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La responsabilite du commissaire aux comptes.

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par Youssef SBAY
Université Moulay Ismail - Master 2013
  

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Section II : Le fondement de la responsabilité civile du commissaire aux comptes

On entend par le fondement la base juridique qui justifie la mise en oeuvre de la responsabilité civile.

La responsabilité civile, est fondée sur le principe de la justice corrective, en ce sens elle vise autant que possible, à réparer le dommage causé par le comportement fautif de l'agent, à replacer la victime, dans la situation ou elle se trouvait si le dommage n'avait pas eu lieu, d'où il apparaît le caractère et le fondement indemnitaire de la responsabilité civile d'une manière générale.1

La responsabilité civile est fondée sur deux idées complémentaires : la réparation d'une rupture d'égalité entre la victime et ses contemporains ; la sanction du comportement répréhensible qui se traduit par une atteinte à un droit que la société estime devoir protéger.

En réalité ces deux fondements se fondent en un seul : la responsabilité civile a pour but d'assurer la réparation adéquate des dommages.2

Dans ce contexte la question du fondement reconnu à la responsabilité civile est en lien avec celle de la fonction que doit remplir ce mécanisme juridique, mais ne saurait y être assimilé.

Il en résulte que le fondement de la responsabilité civile du commissaire dépend de la nature de celle-ci.3

Evidemment, le fondement de la responsabilité civile du commissaire aux comptes, doit résulter de la nature de celle-ci, c'est ce qui explique que le législateur marocain a prévu un régime spécial de la responsabilité civile du commissaire aux comptes prévu par l'article 180 de la loi n° 17-95 4relative à la société anonyme.

1 B . Dubuisson, La Responsabilité Civile : Chronique de jurisprudence, Larcier, p 154

2 A. Sourdat, Traité Général de la responsabilité, Cosse, 1852, p 77

3J. Monéger, et T. Granier, Le Commissaire aux comptes, Dalloz, 1995, p 134

4Loi 17-95 relative à la société anonyme, promulguée par le dahir n° 196-124 du 14 rabii 1417 ( 30 aout 1996) telle qu'elle a été modifiée et complétée par la loi n° 20-05 promulguée par le dahir n° 1-08-18 du 17 Joumada 1429 ( 23 mai 2008), (BO n° 5640 du jeudi 19 juin 2008)

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Ainsi l'article 180 de la loi n° 17-95, modifiée par la loi n° 20-05 relative à la société anonyme dispose : « Le ou les commissaires aux comptes sont responsables, tant à l'égard de la société, que des tiers des conséquences dommageables, des fautes et négligences par eux commises dans l'exercice de leur fonctions.

Ils ne sont pas civilement responsables des infractions commises par les administrateurs, les membres du directoire, ou du conseil de surveillance sauf si en ayant eu connaissance lors de l'exercice de leur mission, ils ne les ont pas révélées dans leur rapport à l'assemblée générale. »

En effet l'article 180 de la loi n° 17-951, relative à la société anonyme, constitue un fondement spécial de cette responsabilité, car il est détaché et présente une certaine autonomie par rapport aux principes classiques du droit civil, mais cela n'empêche que les fondements de droit commun de responsabilité civile prévue par le dahir des obligations et des contrats (D.O.C) peuvent également recevoir application s'agissant du commissaire aux comptes. 2

Dans ce contexte, la recherche des fondements de la responsabilité civile du commissaire aux comptes, va permettre de mieux la mettre en oeuvre, et de l'appliquer dans la pratique quotidienne du droit. Ses éléments théoriques que nous déterminerons, nous serviront de base, mais aussi de réponse aux différentes questions qui touchent surtout la nature juridique de l'obligation de réparation.3

Cependant compte tenu, du débat doctrinal controversé et continu, en ce qui concerne la nature de la responsabilité civile du commissaire aux comptes, et en absence d'une conception claire par rapport à ce sujet, il convient de mettre la lumière en premier lieu sur le fondement légal spécial(§ I) qui prévoit le régime légal de la responsabilité civile du commissaire aux comptes, pour ensuite s'intéresser au régime de droit commun qui réglemente en général le domaine des responsabilités(§ II).

1 Loi 17-95 relative à la société anonyme, promulguée par le dahir n° 196-124 du 14 rabii 1417 ( 30 aout 1996) telle qu'elle a été modifiée et complétée par la loi n° 20-05 promulguée par le dahir n° 1-08-18 du 17 Joumada 1429 ( 23 mai 2008), (BO n° 5640 du jeudi 19 juin 2008)

2 J. Monéger, et T. Granier, Le Commissaire aux comptes, Dalloz, 1995, p 137

3 E. Matringe, La reforme de la responsabilité civile en droit suisse : modèle pour le droit français ?, Thése de doctorat en Droit, Université de Strasbourg, 2010, p 40

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§ I : Le fondement spécial :

Une série d'avancées majeures ont marqué au Maroc, ces dix dernières années.

Pour l'essentiel, de nombreuses sociétés publiques ont été privatisées et d'importantes concessions de service public ont été accordées (eau, télécommunications, notamment). Diverses perspectives d'investissement sont envisagées.

Corrélativement, la modernisation du cadre juridique et institutionnel a été très activement entreprise et continue d'être au centre des préoccupations.

Dans ce sens, la législation des sociétés commerciales au Maroc a, ces dernières années, été adaptée afin de répondre aux défis de la mondialisation. Les principaux textes qui dataient souvent de la période du protectorat ont été mis à jour. Cette mise à jour a porté essentiellement sur un certain nombre de législations fondamentales qui idéalement devrait permettre au pays de fonctionner dans un contexte d'investissements et de commerce ayant une vision internationalisée.1

Il en résulte que la responsabilité civile du commissaire aux comptes n'a pas fait l'exception, ainsi si jadis déterminée dans son étendue et ses effets envers la société d'après les règles générales du mandat par l'article 43 du dahir de 1922, la responsabilité civile du commissaire aux comptes a, aujourd'hui pour fondements les dispositions de l'article 180 de la loi de la loi n° 17-95 2relative à la société anonyme :

« Le ou les commissaires aux comptes sont responsables, tant à l'égard de la société, que des tiers des conséquences dommageables, des fautes et négligences par eux commises dans l'exercice de leur fonctions.

Ils ne sont pas civilement responsables des infractions commises par les administrateurs, les membres du directoire, ou du conseil de surveillance sauf si en ayant eu connaissance lors de l'exercice de leur mission, ils ne les ont pas révélées dans leur rapport à l'assemblée générale. »

1 O. Mustapha, Le Commissaire au comptes au Maroc, Sijelmassa, 2010, p 8

22 Loi 17-95 relative à la société anonyme, promulguée par le dahir n° 196-124 du 14 rabii 1417 ( 30 aout 1996) telle qu'elle a été modifiée et complétée par la loi n° 20-05 promulguée par le dahir n° 1-08-18 du 17 Joumada 1429 ( 23 mai 2008), (BO n° 5640 du jeudi 19 juin 2008)

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Ainsi, nous pouvons déduire qu'en légalisant le régime de la responsabilité civile du commissaire aux comptes, dans le cadre de l'article 180 de la loi n° 17-95 1relative à la société anonyme, indépendamment des dispositions régissant la responsabilité civile délictuelle (art 77) ou contractuelle ( art 261) prévues par le dahir des obligations et des contrats, que le législateur marocain reconnaît de manière implicite, que la responsabilité civile du commissaire aux comptes est autonome et indépendante par rapport à ces règles classiques, et qu'elle présente des caractéristiques particulières relative au statut et la profession du commissaire aux comptes qui doivent être prise en compte, et qu'elle nécessite un régime légal spécifique.

En effet les particularités de la responsabilité civile du commissaire aux comptes, sont désormais faciles à apprécier notamment sur la base de l'article 180 de la loi n° 17-95 relative à la société anonyme.

Dans ce sens il convient de souligner en premier lieu que le commissaire aux comptes est cité nommément et directement dans le cadre des articles 180 et 181 qui prévoient le régime légal de la responsabilité civile du commissaire aux comptes.

En plus et contrairement au dahir 1922 qui disposait dans son article 43 que l'étendue et les effets de la responsabilité du commissaire aux comptes envers la société sont déterminées par les règles générales du mandat, la loi 17-95 relative à la société anonyme ne présente aucune précision explicite à la notion du mandat, ni à la responsabilité du mandataire, de même non plus à la responsabilité délictuelle puisque si c'était le cas, le législateur pouvait faire référence à l'article 77 du dahir des obligations et des contrats.

De même, il convient de signaler que les termes utilisés par le législateur dans le cadre de l'article 180 de la loi n° 17-95 modifiée par la loi n° 20-05 relative à la société anonyme, comme « faute », « négligence », « conséquences dommageables » se distinguent clairement des termes utilisés dans le cadre de l'article 77 du dahir des obligations et des contrats régissant la responsabilité délictuelle, en plus le législateur subordonne la mise en oeuvre de la responsabilité civile du commissaire aux comptes, à la présence d'une faute professionnelle, car conformément aux dispositions de l'article 180 loi n° 17-95 modifiée par relative à la société anonyme, le commissaire aux comptes est responsable des fautes et des négligences qu'il a commises dans le cadre de l'exercice de ses fonctions.

1 Loi 17-95 relative à la société anonyme, promulguée par le dahir n° 196-124 du 14 rabii 1417 ( 30 aout 1996) telle qu'elle a été modifiée et complétée par la loi n° 20-05 promulguée par le dahir n° 1-08-18 du 17 Joumada 1429 ( 23 mai 2008), (BO n° 5640 du jeudi 19 juin 2008)

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En fait, la faute professionnelle n'est pas une simple faute ordinaire, car puisque les commissaires aux comptes, sont des professionnels, qui exercent une mission d'intérêt général, ils sont soumis à des devoirs spécifiques, comme par exemple : le devoir d'indépendance, ces devoirs donnent un aperçu du modèle de comportement que les dirigeants doivent observer. La non observation de ses obligations constitue une faute professionnelle et engage leur responsabilité. 1

Dans ce sens certains auteurs indiquent que la faute susceptible d'engager la responsabilité du commissaire aux comptes doit être constitutive d'un manquement aux obligations professionnelles. 2

Par ailleurs, le caractère spécial de la responsabilité civile du commissaire aux comptes se manifeste également, par rapport aux destinataires de cette responsabilité, en effet le législateur dans le cadre de l'article 180 loi n° 17-95 3relative à la société anonyme, limite les parties à l'égard desquelles, le commissaire aux est tenu de répondre de ses fautes et négligences.

Ainsi le commissaire aux comptes est responsable civilement seulement face à la société et aux tiers, car d'après la jurisprudence, même les actionnaires, ne sont pas en mesure, d'engager une action en responsabilité civile contre lui, lorsqu'il s'agit d'une affaire liée au fonctionnement de la société.4

Conséquemment, il en résulte, que la responsabilité du commissaire aux comptes n'est donc pas celle qui peut être exigée de n'importe quelle personne, puisque si la responsabilité délictuelle lui aurait été applicable conformément aux dispositions de l'article 77 du dahir des obligations et contrats, aucune limitation n'aurait été prévue par rapport au destinataires de la responsabilité , et il aurait été tenu de répondre de ses fautes et négligences commises dans l'exercice de ses fonctions, non seulement à l'égard de la société et des tiers mais également vis-à-vis des actionnaires et les salariés, et à l'égard de toute personne qui se sent victime de ses fautes.

1 M. Coipel, Droit des sociétés commerciales, Kluwer, 2006, p 891

2 J. Monéger, et T. Granier, Le Commissaire aux comptes, Dalloz, 1995, p 140

3 Loi 17-95 relative à la société anonyme, promulguée par le dahir n° 196-124 du 14 rabii 1417 ( 30 aout 1996) telle qu'elle a été modifiée et complétée par la loi n° 20-05 promulguée par le dahir n° 1-08-18 du 17 Joumada 1429 ( 23 mai 2008), (BO n° 5640 du jeudi 19 juin 2008)

4 TPI Agadir, 10 mai 2006, cité par T. SBAA, La responsabilité civile, pénale et disciplinaire du commissaire aux comptes et le comportement à adopter en cas de sa mise en cause, Mémoire en vue de l'obtention du diplôme d'expert comptable, ISCAE, nov 2007, p 114

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En effet ce principe, est confirmé par A. Sayag lorsqu'il indique que1 : « la spécificité de la responsabilité du commissaire aux comptes est tout entière contenue dans l'alinéa 1 er de l'article 234, lorsqu'il énonce que « les commissaires aux comptes sont responsables (...) des conséquences dommageables des fautes et négligences par eux commises dans l'exercice de leurs fonctions ».

Par ailleurs, il convient de préciser que les règles de prescription n'ont pas fait l'exception, et présente également certaines particularités, qui permettent de les distinguer des règles de prescription classiques prévues par le droit commun.2

Ainsi par rapport aux règles de droit commun, et conformément aux dispositions de l'article 387 du D.O.C, toutes les actions naissant d'une obligation sont prescrites par 15 ans.

Or le législateur marocain prévoit dans le cadre de la loi n° 17-95 3relative à la société anonyme, des règles spéciales de prescription, s'agissant de la responsabilité civile du commissaire aux comptes, et qui dérogent au droit commun, et qui consistent en ce que les actions en responsabilité contre le commissaire aux comptes, se prescrivent par cinq ans, conformément aux dispositions de l'article 181 de la loi n°17-95 sur la société anonyme qui énonce que :

« Les actions en responsabilité contre les commissaires aux comptes se prescrivent par cinq ans à compter du fait dommageable ou s'il a été dissimulé de sa révélation. »

Au terme de cette analyse du fondement spécial de la responsabilité civile du commissaire aux comptes, il convient maintenant de s'intéresser aux fondements de droit commun qui peuvent servir également comme base juridique de la mise en oeuvre de la responsabilité du commissaire aux comptes.

1 A. Sayag, le commissariat aux comptes : renforcement ou dérive, Litec,1989, p 425

2 O. Mustapha, Le Commissaire aux comptes au Maroc, Sijelmassa, 2010, p 160

3 Loi 17-95 relative à la société anonyme, promulguée par le dahir n° 196-124 du 14 rabii 1417 ( 30 aout 1996) telle qu'elle a été modifiée et complétée par la loi n° 20-05 promulguée par le dahir n° 1-08-18 du 17 Joumada 1429 ( 23 mai 2008), (BO n° 5640 du jeudi 19 juin 2008)

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"Enrichissons-nous de nos différences mutuelles "   Paul Valery