3.2.2.2. La méthode MASK : orientée
capitalisation
En effet, la méthode MASK est basée uniquement
sur la modélisation de la connaissance. Les aspects de type GPEC ne sont
pas pris en compte, car la méthode part de l'analyse de ce qu'est la
connaissance. Son auteur, Jean-Louis Ermine, l'a mise au point en 1989
après de nombreuses phases de développement dans
différentes entreprises et en particulier au CEA qui en a alors
déposé une marque « MKSMTM ». Elle peut
être traduite par « Modèle d'Analyse et de Structuration de
Konnaissances »61. Ce modèle propose une vision
systémique d'un projet de capitalisation des connaissances dans une
organisation. Cette dernière fonctionne alors avec trois
sous-systèmes indispensables, le système opérant (ici les
experts), le système de décision (la direction et managers) et le
système d'information (où se situe l'information, comment elle
est stockée). Pour les besoins de la capitalisation des connaissances,
on identifie le patrimoine des connaissances apportées par les «
agents » des sous- systèmes. Il est alors nécessaire pour
modéliser la connaissance, de faire appel à un Ingénieur
des Connaissances ou Ingénieur Cogniticien (IC). Il peut être
interne ou externe à l'organisation. Dans le cas d'un projet où
l'IC est externe, on a souvent en plus un Chef de projet qui fait le lien entre
l'organisation et l'IC. La particularité de cette méthode est
qu'elle peut s'adapter à tous les processus et méthodes de
fabrication d'une entreprise. Cela peut être la création d'une
fiche technique, le démarrage d'un réacteur nucléaire ou
le processus de nomination des experts. Elle ne comporte pas d'aspects
collaboratifs particuliers. En effet, la méthode se base sur la
réalisation d'entretiens entre l'IC et la population interviewée
(ici, les experts). Les connaissances prendront la forme d'un Livre de la
Connaissance (LC) sous format numérique grâce à des outils
de plus en plus connus comme Microsoft Visio, PowerPoint, MindManager ou Xmind
(pour le mindmapping). Certains de ces outils sont payants (MindManager),
d'autres gratuits (Xmind, FreeMind, FreePlane, Mindmapple). Les
61 En gestion des connaissances, la lettre « K
» fait souvent référence à la connaissance.
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Areva
avantages du mindmapping sont la fluidité de l'outil,
sa rapidité d'utilisation et de lecture ainsi que son aspect à la
fois synthétique et parfaitement complet.
Pour pouvoir réaliser les interviews, l'IC se base sur
le « macroscope de la connaissance » 62 qui est une
méthodologie pour identifier tous les aspects de la connaissance et
ainsi externaliser le plus de connaissances tacites possibles. Ainsi, la
modélisation de la connaissance avec la méthode MASK se base sur
deux hypothèses cumulées : la première appelée
« sémiotique » part du principe que la connaissance se
perçoit comme un signe qui contient de l'information, du sens, et un
contexte. La deuxième appelée « systémique »
voit la connaissance comme un système global ayant une structure, une
fonction et une évolution. Par exemple, sur une montre, lorsque
l'aiguille est tournée vers le haut (c'est l'information), je prends
conscience qu'il est midi (c'est le sens que je perçois) et qu'à
cette heure-ci j'ai un rendez-vous (c'est le contexte). Par ailleurs, une
montre donne l'heure (c'est sa fonction), possède un mécanisme
particulier (c'est sa structure) et peut avoir la dernière technologie
inventée (c'est l'évolution). Puis à partir de chaque
point de vue « sémiotique » (information, contexte, sens), on
peut analyser l'aspect « systémique » (structure, fonction,
évolution).
Figure 6 : Le macroscope de la connaissance
Ci-contre, le schéma du
« Macroscope de la connaissance » par J-L Ermine,
montre l'imbrication entre le système sémiotique et
systémique.
Pour exemple, l'information (du système
sémiotique) se décrit en termes de données (qui est
l'aspect structurel de l'information dans le système systémique),
de traitements
62 Jean-Louis Ermine. Management et
ingénierie des connaissances. Modèles et méthodes.
Hermes-Lavoisier, 2008, p.13
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(qui est l'aspect fonctionnel du système
systémique), de datation (qui est l'aspect évolution de
l'information dans le système systémique). Par souci de
synthèse, nous ne détaillerons pas ici les deux autres
caractéristiques de l'hypothèse sémiotique.
Grâce à ce système, la personne en charge
des interviews va décrypter puis modéliser une connaissance dans
un processus global. C'est donc une méthode exhaustive qui structure la
connaissance. Cela peut être très apprécié par les
experts. À la fin des trois à sept entretiens (pour la
capitalisation poussée), il en résulte le Livre de Connaissance
qui modélise les connaissances en six points de vue : les connaissances
fondamentales, les activités, le contexte historique, les savoirs faire,
les concepts ainsi que l'historique des solutions et de leur justification.
À ce jour, trois versions de la méthode existent
(voir Annexe 9 : Les différentes méthodes MASK. p.107) : MASK I
pour la réalisation du livre de la connaissance, MASK II pour
l'alignement entre la stratégie de l'entreprise et les
compétences et les domaines critiques, MASK III pour le partage et le
transfert des connaissances. Cependant, MASK II et MASK III sont exclusivement
mis en place par le cabinet KIP en lien avec Serge Ariès et Jean-Louis
Ermine. En effet, ces méthodes ne sont pas modélisées
à ce jour. À ce titre, il existe un Livre de la Connaissance sur
la méthode MASK I. Ainsi, toute la méthode est accessible sur
internet et permet de se former. Le livre « Management et
ingénierie des connaissances : Modèles et méthodes »
(2008) de Jean-Louis Ermine permet aussi de comprendre le macroscope de la
connaissance. Cependant, il semble peu probable que cela permette sa maitrise
totale. Par conséquent, les recours à un Ingénieur des
Connaissances ainsi qu'à une prestation globale sont très
recommandés afin de pouvoir maitriser la démarche.
À noter que la méthode MKSMTM
(aujourd'hui MASK) a déjà été mise en place chez
Areva à une autre époque et dans des circonstances
différentes. En effet, avant la formation du groupe en 2001, Areva NC
(anciennement COGEMA), avait mis en place cette méthode. Il s'agissait
en effet de mettre à disposition de l'entreprise les connaissances
accumulées pendant la phase de R&D (dix ans par 300 personnes) du
procédé SILVA d'enrichissement de l'uranium. L'objectif final
étant alors d'industrialiser le projet dans les meilleures
conditions.
La méthode MASK semble donc être une forte
alternative à la méthode KALAM®.
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