B) Les catégories d'incompatibilités
:
Conformément aux dispositions des articles 161 et 162,
de la loi 17-95 relative à la société anonyme il convient
de distinguer entre trois types de situations d'incompatibilités :
- Situations inter sociétaires et juridiques
- Situations personnelles
- Situations d'activités incompatibles
1 OCDE, Lignes directrices de l'OCDE sur la
gouvernance des assureurs, OECD Publishing, 2012, 74
La responsabilité du commissaire aux
comptes
91
a) Situations inter-sociétaires et
juridiques
Ces situations d'incompatibilités qui sont internes
à la société ou bien qui sont d'ordre juridique ont
été énoncées dans le cadre de l'article 161
alinéa 1 de la loi n°17-95 relative à la
société anonyme et qui indiquent que le commissaire aux comptes
ne peut occuper les postes suivants :
« Les fondateurs, apporteurs en nature,
bénéficiaires d'avantages particuliers ainsi que les
administrateurs membres du conseil de surveillance ou du directoire de la
société ou l'une de ses filiales ; ... »
Cette situation d'incompatibilité prévue par le
législateur, peut être justifiée en amont du fait que le
commissaire aux comptes est un agent créateur de confiance, et compte
tenu des dispositions de l'article 166 de la loi n° 17-95 relative
à la société anonyme qui prévoient que, sa mission
permanente est limitée au contrôle et de suivi des comptes
sociaux, en dehors de toute immixtion dans la gestion de la
société, en conséquence il demeure évident que le
commissaire aux comptes ne peut être juge et partie1 ,
l'impossibilité d'exercer la fonction de commissaire aux comptes en
parallèle, avec celle d'administrateur, membre du conseil de
surveillance selon le mode de gestion adopté .
En outre l'article 162 précise : « Les
commissaires ne peuvent être désignés comme
administrateurs, directeurs généraux ou membres du directoire des
sociétés qu'ils contrôlent qu'après un délai
minimum de 5 ans à compter de la fin de leur de fonctions.
Ils ne peuvent, dans ce même délai, exercer
lesdites fonctions dans une société détenant 10% ou plus
du capital de la société dont ils contrôlent les
comptes.
Les personnes ayant été administrateurs,
directeurs généraux, membres du directoire d'une
société anonyme ne peuvent être désignés
commissaires aux comptes de cette société dans les cinq
années au moins après la cessation de leur fonctions .Elles ne
peuvent dans ce même délai être désignées
commissaires aux comptes dans les sociétés détenant 10% ou
plus du capital de la société dans laquelle elles
exerçaient les dites fonctions. »
b) Situation personnelles :
Dans le même ordre idées, et afin de garantir
l'indépendance du commissaire aux comptes 2aussi bien en
apparence que dans les faits, contre toute présomption ou
circonstance
1 B. Guillon, Valoriser l'intégration du
risque, Editions L'Harmattan, 2011, p 363
2 V. Tsapi, Les implications, économiques, et
comptables dans le système Ohada, L'harmattan, 2009, p 144
La responsabilité du commissaire aux
comptes
92
particulière quel soit personnelle ou familiale de
nature à altérer son impartialité1, le
législateur marocain a prévu des dispositions de nature à
rendre impossible la désignation d'une personne au poste de commissaire
aux comptes, lorsqu'il s'agit de conjoints, ascendants et descendants jusqu'au
2e degré inclusivement des fondateurs, des apporteurs en
nature, des bénéficiaires d'avantage particulier ainsi que des
administrateurs , des membres du conseil de surveillance ou du directoire de la
société ou de l'une de ses filiales conformément aux
dispositions de l'alinéa 2 de l'article 161 de la loi n° 20-05
relative à la société anonyme.
Toutefois il est à noter la modification
apportée par la loi 20-05 sur la loi 17-95 par rapport au
deuxième alinéa de l'article 161, en vertu de laquelle ont
été supprimés les termes parents et alliés, et
remplacées par ascendants et descendants.
c) Situations financières :
L'alinéa 3 de l'article 161 précise
également que ne peuvent être désignés comme
commissaires aux comptes ceux qui reçoivent des personnes visées
à l'alinéa 1 de l'article 161 , de la société ou de
ses filiales, une rémunération quelconque à raison des
fonctions susceptibles de porter atteinte à leur indépendance.
Ainsi, seules sont autorisées les relations
financières qui s'inscrivent dans le cadre professionnel.2
L'interdiction visée par cet article couvre en
particulier les prêts ou emprunts bancaires effectués avec
l'entreprise contrôlée, même s'ils sont consentis aux
conditions normales du marché.3
Par ailleurs le fait que le commissaire aux comptes en
conservant son titre reçoit des honoraires pour des fonctions qui
portent atteinte à son indépendance et son impartialité,
constitue une incompatibilité conformément aux dispositions de
l'alinéa 3 de l'article 161 de la loi n° 20-05 relative à la
société anonyme.
Garant de confiance, le commissaire aux comptes doit
s'abstenir de recevoir toute rémunération ou honoraire de nature
à corrompre son impartialité ou son objectivité, que ce
soit d'une manière directe ou indirecte, et peu importe son montant.
4
1 P. Moulin, L'alerte en période de crise,
PLInformatique, 2005,p 18
2 2 R.Monéger et T. Granier, Le Commissaire aux comptes,
Dalloz, 1995, p 178
3 M. Camara, L'essentiel de l'audit comptable et
financier, L'Harmattan, 2009, p36
4 A. Robert, Responsabilité des commissaires
aux comptes, « Dalloz Référence », 2008, p 203
La responsabilité du commissaire aux
comptes
93
Dans le but de prévenir toute situation incompatible,
liée à la question d'honoraire, le manuel de l'ordre des experts
comptable prévoit dans le cadre de la norme numéro 20, une
obligation mis à la charge du commissaire aux comptes, destinée
à ce qu'il établit une estimation de ses honoraires dus sur la
base des informations qu'il a collectées, ainsi cette norme
énonce : « sur la base des informations collectées, le
commissaire aux comptes sera en mesure d'établir le budget de ses
honoraires, en heures et en dirhams. »
Toutefois dans le même sens, de la protection de
l'indépendance du commissaire aux comptes, le manuel des normes de
l'ordre des experts comptables prévoit dans le cadre de sa
huitième rubrique : « la part du revenu procuré à
un cabinet par une ou plusieurs mission de commissariat aux comptes
auprès d'une entreprise ou d'un groupe d'entreprises ne doit pas
présenter une fraction telle que son indépendance pourrait en
être affectée.
La part du revenu est appréciée en prenant
en considération l'ensemble des honoraires du cabinet résultant
de toutes ses activités. »
Cependant, afin d'assurer l'efficacité de ses
prohibitions, le législateur incrimine les faits susceptibles de
constituer des violations des incompatibilités, et prévoit les
sanctions auxquelles s'expose le commissaire aux comptes en cas de manquement
à ses obligations, par le biais de l'article 404 de la loi n° 17-95
1relative à la société anonyme.
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