B- La participation financière du secteur
privé
Le secteur privé contient une pluralité
d'acteurs. Cela étant précisé, on peut les regrouper en
deux grandes catégories : les entreprises privées et les
financeurs privés.
147 DESPOUES (V.), GRANGER (F.), et al., «
Se situer dans la transition énergétique : un
impératif pour toutes les entreprises », I4CE, n°53,
Paris, mai 2018
148 JACQUE (M.), « Climat : de grandes entreprises
mondiales s'alignent avec l'Accord de Paris », 05/12/2019,
http://www.lesechos.fr/
149 DESMETTRE (S.), « La lutte contre le
réchauffement climatique et compétitivité »,
Regards croisés sur l'économie, n°6, 2009, pp. 207-208
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Malgré leur relative intégration à la
lutte contre le réchauffement planétaire, le rôle des
financeurs privés est complètement éludé des
précédentes conventions. Face aux faiblesses du financement
public de l'adaptation, les pouvoirs publics n'ont d'autres choix que
d'admettre les contributions des entités privées150.
Le Protocole de Kyoto, malheureusement, s'y oppose. En effet, bien vrai que le
Protocole de Kyoto reconnaisse la participation des entités
privées au mécanisme de développement propre, ils ne les
autorisent seulement pas à financer les programmes d'adaptation des
Parties. Il ne retient que le volet technique de ce concours. Le Protocole de
Montréal et la Convention de Vienne, avant lui, n'ont eux aussi pas
étudié ce pan.
A travers leur offre dédiée de solutions
financières et techniques, les banques multilatérales de
développement jouent un rôle clé dans le soutien à
la résilience climatique151. Leur expérience montre
que le secteur privé peut aussi contribuer au financement de
l'adaptation climatique. L'Accord approuve expressément l'appui
financier du secteur privé152 contrairement à la
Convention de Vienne et au Protocole de Kyoto. Car les financeurs privés
sont ceux-là qui peuvent fournir aux entreprises privées un
financement direct pour les mesures d'adaptation et peuvent appuyer les
interventions gouvernementales par le biais de partenariat153.
S'agissant de la Convention de Vienne, il est utile de
spécifier qu'elle ne souffle pas mot sur l'éventuelle
participation des entreprises privées au financement des
activités et programmes visant à parer au réchauffement
climatique. Celle-ci se borne à n'apporter que les informations sur les
émissions, l'état de la couche d'ozone, les modifications et
leurs impacts sur la santé humaine, l'environnement et le climat. Le
même son de cloche retentit dans le Protocole de Kyoto. Il ne fait
mention que de l'instauration d'un environnement porteur pour le secteur
privé afin de faciliter et de renforcer l'accès aux technologies
écologiquement rationnelles ainsi que leur transfert154.
En d'autres termes, le rôle des acteurs privés dans la lutte
contre le réchauffement climatique est restreint à l'accès
et au transfert des technologies. Certaines entités
spécialisées dans la recherche sont intégrées dans
une certaine mesure dans la lutte contre le réchauffement climatique,
suivant le Protocole de Kyoto. Il s'agit par exemple des laboratoires de
recherches scientifiques. Leur apport est purement technique, ils ne vont
pas
150 SURMINSKI, SWENJA, et al., Flood insurance
schemes and climate adaptation in developing countries, International
Journal of Disaster Risk Reduction, 2013, pp. 154-164
151 KLINGEL (F.), DAVIES (C.), « L'adaptation au
changement climatique, une opportunité pour le secteur privé
», Secteur privé et développement, 12 novembre
2015, p. 1
152 § 55 Décision 1/COP21 décembre 2015 de
l'Accord de Paris
153 CRAWFORD (A.), CHURCH (C.) « Impliquer le secteur
privé dans les processus nationaux de planification de l'adaptation
», Institut International de Développement Durable
(IISD), 2019, p. 7
154 Art. 10 C) Protocole de Kyoto
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au-delà, ils ne prennent donc pas part au financement
d'activités ou de programmes de lutte contre la hausse des
températures. Pourtant, la mise en oeuvre de certaines actions
d'adaptation décidées par les autorités publiques à
travers la participation financière du secteur privé assortie
d'instruments économiques adéquats155 n'est pas
négligeable pour parvenir à maintenir les températures
sous le seuil acceptable. Dans le Protocole de Kyoto, les Parties sont
exclusivement concernées par le mécanisme financier.
Comme précédemment relevé dans la
décision de l'Accord de Paris, les Parties reconnaissent nettement la
possibilité pour le secteur privé de participer
financièrement à la mise en oeuvre de l'Accord. Leurs apports
peuvent être affectés aux fins des objectifs d'atténuation
et d'adaptation. Les entreprises, qu'ils s'agissent de celles qui se situent
sur le territoire d'un pays développé ou en développement,
peuvent accroître leur financement à l'endroit de l'État en
visant des domaines favorables à la résilience en carbone. On le
sait, les entreprises multinationales disposent de capitaux importants capables
d'arrimer des projets des plus complexes. Elles peuvent ainsi, par le biais de
l'Accord, collaborer volontairement avec les acteurs étatiques en vue
d'améliorer la lutte contre le réchauffement
climatique156. Ce partenariat nouveau que prévoit l'Accord de
Paris varie de l'aménagement des précédentes conventions
et est précieux pour atteindre les objectifs fixés.
On retiendra partiellement que l'Accord de Paris suit une
direction similaire comparée à celle des
précédentes conventions car il se prononce sur la majorité
des grandes thématiques abordées par celles-ci. Cependant,
l'Accord porte un regard neuf sur ces matières et introduit dans le
même temps de nouveaux mécanismes. Il comporte des innovations
importantes et les domaines dans lesquels interviennent celles-ci redynamisent
la lutte globale contre le réchauffement climatique. Du caractère
proportionnel des actions des Etats Parties à la collaboration des
acteurs non étatiques, l'Accord de Paris vient renouveler la posture que
les précédentes conventions avaient adopté. Malgré
tout, la belle peinture que présente l'Accord de Paris comporte des
ombres impressionnantes. Les insuffisances que nous relèverons viennent
grandement contrebalancer ses étonnantes innovations.
155 AGRAWALA (S.), FANKHAUSER (S.), Aspects
économiques de l'adaptation au changement climatique, coûts,
bénéfices et instruments économiques, Paris, juillet
2008, 153 p.
156 FEDLER (L.), Les engagements des entreprises dans la COP
21, 24 février 2019, http://www.UE.delegfrance.org/
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