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Problématiques de l'occupation et de la gestion de l'espace public dans les communes de Ouakam et de Mermoz sacré-cÅ“ur.

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par MOUSSA MAHAMAT MOUSSA DICKER
Ecole Supérieure dà¢â‚¬â„¢Economie Appliquée (ESEA_ex-ENEA / UCAD) - Ingénieur de Travaux en Aménagement et Gestion Urbaine 2016
  

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II.3. Les usages et/ou occupations de la voie publique dans les villes africaine et particulièrement à Dakar

Les villes africaines ont en commun un passé colonial. La création de la ville elle-même et de ses outils de planification et de gestion sont d'origine coloniale basée sur le modèle de la ville occidentale. Pour parler d'un espace public purement africain, il suffira de faire un détour dans la vie traditionnelle ou les villageois se retrouvent

27 Dahlgren Peter, Relieu Marc. L'espace public et l'internet. Structure, espace et communication. In: Réseaux, volume 18, n°100, 2000. Communiquer à l'ère des réseaux. pp. 157-186.

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sous le baobab, soit autour du feu ou bien sur la place publique du village où se partagèrent des histoires, où l'on discute des décisions qui concernent la communauté, d'envergure semblable à l'agora des grecs. Mais il s'agit ici de l'espace public urbain, domaine de « l'anonymat » où les gens qui se croisent ne peuvent pas du tout se connaître. A la différence de cet espace africain, la ville est cosmopolite. Certes la ville africaine est un hybride marqué par ces traditions mais l'essence du mot espace urbain ne prend pas en compte le contexte africain mais se base plutôt sur l'évolution de la ville occidentale. L'emprunte ou la marque africaine est donc présente dans la transformation et les usages de ces espaces : « dans le cas des villes d'Afrique de l'Ouest, [...] la notion de l'espace public renvoie à l'histoire sociale de la ville, marquée par la conception occidentale de l'espace public (places, marchés, rues, avenues, gares, ports ...) mais redéfinie par les usages autochtones » (CHENAL, 2009 p.31).

A Dakar la ville fut conçue sur des bases d'une ségrégation spatiale excluant les autochtones du cadre urbain occidentale à travers plusieurs opérations en 1901 (qui ont abouties à la création de Médina en 1914) puis en 1950 avec la création de Pikine. L'exclusion des autochtones, considérés comme non conformistes par le pouvoir colonial, fut les bases d'une crise urbaine à Dakar, qui ne fera que s'amplifier durant la période postcoloniale :« Le tissu urbain ne s'est pas encore remis des blessures de l'époque coloniale et les cicatrices sont visibles [...] » (CHENAL et al. 2008 p.240)

Le travail de Ousseynou FAYE et Ibrahima THIOUB28 sur les marginaux à Dakar retrace d'une manière assez exhaustive le problème lié aux usages de la voie publique dans la ville dakaroise. La configuration coloniale a permis la naissance de l'informel, une issu pour une classe pauvre et ségréguée qui doit chercher des moyens d'adaptation. Le phénomène de l'occupation de l'espace public n'est donc pas nouveau. Et cela n'est pas particulier à la ville de Dakar uniquement mais concerne aussi plusieurs villes africaines « au Togo, tout comme dans les autres pays d'Afrique où les espaces publics sont depuis longtemps occupés et détournés de leur objectif

28Ousseynou Faye, Ibrahima Thioub, « Les marginaux et l'État à Dakar », Le Mouvement Social 2003/3 (no 204), p. 93-108.

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premier f...] » (GBETANOU, 2010)29. Il existait déjà les mendiants, les vendeurs ambulants et les prostituées, qui se sont appropriés la voie publique (O. FAYE et I. THIOUB, 2003).

Dans la ville postcoloniale, le phénomène s'est aggravé avec les crises économiques et environnementales qui ont touché les pays africains surtout ceux de la zone sahélienne. La prolifération de l'informel répond donc à un besoin des populations touchées par ces crises : « Le secteur informel constitue une solution aux nombreux problèmes et besoins des populations citadines» Colette Canet et Cheikh Ndiaye (FAO, 1999). Ces occupations se font dans l'irrespect des normes urbanistiques (voire environnementales) et du régime juridique de la voie, en empiétant sur les emprises de cette dernière dans le désordre et l'anarchie. (NGANAN, mémoire 2015 ; NJONA, mémoire 2008 ; ESEA). Les occupations de la voie ne se font pas toutes caractérisées par le secteur informel. Elles se matérialisent « aussi par l'empiétement des constructions des riverains, la mise en place des mobiliers urbains non adaptés parfois non autorisés et l'implantation d'arbres inadaptés » (NJONA, 2008 p.7).

Les dynamiques liées à la gestion et l'occupation de la voie publique, leurs impacts sur la ville et les usages des populations s'inscrivent dans le temps et l'espace. Cet espace public fait objet de tentatives de contrôle par les communes, une ressource (support d'activités) pour une partie de la population et façonne l'image de la ville dakaroise et son ambiance (CHENAL, 2009). Le problème d'occupation anarchique et informel se trouve être constant dans l'évolution de la ville. Il met en conflits usagers et responsables de la gestion de la voie : « les bana-banas ou marchands ambulants et les petits cireurs qui racolent les touristes, sans parler des voyous, les faux talibés qui mendient, quand ils devraient être à l'école, les lépreux, handicapés physiques et aliénés qui devraient être dans les hôpitaux ou les centres médico-sociaux » disait feu L. S. Senghor (Le Soleil, 20 janvier 1975, p. 3.).

Des dispositions sont prises dès lors pour palier à cet « encombrement humain » (O. FAYE et I. THIOUB, 2003) telles que des sanctions à travers le Décret 76 - 018 du 16 janvier 1976 pris en application de la Loi 67 - 50 du 29 novembre 1967

29Komla Dzidzinyo GBETANOU Le commerce de la rue et l'occupation des espaces publics à Lomé. Cas des trottoirs. Université de Lomé - Togo - Mémoire de Maitrise en sociologie 2010, 98p.

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(règlementant la vente sur la voie et dans les espaces publics) avec appui le Code pénal mais aussi d'autres moyens plus souples : « le pouvoir central sénégalais décida, en accord avec les élites municipales, de construire en 1974 des échoppes au marché Sandaga, sur l'avenue William Ponty et le long du boulevard de l'Arsenal » (O. FAYE et I. THIOUB, 2003 p.102).

La recrudescence de ces occupations s'explique selon plusieurs facteurs. Il y a entre autres l'accessibilité des clients qui facilite l'écoulement des produits. La rue a pour fonction principale la circulation. A Dakar, le mode de transport le plus utilisé est la marche à pied (70% des déplacements, EMTASUD, 2015). Cela permet aux vendeurs d'avoir une clientèle en permanence durant les flux des déplacements mais pas uniquement les piétons mais aussi les automobilistes et autres personnes en déplacements. Aussi les équipements publics (marchés, stades, etc..) constituent un lieu de concentration de personnes et donc une opportunité pour ces acteurs. Les occupants s'installent ainsi de plus en plus à côtés de ces espaces.

La population résidentielle s'approvisionne aussi grâce à ces acteurs économiques. MBEMBO Laure dans ses recherches rapporte que 70% des enquêtés s'y approvisionne, dans une étude menée sur l'axe de la route nationale n°1 (mémoire ESEA, 2012). A cela s'ajoute aussi une « complicité » ou bien la mauvaise gestion des dépendances domaniales par les acteurs des communes, dans la mesure où ils prélèvent des taxes sur ces occupations. Ce qui signifie indirectement une autorisation à occuper ses espaces ou un laissez-faire. C'est à l'exemple d'une victime de déguerpissement par la Direction pour la Surveillance et le Contrôle des Sols (DESCOS) dans le quartier Ouest Foire qui affirme payer à hauteur de cent mille FCFA tous les mois.30 Ou encore le paradoxe sur une voie dont 72% des occupants sont installés sans permis mais 80% d'entre eux payent la taxe municipale (Mbembo, mémoire ESEA 2012).

Les occupations sur la voie publique entrainent aussi des problèmes notamment l'insalubrité, l'insécurité mais aussi des encombrements à la mobilité réduisant ainsi l'attractivité des lieux voire de la ville (NJONA, 2008). L'intervention des autorités, animées par des raisons légitimes, n'arriverait pas à bout de ce « fléau » qui se mue au fil du temps sous l'influence des phénomènes socioéconomiques, particulièrement la

30 Article publié sur le site Senenews le 10 novembre 2015

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pauvreté. Les réponses réactives (déguerpissement par exemple) ne sont plus efficaces et la gestion, naguère aux mains d'un pouvoir central, est maintenant une compétence des collectivités décentralisées (suite aux différentes réformes notamment l'Acte 1, 2 et récemment 3). Ces dernières se trouvent elles aussi limitées par un manque de ressources financières et humaines (qualifiées) et finissent par s'adapter aux réalités locales : « Il faut donc reconnaître que les usages et les fonctions auxquels ces espaces étaient au départ destinés sont détournés à d'autres fins, fins que la municipalité cautionne en les considérant comme source de rentabilité pour leur caisse laissant croire que ces occupations sont légales » (GBETANOU, 2010). Ainsi la meilleure façon de surmonter le problème des occupations anarchiques et illégales est de trouver un compromis avec les usagers. Mais le phénomène persiste toujours.

De ce qui précède, l'espace publique est un concept polysémique, multidimensionnel et pluridisciplinaire. Ce qui fait qu'il doit être prudemment employé et bien défini afin d'éviter toute ambigüité. Cette critique littéraire n'est pas exhaustive et cela pour la simple raison de se limiter au contexte de cette recherche précise qui s'articule autour de la gestion et aux usages de la voie publique. Ainsi trois hypothèses31 peuvent être formulées et ce, dans une perspective de tracer la suite de cette recherche :

a) Les différentes dimensions de la voie publique, notamment celle
purement spatiale et l'autre idéelle ou « a-territoriale », ne peuvent être appréhendées différemment pour faire une analyse pertinente d'un phénomène quelconque qui se manifeste sur la voie ;

b) La voie publique en tant qu'espace public est en permanence muable,
change de forme et d'usages dans le temps et l'espace. Ce qui implique que sa gestion devient complexe et multi scalaire variant selon le contexte ;

c) « En pays du Sud, tout est dans la rue» (Andrée Chédid, Le Liban,
1969). L'espace public dans les villes africaines et particulièrement à Dakar constitue d'abord un enjeu économique par lequel se diffusent des pratiques socioculturelles, mais aussi un moyen d'intégration et d'équité sociale pour certaines classes.

31Il ne s'agit pas des hypothèses principales de notre recherche. Elles résument la critique de la littérature et permettent de construire le cadre opératoire de la recherche.

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"Soit réservé sans ostentation pour éviter de t'attirer l'incompréhension haineuse des ignorants"   Pythagore