5. Le système financier
congolais est longtemps privé d'un potentiel intérieur de
ressourcement.
Il n'existe au Congo ni une classe sociale
particulière, ni un secteur d'activités qui remplisse le
rôle d'accumuler le capital à l'intérieur du pays.
L'économie du pays est verrouillée sur une
classe d'investisseurs étrangers qui exportent la quasi-totalité
des revenus gagnés (et souvent exportent bien au-delà,
grâce à la fraude, à l'évasion fiscale et à
plusieurs formes de trafics illicites des matières
précieuses).
En particulier, les diverses catégories
socio-professionnelles relevant de la classe moyenne a fini par être
mises hors-circuit. La classe moyenne d'affaires est, à ce jour,
très largement remplacée par des classes moyennes
étrangères dans la quasi-totalité des secteurs
d'activité : petite et moyenne industrie, négoce,
exploitation forestière, carrières, import-export,
hôtellerie, grande restauration, ingénierie et conseils,
télécommunications, finances, jeux d'argent, divers services,
appels d'offres publics de l'État congolais, etc. Tous les revenus
d'entreprise que cette classe nationale pouvait gagner, épargner et
réinvestir sur place au Congo, filent à l'étranger,
à la différence de ce qui s'observe ailleurs dans le monde.
Il en va de même de l'expertise nationale congolaise, au
sein de la classe moyenne nationale. Pharmaciens, médecins, chirurgiens,
agronomes, architectes, ingénieurs, dentistes,
kinésithérapeutes, mécaniciens, avocats,
économistes, financiers, mécaniciens et garagistes, ... subissent
de plein fouet la concurrence de l'expertise étrangère. Le
marché de travail où s'observe cette concurrence, est
vaste. Il va des projets et programmes qu'élaborent et exécutent
dans le pays les organisations internationales, à ceux que financent des
organismes de coopération bilatérale, en passant par ceux que
réalisent les organisations non-gouvernementales. Curieusement,
même les appels d'offres et les marchés publics de l'État
congolais ne font pas exception.
La préférence nationale n'étant garantie
dans aucun domaine de la vie économique du pays, le Congo est, sans
surprise, exportateur net de richesses. À preuve, le taux
d'épargne net est négatif à l'échelle de tout
le pays, pour peu que son calcul intègre les dommages causés
à l'environnement, ainsi que la fraction non couverte du coût de
reproduction de l'expertise et du travail nationaux. Ce coût est, en
effet, loin d'être totalement couvert par le niveau de
rémunération des nationaux ; qu'il s'agisse des congolais qui
gagnent aux appels d'offre publics (leurs droits sont rarement payés en
totalité par l'État congolais !), qu'il s'agisse des experts
congolais, ou qu'il s'agisse des milliers de travailleurs et fonctionnaires
congolais.
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