B- Le rehaussement imprécis des ambitions avant le
bilan
Le dépôt des contributions
déterminées au niveau national est essentiel à la
préparation du bilan mondial. Cela peut se justifier car elles sont
réputées présenter des politiques et mesures climatiques
des pays pour réduire aux mieux leurs émissions de gaz à
effet de serre et s'adapter au changement climatique.
L'Accord ne prémunit pas contre
l'éventualité dans laquelle une Partie pourrait avancer sa
contribution. Au contraire, il adopte une posture aux premiers abords
intéressante. Dans cet élan, une Partie, qu'elle soit
développée ou en développement, peut amener ses
contributions nationales à tout moment165.
Toutefois, après analyse, on s'aperçoit du danger que cette
attitude représente. En effet, déjà engagée sur une
lancée une Partie peut, sur la base de l'Accord, rehausser ses
engagements au titre des contributions. La difficulté est que ce
rehaussement n'est pas clairement déterminé. Or, le bilan mondial
se tient chaque cinq ans et les contributions doivent être amenées
une seule fois au cours de ce laps de temps. Si une Partie peut accroître
ses ambitions à quelques semaines du bilan mondial, pourra-t-elle
véritablement les mettre en oeuvre ? N'y aurait-il pas une discordance
entre l'accroissement de ses engagements et la réalité ? Le fait
qu'aucune limite ne soit expressément donnée par l'Accord jette
dans le plus grand flou. En plus, l'Accord en disant « une Partie peut
modifier »166 laisse entendre que les Parties ont la
possibilité et non l'obligation d'augmenter leurs contributions
déterminées au
164 HELLIO (H.), « Les contributions
déterminées au niveau national, instruments au statut juridique
en devenir », Revue juridique de l'environnement, 2017, pp.
33-48
165 Art. 4 § 11 Accord de Paris
166 Art. 4 § 9 Accord de Paris
54
niveau national avant le bilan. Il y va de leur bon vouloir.
Cette permission de relever leurs contributions déterminées au
niveau national n'est pas strictement encadrée par l'Accord de Paris.
Pourtant, la lutte contre le réchauffement climatique nécessite
des mesures urgentes. Ainsi, le fait que l'Accord n'impose pas aux Parties de
rehausser leurs obligations avant le bilan mondial prévu en son article
14 pose un véritable problème.
Sur un autre palier de l'Accord, on repère des
incohérences. En effet, les Parties après avoir
enregistrées leurs contributions au secrétariat de l'Accord
peuvent en quelque sorte se reposer sur leurs lauriers et attendre patiemment
le bilan quinquennal. Rien ne les engage à enrichir leurs contributions
déterminées au niveau national. L'Accord promeut une
démarche globale des Parties contre le réchauffement climatique.
Ainsi, le fait que l'Accord demande des Parties qu'elles communiquent une seule
fois leurs contributions déterminées au niveau national avant le
bilan mondial est un problème épineux. Ce jeu peut fausser la
comptabilisation des données et les efforts des Parties. Le suivi peut
perdre en efficacité car les informations transmises sur les
contributions nationales courent le risque d'être caduques par rapport
aux difficultés du terrain.
Si l'on jette un oeil furtif aux dispositions du Protocole de
Kyoto, on constate immédiatement que la démarche est
différente voire opposée à celle de l'Accord. Suivant le
Protocole de Kyoto, chacune des Parties visées à l'Annexe I
communique les informations sur les programmes qu'elle a pu établir et
mettre en application. C'est dans ce sens que chacune des Parties fait
figurer dans sa communication nationale les informations nécessaires
pour faire la preuve qu'elle s'acquitte de ses engagements167.
Au nombre de ces communications nationales se comptent les programmes nationaux
pour l'adaptation. Cette communication est requise chaque
année168 des Parties. Il est aisé de
déduire qu'au sein de ces communications l'on doit retrouver les
contributions déterminées au niveau national. Contrairement
à l'Accord de Paris, le Protocole de Kyoto impose un délai
maximum d'une année aux Parties afin que celles-ci puissent remplir
leurs obligations. Cette périodicité plus courte suppose de la
part des Etats Parties des actions promptes et efficaces pour atteindre les
obligations auxquelles ils sont astreints. Les Parties n'ont d'autre option que
de s'activer pour concrétiser leurs projets et en faire part le plus
rapidement possible au secrétariat.
167 Art. 7 § 2 Protocole de Kyoto
168 Art. 7 § 3 Protocole de Kyoto
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Le manquement de l'Accord de Paris est troublant. Il semble
avoir nettement régressé sur ce point pourtant essentiel à
la réalisation des objectifs qu'il s'est fixé.
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