1.2.1.2.2. Spécificités et processus
Nous le voyons, entre être expert chez Areva et
être expert en dehors du groupe, il y a des différences. En dehors
d'Areva, un expert n'a pas à candidater pour l'être (il est
défini expert en étant reconnu par ses pairs, en appartenant
à un groupe d'experts). Chez Areva il est en revanche nécessaire
de respecter un processus défini pour prétendre au statut
d'expert. Une campagne de nomination est donc lancée tous les deux ans.
L'objectif est double. Il s'agit de mettre à jour
régulièrement la liste des experts, ce qui montre que ce type de
carrière n'est ni définitif, ni exclusif. Mais cela permet aussi
à l'entreprise de vérifier que les différents domaines
d'expertise lui sont toujours utiles. Ainsi en 2014, il existait 15 domaines
d'expertise, en 2015 il n'en existait plus que 14. Comme nous le voyons,
l'expertise ne reste pas figée dans le temps. Elle évolue en
fonction des besoins de l'entreprise. La responsabilité de la
candidature est donnée au manager qui la préremplit de son
initiative. Si le collaborateur est en accord avec cette dernière, il
complète le document. La décision de passer expert doit donc
être motivée et justifiée. Il est important ici de
souligner la notion de volontariat des candidatures. À noter par
ailleurs qu'à ce jour, Areva ne distingue pas le statut d'expert par une
reconnaissance financière. Cependant, tous ne peuvent prétendre
à ce statut puisque cela nécessite de posséder une ou des
connaissances dans les 14 domaines scientifiques et
techniques identifiés par Areva à ce jour. Un
comité donnera ensuite son avis sur la pertinence des dossiers en
validant ou non la candidature. Comme nous avons pu le voir
précédemment, la carrière d'expert devient de plus en plus
le résultat d'un choix et non d'une situation subie. Ainsi, dans sa
politique, Areva a distingué trois niveaux d'experts,
précédés d'un niveau « spécialiste » qui
permet de se préparer à devenir expert. Ces derniers doivent
démontrer un niveau de pratique et de développement de leurs
connaissances sur un certain nombre de domaines. L'expert de niveau 1 est
reconnu soit dans sa « Business Unit » (BU), soit au sein de son
« Business Group » (BG). Il doit démontrer une pratique sur la
majorité de ses domaines de connaissance. Au niveau 2, l'expert est
reconnu soit dans son BG soit dans le groupe Areva. Il doit démontrer un
certain niveau de maturité sur une majorité de ses domaines de
connaissance. Ils sont aussi appelés « séniors experts
». Et enfin, l'expert de niveau 3, appelé « Fellow », est
reconnu tant au sein du groupe qu'à l'international par la
Communauté scientifique. Il doit quant à lui, montrer un niveau
excellent dans la majorité de ses domaines de connaissance. Il est
intéressant de voir dès à présent que ces 4 niveaux
(comprenant le « spécialiste ») correspondent aux 4 niveaux
mis en place au CEA qui comprenait en 2014 près de 4000
experts42. Cela montre que ce système semble
déjà avoir fait ses preuves dans d'autres organisations du
nucléaire. Chez Areva, chaque niveau d'expert possède son propre
comité de validation des candidatures. Au niveau BU pour le niveau 1, au
niveau BG pour le niveau 2 et niveau groupe pour le niveau 3. Cette distinction
de niveau permet d'identifier la filière « expert » comme
ouvrant à une réelle possibilité de carrière avec
des évolutions possibles. Par ailleurs, avant de devenir experts, les
collaborateurs deviennent dans un premier temps des « spécialistes
». Ce sont principalement de jeunes ingénieurs qui ont l'ambition
de devenir experts par la suite.
Cette approche par niveau montre l'importance du statut
d'expert tout en mettant aussi en relief les différences de
connaissances entre les niveaux. Ainsi, les « Fellows » seront plus
à même de transmettre leurs connaissances aux «
séniors experts », les « séniors experts » aux
« Experts niveau 1 ». Par ailleurs, les 5 domaines de missions
fixés dans la fiche « Expert model » doivent être
inscrits à différents niveaux dans les objectifs lors de
l'entretien annuel d'évaluation. Pour les experts de niveau 1, 20% des
objectifs doivent concerner les missions définies dans la fiche «
Expert model ». Pour les experts de niveau 2, il s'agit de 40% et pour
42 Olivier MUSSEAU (CEA/DEN/DRH),
L'organisation de l'expertise scientifique et technique à la
Direction de l'Énergie nucléaire du CEA, Revue
Générale Nucléaire, numéro 4 Etre un
expert, Juillet-Août 2014, p.22-28
les experts de niveau 3, il s'agit de 60%. Après avoir
cerné de façon précise ce qu'est un expert et en
particulier chez Areva, nous pouvons maintenant nous intéresser au
processus de transfert de connaissances sur cette population.
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