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Le transfert de connaissance chez les experts.

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par Emmanuel DELARUE
CFA IGS - Master 2 - Responsable en Management et Direction des Ressources Humaines 2016
  

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1.1.2.3. Les enjeux de la connaissance

Pour le domaine du nucléaire, la quantité de données qui a été cumulée depuis plusieurs générations est colossale. Il est donc nécessaire de la conserver. De plus, son avenir étant basé sur les recherches dans la sécurité, la sûreté et le développement des nouvelles technologies, il est capital de la développer en faisant appel aux nouvelles générations. Le domaine du nucléaire est fondé sur la connaissance. Cette situation est aussi vraie, mais dans une moindre mesure, pour l'ensemble des autres industries. En effet, depuis l'ère post-industrielle, les métiers ont évolué, le mode de fonctionnement des entreprises a changé. Déjà en 1996, la différence entre les chiffres de capitalisation boursière des entreprises et la valeur de leurs actifs physiques et matériels était très importante. Cette différence était composée de perspectives de croissance, de gains futurs, et de biens dits « immatériels ». Ces derniers sont alors composés pour partie, de la connaissance que possède l'entreprise [MALLIE (2003, p.15-16)]. Nous pouvons donc facilement affirmer que la connaissance est aujourd'hui valorisée financièrement de façon indirecte. Par exemple, Microsoft avait en 1996 une valeur boursière totale de 85,5 milliards de dollars et comptabilisait seulement 930 millions d'actifs

24 Ibid

physiques et matériels (locaux, équipements...)25. La différence étant donc due aux éléments que nous avons cités plus haut. De plus, la part des métiers dit « intellectuels » faisant appel à la manipulation de concepts et d'idées est en forte hausse dans notre société post-industrielle. Les métiers de l'ingénierie, de l'innovation ou de la créativité sont en pleine croissance. Les technologies avançant, les recherches scientifiques sont poussées toujours plus loin et sont toujours plus nombreuses. L'apparition récente (une vingtaine d'années) des métiers de la Gestion des connaissances (GC) en est d'ailleurs un symptôme marquant. Si ces métiers sont en croissance, c'est que la demande est bien présente. Pour Brice Mallié (2003), « le retour sur investissement du Knowledge Management [ou Gestion des Connaissances] n'est plus à démontrer »26. En effet, d'après lui, deux types de gains se dégagent d'une démarche de GC. Le premier est lié aux économies directes facilement identifiables permettant une optimisation de la connaissance au sein de l'entreprise. Ainsi, des gains de productivités de 13% ont été observés au centre d'appels clients de 3M suite à la mise en place d'un outil de GC. Cela a permis aussi une baisse de 35% en besoins de formation des téléconseillers. Avec un simple intranet permettant l'échange de bonnes pratiques entre techniciens, l'entreprise Xerox économise plus de 7 millions de dollars chaque année. L'entreprise Dow Chemical, quant à elle, a vu la valeur de ses brevets augmenter de plus de 400% grâce à de nouvelles méthodes de gestion des connaissances. Le deuxième type de gains est plus indirect. Il est lié à un changement de culture au sein de l'entreprise avec une meilleure communication, des échanges de bonnes pratiques et un développement accru des compétences. Ainsi d'après les responsables de l'entreprise Buckman, les ventes de nouveaux produits de l'entreprise ont augmenté de 50% et les bénéfices par associé de 93% après la mise en place d'un projet de GC. Brice Mallié identifie alors la potentialité d'une autre utilisation de la connaissance : celle dirigée vers la création de valeur directe. C'est-à-dire, la « vente » de la connaissance. Celle qui est directement dirigée vers les clients. Il montre que le savoir peut être utilisé comme une arme commerciale et marketing et qu'il peut aussi être sujet à la vente par des « produits » comme le conseil, la formation, les brevets, les supports informatiques, etc... Chez Areva, cette « vente » de connaissance existe déjà sous une forme indirecte. En effet, les experts sont souvent à l'appui des projets de vente. Ils « vendent » alors leur expertise aux clients en les accompagnant. Le client veut être suivi et soutenu. Il veut avoir l'assurance, d'autant plus

25 Brice Mallié, Transformer le savoir en profit - Enjeux et bénéfices du Knowledge management, Village Mondial,Pearson Education France, Paris, 2003, 236 p.

26 Idem

dans le nucléaire, que son produit est sans danger et que le fournisseur maitrise parfaitement les produits et services. Ce n'est plus le client passif, apolitique et relativement compréhensif qui existait dans les années 1970. Le client d'aujourd'hui est exigeant, car le milieu économique est exigeant. Il veut comprendre comment et pourquoi il lui est préférable de choisir tel produit ou service plutôt qu'un autre. Ainsi les entreprises doivent prendre conscience de l'importance de la maitrise et du développement de leurs connaissances pour répondre aux attentes du client. Tôt dans la Gestion des Connaissances, la notion de business apparait. Dès 1994, Stan Davis et Jim Botkin mettent en avant le caractère avantageux à fournir des informations à ses clients. Pour eux, les entreprises qui réussiront le mieux seront celles qui auront réussi à transformer des informations en savoir. Aujourd'hui, les entreprises spécialisées sur la mise à disposition d'experts dans un domaine de connaissance spécialisé pour les entreprises se sont développées. L'entreprise Experconnect27, dont Areva est cliente, en est un bon exemple. Pour Areva, l'enjeu de la connaissance est primordial. En effet, comme nous l'avons vu, le secteur du nucléaire est particulièrement rattaché à la gestion de la connaissance. De plus, d'après le Directeur des Ressources Humaines du groupe, l'innovation pour Areva est inévitable, car l'énergie atomique est aujourd'hui plus chère que d'autres sources d'énergie. Les études réalisées par Jean-François Ballay ou Jean-Louis Ermine, deux experts en GC, sur le domaine du nucléaire montrent à quel point ce secteur est en besoin. La rareté des connaissances au sein du nucléaire amplifie ce phénomène et permet aux entreprises de se distinguer sur un marché concurrentiel.

Dans le secteur du nucléaire, il peut être vital pour une entreprise de conserver les connaissances acquises depuis plusieurs générations. Or, les départs à la retraite et l'arrivée des nouvelles générations peuvent être synonymes de perte de savoir. Il est donc fondamental de s'intéresser au transfert de connaissances (TC).

27 Experconnect propose aux entreprises d'accéder à des compétences de jeunes retraités souhaitant apporter leurs connaissances (pointues ou rares) à des projets de haute valeur ajoutée dans l'industrie ou les services.

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"Entre deux mots il faut choisir le moindre"   Paul Valery