Arrêt de la Cour de Cassation Française : Chambre
Commerciale 19 Octobre 1999
COMMISSAIRE AUX COMPTES. : PERTE DE CHANCE
Cour de cassation
Chambre commerciale
Audience publique du 19 octobre 1999
N° de pourvoi: 97-13446
Publié au bulletin
Rejet.
Président : M. Bézard .,
président
Rapporteur : M. Métivet., conseiller apporteur
Avocat général : Mme Piniot., avocat
général
Avocats : M. Foussard, la SCP Boré et Xavier.,
avocat(s)
REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
Sur le pourvoi, en ce qu'il est dirigé contre
l'arrêt rendu le 30 juin 1994 par la cour d'appel de Paris :
Vu l'article 978 du nouveau Code de procédure civile ;
Attendu que la société Van der Have France n'a
pas, dans les cinq mois à compter du pourvoi, présenté de
moyen contre l'arrêt du 30 juin 1994 ; qu'il y a lieu de constater la
déchéance du pourvoi en ce qu'il est dirigé contre cet
arrêt ;
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comptes
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Sur le pourvoi, en ce qu'il est dirigé contre
l'arrêt rendu le 7 février 1997 par la cour d'appel de Paris :
Sur le moyen unique, pris en ses deux branches :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 7
février 1997), que M. X..., exerçant les fonctions de commissaire
aux comptes de la société à responsabilité
limitée Van der Have France (la société), a, dans son
rapport annuel daté du 18 avril 1985, certifié la
régularité et la sincérité des comptes sociaux,
alors que l'un des cogérants, M. Y..., s'était livré
à d'importants détournements ; que ces détournements se
sont poursuivis et n'ont été découverts par la
société qu'à la suite du départ de M. Y... ; que la
société a assigné le commissaire aux comptes pour obtenir
réparation du préjudice subi du fait de la certification fautive
des comptes, ayant permis la poursuite des détournements pour un montant
supplémentaire de 1 350 000 francs ;
Attendu que la société reproche à
l'arrêt d'avoir considéré que son préjudice
résidait dans la perte d'une chance et d'avoir fixé à une
certaine somme la réparation mise à la charge de M. X..., alors,
selon le pourvoi, d'une part, que le juge ne peut écarter le droit
à la réparation d'un préjudice effectivement subi, en
considérant que le préjudice réside dans une perte de
chance, qu'après avoir constaté ou mis en évidence un
aléa qui affecte le lien de causalité entre le fait
générateur de la responsabilité et le préjudice
effectivement subi ; qu'en l'espèce, les juges ne pouvaient donc
cantonner la réparation à une perte de chance qu'après
avoir constaté qu'un aléa affectait le lien de cause à
effet entre la faute imputée au commissaire aux comptes et les
détournements ; qu'en énonçant « qu'un examen
sérieux et conforme aux normes professionnelles « des comptes
« l'eût conduit à formuler toutes réserves «, la
cour d'appel a exclu l'existence d'un aléa justifiant la
réparation sur le terrain de la perte de chance ; qu'ainsi, la cour
d'appel a violé les articles 1137 et 1147 du Code civil ; et alors,
d'autre part, que dans ses conclusions d'appel, elle faisait valoir qu'outre le
préjudice lié aux détournements, elle avait subi un
préjudice pour avoir payé un impôt sur les
sociétés artificiellement majoré ; qu'en s'abstenant de
s'expliquer sur tous les chefs de préjudice, pour n'asseoir sa
décision que sur les détournements, la cour d'appel n'a pas
donné de base légale à sa décision au regard des
articles 1137 et 1147 du Code civil ;
Mais attendu, d'une part, que l'arrêt retient que le
commissaire aux comptes avait certifié les comptes de la
société de façon hâtive et fautive, compte tenu
d'une importante écriture de régularisation du compte client,
dont l'anormalité aurait dû attirer son attention, alors qu'un
examen sérieux, conforme aux normes professionnelles, l'aurait conduit
à formuler toutes réserves ; que dès lors qu'il ne
résultait pas de ces appréciations et énonciations que les
réserves auxquelles auraient dû conduire les diligences omises
auraient, à elles seules, empêché la poursuite des
détournements, la cour d'appel a pu décider que le
préjudice subi par la société consistait dans la perte
d'une chance de mettre fin à ces détournements dans les meilleurs
délais ;
Attendu, d'autre part, qu'en retenant que le préjudice de
la société résultant de la perte d'une chance est distinct
de celui résultant des détournements eux-mêmes et que le
commissaire aux
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comptes
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comptes ne saurait être tenu de rembourser les sommes
détournées ou le coût global qui en est
résulté pour la société, la cour d'appel a
légalement justifié sa décision ;
D'où il suit que le moyen n'est fondé en aucune de
ses branches ;
PAR CES MOTIFS :
CONSTATE la DECHEANCE du pourvoi en ce qu'il est dirigé
contre l'arrêt du 30 juin 1994
;
REJETTE le pourvoi dirigé contre l'arrêt du 7
février 1997.
Publication : Bulletin 1999 IV N° 176 p.
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Décision attaquée : Cour d'appel
de Paris, du 7 février 1997
Titrages et résumés : 1°
RESPONSABILITE CONTRACTUELLE - Applications diverses - Commissaire aux comptes
- Lien de causalité - Diligences - Omission - Détournement -
Poursuite - Imputabilité partielle - Perte d'une chance.
1° Statuant sur l'action en responsabilité
engagée par une société contre le commissaire aux comptes
qui n'avait pas signalé d'importants détournements commis par
l'un des cogérants, justifie légalement sa décision de
retenir au préjudice de la société la perte de la chance
de mettre fin aux détournements dans les meilleurs délais la cour
d'appel qui retient qu'un examen sérieux, conforme aux normes
professionnelles, aurait conduit le commissaire aux comptes à formuler
toutes réserves, dès lors qu'il ne résulte pas de ses
constatations et appréciations que les réserves auxquelles
auraient dû aboutir les diligences omises auraient à elles seules
empêché la poursuite des détournements.
2° RESPONSABILITE CONTRACTUELLE - Applications diverses -
Commissaire aux comptes - Dommage - Réparation - Perte d'une chance -
Réparation du coût global (non).
2° Ayant retenu que le préjudice de la
société résultant de la perte d'une chance est distinct de
celui résultant des détournements eux-mêmes, la cour
d'appel justifie légalement sa décision selon laquelle le
commissaire aux comptes ne saurait être tenu de rembourser les sommes
détournées ou le coût global qui en est
résulté pour la société.
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