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L'anticipation des risques d'inexécution du contrat.

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par gilles quinones
Université Montpellier I - Master 2 Droit de la distribution et des contrats dà¢â‚¬â„¢affaires 2014
  

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B\ L'atténuation du principe de réparation intégrale

Le principe de réparation intégrale suppose que la totalité du préjudice soit réparé mais que le montant des dommages-intérêts ne saurait dépasser ce dernier. Ce montant recouvre aussi bien le préjudice matériel que le préjudice moral mais exclue toutefois le dommage que l'on n'aura pu prévoir au moment de la conclusion du contrat279 ainsi que toutes conséquences dommageables qui ne seraient pas une "suite immédiate et directe de l'inexécution de la convention"280. Le préjudice matériel comprend, aux termes de l'article 1149 du code civil, la perte subie et le gain manqué par le créancier, résultant de l'inexécution contractuelle.

L'application de la résolution anticipée entraînerait inévitablement une forte atténuation du principe de réparation intégrale; l'objectif de l'anticipation étant de réduire le préjudice subi par le créancier, et partant, le montant des dommages-intérêts dus par le débiteur. En réalité, si

279. Article 1150 du code civil

280. Article 1151 du code civil

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le préjudice du créancier serait réparé intégralement, ce ne serait qu'à condition que ce dernier ait pris soin de minimiser son dommage par application de la résolution anticipée au moment opportun. Autrement dit, le préjudice n'est réparé intégralement qu'en présence d'un comportement contractuel diligent tendant à la minimisation du dommage par le créancier. Le dommage consécutif à l'inexécution du débiteur, ne pourra donc être réparé intégralement si il s'avère que le créancier n'a pas exécuté son devoir de minimiser son dommage. Seul le dommage minimisé est intégralement réparable. Ce bouleversement implique donc un nouveau mode d'évaluation du préjudice: celui-ci sera évalué à la date où le risque d'inexécution sera manifeste, c'est-à-dire, au moment où les circonstances visibles par le créancier laisseront raisonnablement penser que l'exécution du débiteur n'aura lieu. De telles circonstances peuvent provenir d'une déclaration non équivoque du débiteur quant à l'inexécution de ses obligations futures ou encore d'une insolvabilité durable et une situation irrémédiablement compromise du débiteur confirmée par une demande d'attestation d'exécution émise par le créancier demeurée infructueuse. C'est en effet, à partir de ce moment, que le créancier pourra prendre les mesures propres à l'anticipation du risque d'inexécution. Il en résulte ainsi que le montant des dommages-intérêts dus par le débiteur correspondra à la valeur de la perte que le créancier aurait subi et au gain qu'il aurait manqué dans le cas où l'obligation arrivée à échéance n'aurait été exécutée, diminuée de la "valeur économique du temps"281 séparant la manifestation du risque d'inexécution et l'échéance de l'obligation pesant sur le débiteur. La "valeur économique du temps" inclura divers paramètres tels que les fluctuations du marché, ou encore, l'opportunité pour le créancier de se remplacer.

Ce mode d'évaluation diffère fortement de notre conception actuelle tendant à évaluer le préjudice au jour du jugement définitif rendu à la suite de l'inexécution de l'obligation et ayant pour objet de prononcer l'indemnité282. On ne se place plus à la date du jugement rendu à la suite de l'échéance d'une obligation inexécutée mais au moment où le créancier aura raisonnablement pu réduire son préjudice283 aux fins de répondre à un impératif d'efficacité économique. Or, si la date d'évaluation du préjudice correspondait au jour du jugement rendu à la suite de l'échéance de l'obligation inexécutée, il y aurait notamment un risque d'enrichissement du créancier dû aux potentielles fluctuations du marché séparant la manifestation du risque d'inexécution et l'échéance de l'obligation.

281. A. ETIENNEY-DE SAINTE MARIE, Le temps et le contrat, in Le temps et le droit, journée nationale tome XVIII, Dalloz 2014

282. F. TERRE, P. SIMLER, Y. LEQUETTE, Les obligations, Dalloz, 11e edition, 2013, p.651

283. Y.-M. LAITHIER, Étude comparative des sanctions de l'inexécution du contrat, LGDJ, 2004, p.585

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Il convient toutefois de rappeler qu'en cas de comportement exécutoire déloyal du débiteur tendant à faire échec à l'exécution des obligations à échoir, le devoir de minimisation du dommage n'aura pas lieu de s'appliquer. Le préjudice devra donc être évalué à l'échéance de l'obligation inexécutée quand bien même la résolution aurait été appliquée de manière anticipée et "y compris si l'échéance est postérieure à la date à laquelle le jugement est rendu"284.

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