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L'anticipation des risques d'inexécution du contrat.

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par gilles quinones
Université Montpellier I - Master 2 Droit de la distribution et des contrats dà¢â‚¬â„¢affaires 2014
  

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B\ Le fondement de l'inexécution anticipée

Les raisons du succès d'un mécanisme juridique permettant à un créancier de s'extraire d'un contrat voué à l'échec avant même que les obligations de l'autre partie ne soient échues peuvent notamment s'expliquer par le faible rapport d'interdépendance que le droit anglais des contrats attribue aux obligations des cocontractants. Comme ont pu le faire remarquer René David et David Pugsley, "même si l'on parle droit des contrats (law of contract), c'est bien plutôt l'idée d'engagement contractuel (promise) qui est l'idée centrale dans ce droit". Au sein de ce système juridique, le contrat est avant tout considéré comme un regroupement de promesses indépendantes, à l'inverse des systèmes de droit civilistes qui confèrent au contrat le caractère d'un tout unitaire et indivisible marqué par la réciprocité des engagements. "L'importance du lien contractuel" a en effet pu être mise en évidence en droit français par la notion de cause, inconnue du droit anglais.38Par conséquent, si le droit français peut aisément concevoir qu'un créancier puisse s'extraire d'un contrat en cas d'inexécution par son débiteur, il en va tout autrement lorsque l'inexécution n'est pas encore exigible. Le fait pour l'un des cocontractants de se désengager en raison d'un simple risque d'inexécution briserait la relation

31. Central Trust Co v. Chicago Auditorium, 240 U.S. 581, spéc., p.589 ; Yves-Marie LAITHIER, Etude comparative des sanctions de l'inexécution du contrat, LGDJ 2004, p. 556

32. UCC §2-610

33. Restatement of Contracts §250 et s.

34. Yves-Marie LAITHIER, Etude comparative des sanctions de l'inexécution du contrat, LGDJ 2004, p. 556

35. PDEC Art 9:304: "Si avant la date à laquelle une partie doit exécuter, il est manifeste qu'il y aura inexécution essentielle de sa part, le cocontractant est fondé à résoudre le contrat".

36. Principes d'UNIDROIT: Art 7.3.3; Convention de Vienne du 11 avril 1980: Art 71 et 72

37. Par ex, en droit allemand: §323 (4) BGB: "Le créancier peut résoudre le contrat avant même l'échéance de la prestation, s'il est évident que les conditions de la résolution sont remplies".

38. René DAVID et David PUGSLEY avec la collaboration de Françoise GRIVART de KERSTRAT, Les contrats en droit angais, LGDJ, 1985: "Le rapport d'interdépendance qui existe entre les obligations des deux contractants sera d'une part moins marqué en droit anglais que dans le droit français, où l'idée centrale de cause, si discutée qu'elle soit aujourd'hui, a eu historiquement le mérite de mettre en relief l'importance du lien contractuel".

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existante entre les obligations de chacune des parties.

Concevoir le contrat comme "un engagement, ou un ensemble d'engagements reconnus par le droit"39 en l'absence de lien contractuel ne pouvait investir le contrat d'une force obligatoire aussi vigoureuse qu'en droit français. Si l'on considère l'engagement d'une manière isolée, il serait incongru que le droit anglais des contrats puisse imposer, à l'instar du système juridique français40, un consentement mutuel des cocontractants pour permettre la révocation du contrat. La force obligatoire du contrat s'explique en effet partiellement en raison du lien existant entre les obligations de chacune des parties. L'interdépendance entre les engagements de chacune des parties permet en effet au contrat de droit français de revêtir une force obligatoire beaucoup plus vigoureuse qu'en droit anglais. L'engagement étant en revanche considéré isolément en droit anglais, la faculté de se désengager ne pouvait alors être que plus simplement reconnue et attribuer à la notion civiliste d'exécution forcée qu'un caractère exceptionnel. Ainsi, ce n'est que si le non respect dudit engagement aura causé "un dommage contraire au droit" qu'il engagera la responsabilité de son auteur et contraindra ce dernier à l'allocation de dommages-intérêts. Le droit anglais des contrats reconnaît par ailleurs qu'un tel dommage pourrait résulter de la trahison de la confiance légitime que le créancier aura placé en son débiteur (injurious reliance)"41.

On peut ainsi aisément concevoir que lorsque la confiance du créancier aura été trompée, ce dernier aura la faculté de sortir du contrat sans être tenu par ses propres engagements et pourra en outre demander une allocation de dommages-intérêts pour le préjudice subi. Le créancier n'aura donc aucunement besoin d'attendre que l'obligation de son débiteur devienne exigible et qu'une atteinte effective ait été portée au lien contractuel par ce dernier pour demander la résolution du contrat: la rupture du simple lien de confiance légitime, issu d'une certitude du créancier tenant à l'inexécution future par le débiteur, suffira pour qu'il puisse se désengager sans qu'aucune faute ne lui soit imputable.

Le droit anglais des contrats jouissait alors, au XIXe siècle, d'une certaine souplesse permettant à une notion telle que l'"anticipatory breach of contract" d'émerger pour ensuite connaître une ascension fulgurante.

39. Définition doctrinale de Pollock

40. Art 1134 alinéa 2

41. René DAVID et David PUGSLEY avec la collaboration de Françoise GRIVART de KERSTRAT, Les contrats en droit angais, LGDJ, 1985

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"Il faut répondre au mal par la rectitude, au bien par le bien."   Confucius