Observation du comportement en séance et en classe :
Quatre séances se sont déroulées sans la
présence de Naïsha. Elle venait en séance logopédique
en fredonnant la comptine du moment, et avec plaisir, certainement parce
qu'elle se sentait écoutée. Sa timidité s'est
atténuée au fur et à mesure. La séance
s'amorçait avec son désir de nous conter un
événement qui l'avait marquée. Elle s'exprimait avec une
syntaxe déstructurée faite de mots-clés. Elle a pris
confiance elle, et le risque de commettre une erreur verbale de l'effrayait
plus. Sa curiosité l'amenait à s'intéresser
d'emblée à la nouvelle comptine proposée, ainsi qu'aux
illustrations/photos. L'instant de ukulélé animé par
Dilahan dévoilait les talents de danseuse de Naïsha : un rituel de
début de séance s'est installé. Au début
régnait une complicité flagrante avec sa camarade, mais les
querelles finales l'ont emportée et l'atmosphère s'est
dégradée au profit des discordes. L'atelier « comptine
» paraissait adéquat pour Naïsha, Une belle évolution
ressort également.
Comparaison prétest/postest :
Observation du comportement en séance et en classe :
Ansarollah n'a jamais été absent, est
était excité et motivé à l'idée de venir
jouer. Il a également eu droit à des séances
privilégiées, où, beaucoup moins influencé par les
comportements de son copain, il était plus attentif et participatif. Il
répétait le mot en français dès que j'en
énonçais, et s'essayait à faire des phrases de temps en
temps. Compétiteur et absorbé par le jeu, il en oubliait le tour
de paroles. Il s'exprimait énormément, verbalement comme
corporellement. Le « code- switching » était
particulièrement présent chez lui.
Actuellement, Ansarollah s'est intégré et
s'entend avec la majeure partie de la classe. Il ne craint plus d'aller vers
les autres et aime le contact social. Régulièrement, j'ai pu
observer qu'il réalisait des transferts puisqu'il me demandait de faire
le « jeu du docteur », le « jeu des statues » (alors que je
n'ai prononcé ces mots à de rares occasions) et s'amusait
à regarder et oraliser les diverses émotions de ses camarades
lors de la collation (exemple : « Rafael est dégoûté,
il n'aime pas »). Sur le plan lexical, il a nettement progressé. La
syntaxe se met doucement en place. On peut dire que l'atelier « bain de
langage » lui fut véritablement profitable.
Au cours de ces 20 séances, j'ai pu apercevoir une
évolution globale des enfants. En revanche, l'apparition d'une
variabilité interindividuelle pourrait s'expliquer notamment par
l'intérêt, la motivation, et la personnalité de chacun.
Cette expérience me permet d'affirmer que ces facteurs jouent un
rôle déterminant dans une telle prise en charge.
Concernant les filles, toutes les deux se sont ouvertes
à moi, ainsi qu'aux autres élèves de la classe.
Désormais, aucune ne reste dans son coin. Lors des dernières
séances plus particulièrement, elles se mettaient à
essayer de me conter leurs activités de la veille, tentaient de me
confier leurs états d'âme. La syntaxe ne se construisait pas
convenablement, mais elles parvenaient à énoncer des mots
clés que nous n'avions pas forcément vus ensemble. J'ai pu
m'apercevoir que l'apprentissage de la comptine dans son
entièreté était impossible. Le vocabulaire retenu
résidait essentiellement dans les mots
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travaillés, et ceux situés en fin de vers. J'ai
pu également constater que les rimes apportaient une aide
considérable en matière de restitution de mots. Cet «
éveil » au langage musical et verbal semblait adapté
à leur tempérament.
Quant aux garçons, malgré une forte
timidité ambiante au départ, Ansarollah s'est montré
beaucoup plus réceptif que son camarade tout au long de l'aventure. Il
participait de bon coeur se livrant à l'apprentissage par essais et
erreurs, tandis que Necati au tempérament plus réservé,
réticent, méfiant et distrait préférait rester en
retrait. L'indifférence de ce dernier l'a conduit à ne produire
que très peu de mots en séance, et la faible progression s'en
ressent. Il m'est impossible de partager un avis sur la syntaxe, puisqu'il ne
s'est jamais essayé à la combinaison de plusieurs mots. En
revanche, Ansarollah créait, au fur et à mesure, ses propres
phrases de plus en plus étoffées en y plaçant
spontanément les vocables travaillés. La méthode de
rééducation classique du langage oral autrement appelée
« bain de langage » n'a malheureusement pu profiter à
l'ensemble du binôme en dépit de son aspect ludique et
diversifié.
Les comptines se sont révélées
être un moyen efficace dans l'apprentissage d'un vocabulaire
donné. Cependant, elles ne surpassent pas l'efficacité du «
bain de langage » dans la matière, mais se contentent de
l'égaler.
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Il est temps d'avoir une