Le fonds pour l'adaptation relevant du Protocole de Kyoto, Annexe I, Conférence de Bonn, 2001

89 DE PERTHUIS (C.), « Et pour quelques degrés de plus...Nos choix économiques face au risque climatique », Pearson Education France, Paris, 306p, 2009, p. 203

90 Art. 11 § 2 al. a) Protocole de Kyoto

91 HAINAUT (A.), LEDEZ (M.), PERRIER (Q), et al., « Relance : comment financer l'action climat », I4CE, Paris, juillet 2020

92 CHENET (H.), ZAMARIOLI (L.), WINNING (M.), « Finance after the Paris agreement: the necessary transformation of the financial system », Policy Brief, IDDRI, Janvier 2020, p. 8

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Le financement obtenu de la part des Parties est essentiel pour l'accomplissement des stratégies de lutte contre le réchauffement climatique. Il suppose que chaque Partie intervienne à part égale.

Cette direction est suivie par le Protocole de Kyoto. Il y est exposé que les pays développés Parties et les autres Parties développées figurant à l'Annexe II de la Convention fournissent des ressources financières nouvelles et additionnels afin de couvrir la totalité des coûts convenus par les pays en développement93. Une remarque s'impose. Le Protocole laisse peser le financement sur les seules épaules des pays développés Parties. Ceux-ci sont placés à l'avant-garde du financement. Le Protocole de Kyoto ne s'appesantit sur les pays en voie de développement qu'en tant que destinataires du financement mobilisé par les Parties développées. Les pays en voie de développement ne sont considérés que comme des receveurs de financement comme le présente si bien l'article 11 § 2 al. b) du Protocole de Kyoto. Une différence notable est à marquer entre le Protocole de Kyoto et l'Accord de Paris tous deux placés sous l'égide de la CCNUCC. À la différence du Protocole de Kyoto qui exclut les pays en développement du champ des finances les condamnant à uniquement recevoir, l'Accord de Paris, lui, n'oublie pas les pays en développement. Il reconnaît leur participation au mécanisme financier.

Si l'Accord somme les pays développés de fournir des ressources financières aux pays en développement, il incite également les pays en voie de développement à participer à ce transfert de ressources94. Il ne s'agit que d'une invitation et pourtant elle constitue une innovation. Celle-ci est cependant moindre étant donné les difficultés économiques qui les gangrènent. L'Accord ne dit pas autre chose dans ses lignes quand il avance que les autres Parties sont invitées à fournir ou à continuer de fournir ce type d'appui à titre volontaire95. Ces contributions, il faut y revenir, sont purement volontaires et ne sont pas à négliger. L'Accord, en ne fixant pas la hauteur de cette participation, reconnaît la fragilité des pays en développement Parties. Il rechigne ainsi à leur imposer un quota précis à la différence des pays développés Parties dont les sommes attendues doivent s'exprimer en chiffres absolus. Cela pour faire ressortir que l'appui financier des autres Parties s'effectue de façon spontanée ce qui se présente comme un paramètre positif pour l'application du mécanisme financier. Le cadre ainsi posé est supposé responsabiliser les pays développés Parties pour qu'ils alimentent les stratégies des pays en

93 Art. 11 § 2 al. a) Protocole de Kyoto

94 LASSUS St-GENIES (G.), « L'Accord de Paris sur le climat : quelques éléments de décryptage », Revue québécoise de droit international, 2015, p. 47

95 Art. § 2 Accord de Paris

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développement afin de tacler les effets du changement climatique. Cela sans pour autant négliger l'éventuelle participation financière des pays en développement. L'assimilation des pays en développement Parties au mécanisme financier de l'Accord est un indice qui marque le souci de fédération des efforts de toutes les Parties proportionnellement à leurs différentes capacités nationales. Tout ceci vise à la concrétisation des mesures relatives à la riposte climatique.

S'agissant de la destination des financements, il faut dire que ce volet est largement abordé par le Protocole de Kyoto. Il souligne le fait que les pays développés Parties fournissent les ressources financières dont les pays en développement Parties ont besoin pour couvrir la totalité des coûts supplémentaires pour progresser dans l'exécution des engagements96. Le mécanisme financier qu'il s'évertue à décrire prend en considération les pays en développement Parties dans leur globalité. Il les met tous sur la même ligne. Pourtant, au sein même des pays en développement, il existe différentes sous-catégories d'Etats en développement. Ceux-ci n'ont en fait pas des capacités égales. L'Accord de Paris vient pallier cette confusion. Tout comme le Protocole de Kyoto, l'Accord énonce clairement que les pays développés Parties apportent une aide financière pour permettre aux pays en développement de s'adapter aux effets du changement climatique97. Mais, il signifiera que la fourniture des ressources financières devrait viser les pays en développement notamment ceux qui sont particulièrement vulnérables comme les pays les moins avancés et les petits États insulaires en développement98. Afin de s'assurer de l'effectivité d'une telle mesure, l'Accord recommande aux pays en développement destinataire des financements d'effectuer des inventaires des fonds effectivement reçus. Le système économique des pays développés bien enraciné n'est pas assimilable à celui des pays en développement. L'on peut aisément comprendre pourquoi est-ce que l'Accord les place au centre des contributions financières. La prépondérance de leur rôle est ici marquée. Ils sont ainsi appelés à montrer la voie en mobilisant des moyens de financement de l'action climatique99.

On peut distinguer relativement que l'Accord pose un cadre dont les strates sont aussi étonnantes que percutantes comparées à celles précédemment établies dans certaines

96 Art. 11 § 2 al. b) Protocole de Kyoto

97 LANG (G.), COP 21 : Les principaux points de l'Accord sur le Climat, 12 décembre 2015 http://www.RTL.fr/

98 Art. 9 § 4 Accord de Paris

99 Art. 9 § 3, Accord de Paris

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conventions sur l'environnement. Au travers de quelques articles, il met clairement en exergue le caractère proportionnel des actions des Parties à la différence du Protocole de Kyoto, de la Convention de Vienne et du Protocole de Montréal. La considération qu'il porte aux pays en développement Parties est un élément nouveau qui ne manque pas de susciter l'intérêt. Cela maintenant précisé, il va encore plus loin en invitant les Etats à intégrer des acteurs en dehors d'eux à participer au combat climatique.

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"Aux âmes bien nées, la valeur n'attend point le nombre des années"   Corneille