Paragraphe II : La conservation des titres fonciers
Technique née de la pratique bancaire, la conservation
de titres fonciers accompagne de nombreuses conventions de crédit
hypothécaire sans pour autant oser y figurer de manière
écrite dans lesdites conventions. Cette situation rend floue la
compréhension de cette pratique (A), et l'expose à des critiques
parfois trop virulentes (B).
111 Article 1134 du C.civ
112 Article 1188 du C.civ « Le débiteur ne
peut réclamer le bénéfice du terme lorsque par son fait,
il a diminué les sûretés qu'il avait donné par le
contrat au créancier».
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La protection du banquier dans les opérations de
crédit hypothécaire en zone CEMAC Par MAKOUBA MOUYAMA Julio
Chancel
A)- Le pratique de conservation du titre foncier
Le titre foncier est défini comme étant «
la certification officielle de la propriété
immobilière »113. C'est donc un acte qui
matérialise la propriété des biens immobiliers et, par
conséquent, permet d'effectuer les transactions immobilières
(hypothèque, vente, échange ou donation d'immeuble.). Cet acte
doit en principe être détenu par leurs propriétaires
à l'instar de la majeure partie des documents officiels à
caractères personnels. Cependant, dans le cadre des opérations de
crédit hypothécaire, la pratique bancaire a
développé un procédé de rétention et
conservation du titre foncier pendant toute la durée du prêt
jusqu'à complet remboursement du crédit. Cette pratique
déjà forte ancienne dans le secteur bancaire est malheureusement
encore occulte114. En effet, elle accompagne de nombreuses
conventions de crédit hypothécaire sans jamais oser être
inscrite de manière formelle.
La preuve de cette pratique nous est tout de même
fournie par les nombreux litiges portant sur la restitution du titre foncier
opposant les banques à leurs clients. Tel est le cas de l'affaire qui
opposait la Standard Chartered Bank Cameroon S.A au conservateur de la
propriété foncière du Mfoundi et la Société
Internationale d'Equipement. En l'espèce, la banque qui avait
reçu notification d'une ordonnance lui prescrivant de donner
mainlevée à hypothèque et de restituer le titre foncier
à la Société Internationale d'Equipement, va
requérir du président du Tribunal de Première Instance
(TPI) du Mfoundi, la rétractation de ladite ordonnance au motif pris de
ce que, le constituant qui avait contracté un crédit avec
affectation hypothécaire courant 1993, lui était encore
redevable. Le président du TPI a donné gain de cause à la
banque sur les bases des articles 2092 et 2093 du C.civ qui dispose
respectivement que « Quiconque s'est obligé personnellement,
est tenu de remplir son engagement sur tout ces biens mobiliers et immobilier,
présent et à venir. » et que « Les biens du
débiteur sont le gage commun de ses créancier...
»115.
Il ressort de cette décision que la rétention ou
conservation du titre foncier est une forme autonome de garantie qui dans cette
hypothèse s'est greffée à l'hypothèque. Le
véritable objectif de ce procédé est de contribuer
à la stabilité de l'immeuble hypothéqué et de
maintenir une pression psychologique sur l'emprunteur. De par la
rétention du titre foncier, le débiteur devient plus diligent car
il a l'impression de ne plus être maître absolu de l'immeuble
113 Voir, le décret n°76- 165 du 27 avril 1976
fixant les conditions d'obtention du titre foncier, modifié et
complété par le décret n° 2005/481 du 16
décembre 2005.
114 Voir, MEVOUNGOU NSANA (R), op. cit P. 292.
115 Ordonnance de référée n° 159/D
du 27 Mars 2008. Affaire Standard Chartered Bank Cameroon S.A c/ conservateur
de la propriété foncière du Mfoundi et la
Société Internationale d'Equipement.
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hypothéqué. Cependant, le recours à cette
pratique ne doit pas dispenser le banquier de la procédure d'inscription
de l'immeuble telle que prévue par la loi. Car, en l'absence
d'inscription de l'hypothèque, la pratique de conservation des titres
fonciers n'a pas efficacité réelle.
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