La protection du banquier dans les opérations de crédit hypothécaire.( Télécharger le fichier original )par Julio Chancel Makouba Mouyama Université catholique dà¢â‚¬â„¢Afrique Centrale - Master II Contentieux et Arbitrage des Affaires 2008 |
CHAPITRE I : LE RECOUVREMENT FACE AU DEBITEUR IN BONISLe débiteur in bonis est celui dont la cause du non respect des engagements bancaires n'est pas liée à l'ouverture d'une procédure collective à son encontre136. Mais, simplement à son infortune ou à sa mauvaise foi. Ce cas de figure est très fréquent et concerne, au regard de la jurisprudence, la majorité des débiteurs défaillants engagés dans les opérations de crédit garanties par les hypothèques. Il est également très fréquent de voir un tel débiteur, qui pourtant avait volontairement consenti une hypothèque, multiplier des astuces permettant, à défaut de se soustraire du paiement, d'immobiliser les fonds du banquier. Et ce, après avoir obtenu de nouveaux reports d'échéance137 qu'il n'a pas également pu honorer. L'observation de cette situation conduit à constater que les manigances d'un tel débiteur sont parfois favorisées par la loi. En effet, face à un tel débiteur et, même en l'absence de toute manigance, le législateur invite le banquier à recourir à la procédure de saisie immobilière138. Cette procédure, régie par les articles 246 et suivants de l'acte uniforme portant organisation des procédures simplifiées de recouvrement et des voies d'exécution (A.U.P.S.R.V.E), se singularise par son caractère d'ordre public qui conduit à sanctionner de nullité tout recouvrement qui ne lui est pas conforme139. Pourtant, à l'analyse, la procédure de saisie immobilière se révèle être inadaptée aux nécessités économiques. Car, elle est particulièrement longue (Section I) et complexe (Section II)140. Section I : L'assujettissement du banquier à une procédure particulièrement longueEn l'état actuel du droit OHADA, la saisie immobilière est quasiment l'unique mode de recouvrement des crédits hypothécaires. Cette procédure, organisée préalablement pour permettre de poursuivre la vente par expropriation forcée des immeubles appartenant à tout débiteur défaillant, est également devenue par le biais du renvoi opéré par l'article 117 de l'A.U.S, celle qui gouverne la réalisation des hypothèques. La procédure de saisie 136 Un tel débiteur, est encore solvable et demeure maître de ses biens contrairement au débiteur en difficulté. Voir pour cette définition, GUILLIEN (R) et VINCENT (J), op. cit. P.331 137 En pratique, le banquier ne procède pas spontanément à la réalisation des hypothèques, il octroie très généralement de nouveaux délais afin de conduire le débiteur à s'acquitter de sa créance. C'est la phase amiable du contentieux. Lire à ce propos GATSI (J), op. cit P.4 138 Article 117 al 2 de l'A.U.S 139 Cf. article 246 de l'A.U.P.S.R.V.E. Voir pour application Niamey, chambre civile. Arrêt n°79 du 19 avril 2004. Y.K c/ B.I et N.C. www.ohada.com/Ohadata J-05-182. 140 La doctrine et les praticiens s'accordent à le dire. V. TEPPI KOLOKO (F), POUGOUE (G), op cit P. 135. ASSI ESSO (AM), NDIAW DIOUF, op. cit, P. 191, ANOUKAHA (F), op. cit P.65, SOUOP (S) op. cit P. 8, KUATE TAMEGHE (S.S) op. cit. P. 246. ANOUKAHA (F), TJOUEN (A.D), les procédures simplifiées de recouvrement et les voies d'exécution P.U.A Yaoundé P.45 41 La protection du banquier dans les opérations de
crédit hypothécaire en zone CEMAC immobilière, dont l'observation est d'ordre public, est une procédure particulièrement longue. Cette caractéristique, préjudiciable pour le banquier141, se manifeste à travers les différentes formalités qui structurent ladite procédure. Ces formalités, séparées les unes des autres par des délais, vont de la saisie de l'immeuble (Paragraphe I), à sa vente (Paragraphe II). Paragraphe I : Le formalisme préalable à la réalisation des hypothèquesIl s'agit des formalités qui entourent la mise de l'immeuble sous main de justice. Car, la vente de l'immeuble par saisie immobilière est une procédure essentiellement judiciaire. Mais, dans un premier temps, la procédure se passe en dehors des tribunaux et s'articule principalement autour du commandement de saisie. Lequel doit être établi (A), signifié et publié (B) conformément aux prescriptions légales prévues à cet effet. A)- L'établissement du commandement de saisieLe commandement de saisie est l'acte qui déclenche la procédure de saisie immobilière. Il ne peut être rédigé que par un huissier ou l'agent d'exécution142. Son établissement est régi par l'article 254 de l'A.U.P.S.R.V.E qui sanctionne de nullité non seulement les procédures qui n'observent pas cet acte, mais également celles dont l'acte viole les énonciations prévues par ledit article, notamment: - la reproduction ou la copie du titre exécutoire et le montant de la dette, ainsi que les noms, prénoms et adresses des personnes directement impliquées et, s'il s'agit d'une morale, ses formes dénomination et siège social; - la copie du pouvoir spécial de saisie donnée à l'huissier ou à l'agent d'exécution par le créancier poursuivant; - l'avertissement que, faute de payer dans les vingt (20) jours, le commandement pourra être transcrit à la conservation foncière et vaudra saisie à partir de sa publication; - l'indication de la juridiction où l'expropriation sera poursuivie; - le numéro du titre foncier et l'indication de la situation précise des immeubles faisant l'objet de la poursuite; 141 La logique économique est celle de la simplicité et célérité des transactions. V. ANOUKAHA (F), op. cit. P. 4 et suivantes. Or, le fait que la procédure soit longue compromet le bon fonctionnement des activités bancaires. 142 En effet, L'A.U.P.S.R.V.E a étendu le monopole jadis réservé aux huissiers, aux agents d'exécution. V. dans ce sens ASSI- ESSO (A.H) et NDIAW DIOUF, op. cit. P.203. 42 La protection du banquier dans les opérations de
crédit hypothécaire en zone CEMAC - la constitution de l'avocat chez lequel le créancier poursuivant élit domicile et où devront être notifiés les actes d'opposition au commandement, offres réelles et toutes significations relatives à la saisie. Concernant les nullités sus-évoquées, il y a lieu de retenir que l'article 297 al 2 de l'A.U.P.R.S.V.E subordonne leur prononcé à l'existence d'un préjudice causé aux intérêts de celui qui l'invoque143. Cependant, la formulation dudit article est un peu curieuse. En effet, elle pourrait faire croire que même le défaut de commandement de saisie est soumis à une nullité relative nécessitant l'existence d'un préjudice allégué. Une telle analyse est cependant erronée selon notre entendement car, elle contredirait le caractère d'ordre public de la saisie immobilière posée par l'article 246 du même acte. Ainsi, nous pensons que la nullité qui gouverne le défaut de commandement de saisie est une nullité d'ordre public. L'établissement du commandement étant la formalité qui marque le point de départ de la procédure, celle-ci se doit d'être complétée par les formalités de signification et la publicité. |
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