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L'accord de Paris dans l'enjeu climatique


par Assiri A. Ephraïm OBROU
Université Catholique de l'Afrique de l'ouest- Unité Universitaire à Abidjan (UCAO-UUA) - Master en droit public 2019
  

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Section 2 : Un mécanisme de financement partiellement

éclairé

Le caractère stratégique du mécanisme de financement est indéniable pour l'accomplissement des ambitions de l'Accord. Malgré les importantes innovations du système financier que ce dernier prévoit, certaines zones obscures se profilent. Lorsqu'on s'immerge un peu plus dans le mécanisme financier de l'Accord, on découvre qu'il est quelque peu mal éclairé et ce pour plusieurs raisons. Cette défaillance se repère aussi bien dans l'absence de conditionnalités du financement (Paragraphe 1) que dans l'imprécision de la teneur du financement (Paragraphe 2).

Paragraphe 1 : L'absence de conditionnalités du financement

L'Accord de Paris n'aborde pas avec franchise les critères qui entourent le financement qu'il prévoit accorder aux Parties qui en ont besoin. Son analyse révèle l'absence de conditionnalités du financement qui se repère à deux niveaux dont celui d'un éventail de bénéficiaires difficilement saisissable (A), et celui d'une utilisation des fonds peu circonscrite (B).

A- Un éventail de bénéficiaires difficilement saisissable

177 Art. 4 § 9 Accord de Paris

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Le financement constitue une partie capitale dans la majorité des conventions environnementales. La détermination exacte de son volume est immanquable pour l'accomplissement des objectifs fixés. Ainsi, le mécanisme qui l'entoure se doit d'être précis. Comment bénéficier du financement ? Voici la question qui se pose lorsqu'il s'agit de mécanisme de financements dont la finalité est de faciliter la lutte contre le réchauffement climatique.

À certaines conditions et sous certaines réserves, l'institution d'instruments économiques peut aussi être un moyen d'assurer un contrôle, une évaluation et surtout un suivi178. Cependant, l'Accord ne soumet pas le financement à de quelconques conditions ce qui n'est pas sans susciter l'inquiétude. En effet, en partant sur cette base, n'importe quel pays en développement peut recevoir le financement de façon répétitive sans qu'un suivi ne lui soit imposé. Une allocation des financements est considérée comme équitable si elle distribue les ressources selon une procédure juste en tenant compte d'une condition donnée ; par opposition, une allocation des ressources financières visant une stricte logique d'efficience aboutirait à donner la priorité aux pays dans lesquels les bénéfices nets attendus des actions sont les plus grands179. Au vu de ces deux critères, on dira que l'Accord fonde l'octroi des financements sur l'équité mais une équité mal définie. L'équité à laquelle il fait référence n'est pas clarifiée dans son article 9 qui porte sur le financement. Aussi, il rajoute que c'est à la lumière de la situation des pays en développement que le financement sera attribué. Pourtant, l'Accord ne se donne pas pour mission d'énumérer quelques situations susceptibles de déclencher le mécanisme de financement.

Il n'y a pas d'indicateur formel qui puisse servir de base à l'allocation des ressources qui sont dédiées à la lutte contre le réchauffement climatique, plus précisément aux fins du renforcement des capacités, de l'adaptation et de l'atténuation. On ne sait donc pas sur quelle base le mécanisme financier va s'appuyer pour attribuer les financements aux Parties qui feraient appel à lui. En l'absence de critères d'attribution du financement, l'on est en mesure de s'interroger sur l'efficacité dudit mécanisme établi par l'Accord. En plus de cela, il ne dit pas expressément qui sera en charge de vérifier la situation des pays en développement. S'agit-il des experts du mécanisme du financement ou s'agit-il d'une autorité affectée uniquement à

178 ROMI (R.), « Les mécanismes juridiques de contrôle et de suivi des mesures environnementales en droit comparé », Vers un nouveau droit de l'environnement ? Centre International de Droit Comparé de l'Environnement, p. 218

179 WEIKMANS (R.), « Dimensions éthiques de l'allocation du financement international de l'adaptation au changement climatique », Vertigo, Vol. 16 n°2, septembre 2016, p. 2

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cette mission ? Aucune réponse n'apparaît dans l'Accord ce qui laisse entendre que la disposition est lacunaire.

L'Accord de Paris, faut-il le rappeler, est un protocole additionnel à la Convention-cadre des Nations-Unies sur les changements climatiques (CCNUCC). Il lui emprunte donc l'essentiel des définitions de termes clés. C'est en ce sens que son préambule renvoie à la CCNUCC en la matière : « Reconnaissant aussi les besoins spécifiques et la situation particulière des pays en développement Parties, surtout de ceux qui sont particulièrement vulnérables aux effets néfastes des changements climatiques, comme le prévoit la Convention ». Ainsi, l'Accord fait plusieurs fois référence aux pays en développement qui sont particulièrement vulnérables aux changements climatiques180. Ces éléments se retrouvent avec facilité dans le texte de la CCNUCC, notamment dans son article 4. La CCNUCC considère comme particulièrement vulnérables les pays suivants : « a) les petits Etats insulaires ,
· b) les pays ayant des zones côtières de faible élévation ,
· e) les petits pays ayant des zones sujettes à la sécheresse et à la désertification ,
· f) les pays ayant des zones de forte pollution de l'atmosphère urbaine ,
· h) les pays dont l'économie est fortement tributaire soit des revenus de la production, de la transformation et de l'exportation de combustibles fossiles et de produits apparentés à forte intensité énergétique, soit de la consommation desdits combustibles et produits ,
· i) les pays sans littoral et les pays de transit
»181. Comme on peut l'observer, presque tous les pays du monde rentrent d'une façon ou d'une autre dans cette catégorisation. La Convention-cadre ne donne pas de définition opérationnelle de la notion de pays « particulièrement vulnérables » et l'Accord de Paris reprend à son compte ce défaut.

Le financement vert tant décrit par les dispositions de l'Accord semble être mis en péril par le manque de précision des critères devant être remplis par les éventuels bénéficiaires.

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