RESUME
Le secteur agricole, notamment vivrier, constitue une
activité génératrice de revenu pour la plupart des paysans
congolais en général et du groupement de Buzi en particulier.
Le manioc fait partie des principales spéculations
cultivées dans le groupement. Sa production s'étale pratiquement
sur toute l'année afin de répondre à la demande locale
mais également pour l'exportation vers les milieux urbains (ville de
Goma et de Bukavu en l'occurrence). Cependant, la chaîne de valeur manioc
est confrontée à des problèmes liés à
l'organisation, la production et la commercialisation.
L'étude a montré que la chaîne de valeur
manioc est constituée principalement de trois maillons pour lequel il
était possible de calculer la rentabilité. Il s'agit notamment du
maillon de production, de transformation, et de la commercialisation.
En tenant compte de destination des produits et produits
dérivés de manioc et des marchés existants, nous avons
défini cinq (5) grandes chaînes de valeurs (CV) : la CV «
manioc frais pour le marché local et la ville de Goma », la CV
« manioc séché -cossette de manioc- pour le marché
local, la ville de Goma et de Bukavu », la CV « farine de manioc pour
le marché local, la ville de Goma et de Bukavu », la CV «
chikwangue pour le marché local » et la CV « foufou de manioc
pour les marchés local.»
Au cours de cette étude, deux (2) types de coûts
ont été analysés. Il s'agit des coûts de production
et les coûts totaux des différentes chaînes de valeurs. En
ce qui concerne les coûts de production, le tableau 3.14 indique que la
CV manioc séché vendu sur les trois marchés -
marché local, de Goma et Bukavu- est celle dont le coût de
production est relativement plus cher, soit 14 441 133 FC. Cela s'expliquait
par le fait que les maniocs séchés et vendu sur les trois
marchés sont produits dans des exploitations de type moins intensif
(généralement moins de 1ha) sur lesquelles on surutilise la
main-d'oeuvre familiale pour le sarclage. On retrouve en seconde position la
C.V farine de manioc avec 10 839 860 FC dont 53,38% des charges globales est
dit à la transformation du produit.
Pour ce qui concerne les coûts totaux, l'analyse des
coûts engendrés par les différentes chaînes de
valeurs, le tableau 3.15 indique que la chaîne produisant la farine de
manioc est la plus coûteuse aussi bien en consommations
intermédiaires (25 337 336 FC) qu'en coûts totaux (26 058 714 FC).
Cela est dû essentiellement aux dépenses relatives à la
transformation. Les chaînes de manioc frais et de manioc
séché pour le marché local se suivent, avec respectivement
1 651 380 FC et 2 246 213 FC et de 14 766 548 FC et 15 357 341 FC en
xv
consommations intermédiaires et coûts totaux par
quantité de manioc produite. Vient en seconde position la chaîne
de valeurs de vente de manioc vers milieu urbain (ville de Goma et de Bukavu)
est celle qui nécessite moins de dépenses de la quantité
de manioc produit, soit 801 385 FC et 1 874 695 FC en consommations
intermédiaires et en coûts totaux. Ce résultat peut
s'expliquer par le fait que les dépenses effectuées pour la
production de manioc pour les marchés urbains sont compensées par
les rendements que l'on n'y obtenus.
Pour ce qui est de l'analyse de la performance des
différentes chaînes de valeurs, le tableau 3.17 montre que toutes
les chaînes de valeurs manioc sont rentables sur le plan financier. En
d'autres termes, la production de manioc est profitable pour le producteur, le
transformateur et le commerçant. En effet, les valeurs ajoutées
et les profits sont positifs pour tous les acteurs dans toutes les
chaînes de valeurs sauf pour la chaîne de valeur de farine de
manioc où la valeur ajoutée et le profit du producteur sont
négatifs. C'est pourquoi, cette rentabilité varie pour chaque
acteur en fonction de la chaîne dans laquelle se situe. Ce dernier
résultat peut s'expliquer au mode d'accès à la terre, aux
conditions d'accès du produit aux marchés - désenclavement
du milieu et tracasseries- mais aussi le moyen de transport utilisé -
personnes - de transformation et commercialisation.
Par ailleurs, la comparaison des différentes
chaînes de valeurs montre que la chaîne de valeur produisant le
manioc séché était la plus rentable au plan financier. Les
producteurs et les commerçants y obtenaient des valeurs ajoutées
et profits les plus élevés. En seconde position la chaîne
de valeur de farine de manioc. Dans cette chaîne de valeur, ce sont les
transformateurs ainsi que les commerçants qui y obtiennent les valeurs
ajoutées et les profits les plus élevés. On retrouve en
troisième position la chaîne de valeurs relative au manioc frais.
La chaîne de valeurs les moins rentables au plan financier sont celles de
foufou puis de chikwangue en valeur ajoutée tout comme en profit.
Lorsqu'on s'intéresse aux ratios de rentabilité
(le tableau 3.17) les conclusions changent. En effet, on remarque qu'avec
l'analyse des ratios, la chaîne de valeur farine devient rentable pour
tous les acteurs. Les commerçants y investissent d'avantages que les
deux autres acteurs car elle leurs procure plus d'avantages financiers. En
effet, un (1) franc congolais investi dans cette chaîne
génère trois 15,928 FC de valeur ajoutée pour les
commerçants, 7,52 FC pour les transformateurs et 4,61 FC pour les
producteurs. Par contre, les producteurs investissent plus dans les
chaînes de valeur manioc séché et manioc frais. En effet,
il est plus profitable aux producteurs d'investir dans ces deux (2)
chaînes car 1 franc
xvi
investis dans procure respectivement aux producteurs un gain
de 85,32868 FC ou 8,478 FC en valeurs ajoutées. Les transformateurs
trouvent plus de gain dans la chaîne de valeurs produisant le foufou. En
effet, en investissant un franc congolais dans cette chaîne, les
transformateurs obtiennent un gain de 14,491 FC en valeur ajoutée.
L'analyse de la matrice SWOT souligne diverses contraintes qui
entravent le développement de toutes les chaînes de valeur
analysée dans la présente étude. La première
contrainte majeure (commune à toutes les chaînes de valeur) est
relative aux difficultés d'approvisionnement en semences
améliorées des boutures de manioc. La solution la moins
coûteuse, propose Le Meur (2000) est a priori de produire les
maniocs sur l'exploitation et d'étendre progressivement la surface
cultivée, ce qui nous renvoie à la question sensible de
l'accès à la terre. En effet, comme nous l'avons signalé
dans ce travail, certaines personnes de la population se sont
déjà accaparées des grandes exploitations des terres au
détriment des autres et en font le démembrement où les
conditions d'accès au lopin de terre sont faites au désavantages
des producteurs. Selon le rapport de W.V (2015), la marchandisation de la terre
y a été parfois très précoce, précoloniale
et les transactions foncières sont marquées par une forte
insécurité, des fluctuations de prix brutales non
corrélées à un ajustement de l'offre à la demande
ou au niveau de fertilité.
Bien que les résultats financier et économique
soient globalement satisfaisants pour toutes les catégories d'acteurs
intervenant dans les différentes chaînes de valeurs, de nombreuses
contraintes ont été relevées par l'étude,
particulièrement le manque d'organisation de la chaîne de valeur,
la quasi-inexistence d'infrastructures de stockage et le mauvais état
des voies d'évacuation des produits de zones productrices vers les
grands centre de consommation, l'accès difficile au crédit
(suppression du crédit agricole par la Mecrego/Minova) pour la
majorité d'acteurs pour toutes les chaînes, la fluctuation des
prix notée durant l'année, entre autres. Cependant, la chaine de
valeur manioc a beaucoup d'atouts et d'opportunités favorables à
son développement dans le groupement de Buzi.
Mots clés : -Chaîne de valeur
-Rentabilité- Acteurs- Manioc -Groupement de Buzi-
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