B- Un partenariat sous la coupole des États
Parties
La collaboration entre les gouvernements et les acteurs du
secteur privé suppose des modalités spécifiques. En outre,
celle-ci implique un encadrement précis évitant tout
débordement susceptible de nuire aux objectifs recherchés. Dans
le cadre des conventions qui portent sur le climat, la démarche s'est
révélée par moment saccadée.
Fort heureusement, l'on trouve réponse favorable dans
l'Accord de Paris et différente de celles annoncées par les
conventions précédentes. Il s'agit d'un partenariat nouveau entre
Etat et acteurs privés. L'Accord incite les Parties à
promouvoir la participation à l'atténuation des gaz à
effet de serre d'entités privées
autorisées137. Les termes de cette disposition laissent
entendre que l'implication des acteurs privés est beaucoup plus
importante. Cela signifie que les acteurs privés sont placés au
coeur des thématiques climatiques et qu'ils sont capables d'agir de
manière décisive sur les changements climatiques. Les actions
qu'ils auront à mener doivent avoir pour finalité de parvenir
à l'atténuation des gaz à effet de serre émis sur
le territoire de l'Etat Partie en cause. L'établissement de politique de
réduction de gaz à effet de serre par les acteurs privés
suppose un accord préalable avec la vision générale de
celle conçue par l'Etat Partie sur lequel ils se trouvent.
A ce niveau, une autre nouveauté émerge. En
effet, il est relevable qu'en dépit de tout, les entités
privées susceptibles de collaborer avec une Partie à l'Accord ne
le sont pas d'office. Elles doivent, avant de se lancer dans le
développement de politique de limitation des émissions de
CO2, recevoir une autorisation de la Partie en question. Cette
autorisation vise à contrôler les stratégies des
entités privées par rapport à la vision des gouvernements.
Cette formalité est nécessaire pour éviter une cacophonie
entre la démarche entreprise par le secteur privé et
137 Art. 6 § 4 al. b) Accord de Paris
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l'approche beaucoup plus générale du secteur
public. La coordination entre les deux est la principale cible que l'Accord met
en exergue. Aussi, le partenariat tel qu'envisagé par l'Accord suppose
que l'Etat Partie reste maître dans le choix de ses collaborateurs. C'est
ce qui ressort de l'article 6 paragraphe 4 de l'Accord de Paris. Ainsi,
lorsqu'un État Partie à l'Accord décide de collaborer avec
une entité privée, les modalités du champ d'action seront
obligatoirement tracées par le premier. Il choisira ainsi le secteur, la
contribution qu'il attend de l'entreprise et certainement le délai de
l'accomplissement de sa mission. Aucune obligation n'est faite à l'Etat
de collaborer avec une quelconque entreprise privée. Chaque Etat Partie
est libre de collaborer avec toute entité privée de son choix aux
fins d'accroître ses capacités de résilience au
réchauffement climatique.
Ce chemin nouveau est quasiment opposé à celui
suivi antérieurement par le Protocole de Kyoto. En effet, ce dernier
oblige les Etats Parties et les entités privées qui souhaitent
collaborer à passer par une autorité conventionnelle. Il s'agit
du conseil exécutif du mécanisme pour un développement
propre138. La participation est soumise aux directives qui
peuvent être données par ledit conseil139. L'aval
du conseil exécutif est ici nécessaire pour que puissent se
réaliser véritablement les objectifs du mécanisme
à savoir aider les Parties visées à l'Annexe I à
remplir leurs engagements chiffrés de limitation et de réduction
de leurs émissions prévues à l'article
3140. Les Parties n'ont pas la latitude de décider des
entités avec lesquelles elles souhaitent s'associer pour accoster les
objectifs chiffrés qui leurs sont imposés. Les complications
sont, dans ce cas spécifique, plus grandes. Car l'autorité, qui a
le dernier mot et donc qui peut tolérer cette coopération,
échappe totalement au contrôle des Parties. Le conseil
exécutif du mécanisme pour un développement propre
empiète sensiblement sur leur mobilité. Les Etats Parties sont,
en quelque sorte, contraints de s'aligner sur le choix des entités
privées qui est opéré par ledit conseil. Rajoutons que le
Protocole de Kyoto limite la coopération entre un État Partie et
une entité privée au seul domaine du mécanisme de
développement propre ce qui n'est pas le cas dans l'Accord de Paris.
138 « Il a deux objectifs aider les pays non visés
à l'Annexe I à parvenir à un développement durable
et à contribuer à l'objectif ultime de la Convention, et aider
les Parties visées à l'Annexe I à remplir leurs
engagements chiffrés de limitation et de réduction »,
Troisième rapport de synthèse du Groupe d'experts
intergouvernementale sur les changements climatiques (GIEC), 2001, p. 185
139 Art. 12 § 9 Protocole de Kyoto
140 Art. 12 § 2 Protocole de Kyoto
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Suivant le Protocole de Kyoto, leur collaboration a pour
principale finalité de permettre l'acquisition d'unités de
réduction d'émissions141 par les Parties. L'Accord
n'opère pas une telle différence ce qui laisse entendre que les
Parties et les entités privées sont libres de déterminer
la sphère de leurs engagements communs pourvue que celle-ci vise
à gagner les objectifs d'atténuation et d'adaptation. Ici encore,
l'Accord de Paris aborde une dimension singulière de la lutte contre le
réchauffement climatique.
L'implication des acteurs du secteur privé dans le
processus de planification de programmes nationaux d'adaptation et
d'atténuation que l'Accord propose, peut permettre d'aligner sur le
moyen et long terme le travail de ceux-ci aux stratégies
étatiques.
Paragraphe 2 : L'implication dans la mise en oeuvre des
stratégies
La mise en oeuvre se perçoit à deux niveaux
spécifiques de l'Accord de Paris. Il est question du renforcement des
capacités (A) et de la participation financière
des entités privées (B).
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