2.4.2.4. Les problématiques communes pour la
mise en place et le développement des communautés
Chaque communauté est différente. Leurs
objectifs, la forme sous laquelle elles se présentent, les ressources
qu'elles utilisent, les moyens de communication, leur structure
organisationnelle, leur durée d'existence ou les plans de
développement sont tout autant de facteurs qui définissent leur
identité. Cependant, dans un contexte donné, des similitudes
peuvent apparaitre. Areva est une société dont la structure
organisationnelle est en silo (BU, Directions et sites géographiques
sont relativement indépendants les uns des autres). L'industrie du
nucléaire et l'ensemble du cycle du nucléaire rassemblent des
métiers différents et poussent ainsi à ce mode de
fonctionnement. La collaboration et le partage au sein, ou même en
dehors, des communautés sont parfois rendus compliqués par une
culture qui a tendance à s'opposer à la notion de
transversalité. En effet, la confidentialité dans le domaine du
nucléaire est très présente, en particulier de par l'enjeu
des informations qui y circulent. Cette culture est ancrée dans
l'histoire du nucléaire qui s'est développée sur deux
fronts : la technologie militaire et la technologie civile. On retrouve
à ce titre certaines similitudes avec le domaine militaire, soit dans le
langage, soit dans l'organisation de l'entreprise. Par ailleurs, de par son
histoire et son secteur d'activité (l'industrie), l'héritage
Taylorien par une segmentation des activités et des tâches est
elle aussi ancrée dans l'entreprise. L'information y est
contrôlée. La transversalité des communautés est
donc rendue plus compliquée. Le premier constat est le suivant : le
niveau de la culture de partage
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Deuxième partie - Le transfert des connaissances sous
toutes ses formes
d'une entreprise est influencé par son histoire, son
secteur d'activité et l'héritage tiré d'un courant de
pensée de son pays d'origine.
Ainsi, il est nécessaire pour les communautés
d'être soutenues dans leurs développements. Au sein d'Areva, deux
acteurs principaux peuvent avoir cette capacité d'influence : Le
département des Ressources Humaines et le « Top management »
(COMEX, Directeurs de BU, de directions). Dans plusieurs entretiens, les
interviewés ont identifié ces acteurs pour plusieurs raisons.
Pour le « Top management », ils ont la capacité de mettre sur
la table des ressources financières nécessaires au
développement d'outils qui peuvent soutenir les communautés. Ils
ont une capacité de décider la mise en place de projets et de
communautés. Ce sont eux qui peuvent donner leur autorisation pour leur
création et leur développement. Nous avons vu
précédemment que les communautés de savoir se
développent sans que l'organisation hiérarchique y soit
intégrée. Cependant, au sein d'Areva, le contexte et la forme que
peuvent prendre les communautés diffèrent sur certains points.
Les Ressources Humaines sont aussi un appui sur plusieurs points. Dans un
premier temps, ils sont présents dans le processus de transfert de
connaissances et de mobilité en organisant les systèmes
hiérarchiques au sein de l'entreprise. Or les communautés ont
aussi pour objectif chez Areva, le transfert des connaissances et peuvent y
participer activement selon leur niveau de structure. Dans un deuxième
temps ils appuient les communautés en traitant directement avec les
managers sur la thématique de la gestion des ressources. Ils n'ont pas
vocation à agir directement sur les communautés, mais à en
être « sponsors ».
Dans une ère de difficulté financière,
les ressources sont à ce titre très contrôlées et
les réductions budgétaires ont plus tendance à être
à l'ordre du jour. Ainsi, le temps donné et les ressources
accordées pour l'animation et la participation des acteurs dans leurs
communautés sont aussi une barrière non négligeable.
D'où la nécessité d'être soutenu par le « Top
management ».
La difficulté vient aussi de la nature des
communautés : elles ne sont réellement productives et efficaces
que sur le long terme, ce qui est vrai aussi pour un système de
transfert des connaissances. En effet, la connaissance est
transférée pour qu'elle soit toujours disponible dans 20 ou 30
ans. Ainsi, pour que les communautés soient efficaces et
légitimes, une vision et une stratégie doivent être
données sur plusieurs dizaines d'années. C'est ce qui fait
défaut aujourd'hui dans une économie instable.
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Deuxième partie - Le transfert des connaissances sous
toutes ses formes
Les communautés ont aussi besoin d'être
dirigées et animées par des leaders, des responsables qui ont le
temps et les ressources nécessaires pour cela. La gestion du contenu des
sites intranet ou internet, l'organisation des conférences ou le contact
avec les membres d'une communauté chez Areva doivent être
organisés. En 2014, une technologie a fait son apparition au sein
d'Areva : la fabrication additive. Autrement dit : La fabrication d'objet par
imprimante 3D. Parce que cette technologie peut avoir d'importants retours sur
investissement, une communauté a été créée.
La personne qui s'est intéressée de près à cette
technologie a pu mettre en place une communauté. Des publications
sortent tous les trimestres, des réunions et des journées
dédiées spécifiquement à cette nouvelle technologie
sont organisées chaque année. Des liens et des réseaux se
créent avec les unités. Tout cela prend du temps à la fois
pour être animé, mais aussi pour que la technologie se
répande au sein d'Areva. Les difficultés sont alors de faire en
sorte que les acteurs y trouvent un intérêt particulier et qu'ils
participent eux-mêmes à la création de contenu et aux
échanges.
De plus, pour partager et transférer ses connaissances
dans un objectif de créer une connaissance collective, l'expert a besoin
d'être confiant dans la stratégie de long terme de l'entreprise.
En effet, si la connaissance devient collective, qu'elle est détenue par
d'autres et qu'elle a été externalisée à son
maximum, l'entreprise peut être tentée de réduire les
effectifs d'experts puisqu'elle détient au moment voulu, les
connaissances dont elle a besoin. Cependant, si elle se situe dans une
stratégie de long terme et de développement, elle n'aura aucun
intérêt à réduire le nombre d'experts, car elle
risquerait alors de perdre sa capacité d'innovation et de maitrise des
technologies en évolution. Ainsi, nous le voyons, la vision à
long terme de l'entreprise est primordiale pour créer de la confiance et
donc favoriser le partage.
Enfin, avec l'arrivée des jeunes
générations de plus en plus mobiles et de la numérisation
des échanges, les communautés doivent aujourd'hui
s'équiper d'outils informatiques performants.
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