1- La confusion avec l'article L. 442-6, I, 4° du Code
de
commerce
72. C'est la CEPC qui, dans l'un de ses avis101,
va jeter un doute quant à la portée de l'article L. 442-6, I,
2° du Code de commerce. Elle y indique que l'article « a
vocation à appréhender toute situation, qu'elle comporte ou non
des pratiques décrites par un autre alinéa de l'article L. 442-6
du Code de commerce [et qu'elle] pourra être appréciée au
regard des effets de l'application de la convention sur les parties. »
Selon cet avis, l'article
L. 442-6, I, 2° du Code de commerce aurait
vocation à déborder son champ d'application naturel. Il viendrait
en quelque sorte suppléer l'ensemble des dispositions de l'article L.
442-6 du Code de commerce en jouant le rôle de clausula
generalis. Pourtant, cette affirmation ne laisse pas de surprendre, car si
toutes les dispositions de l'article L. 446-2 du Code de commerce avaient
vocation à être sanctionnées par l'article L. 442-6, I,
2° du Code de commerce, alors pourquoi celui-ci ne figure-t-il
pas à la fin de l'article102 ? Par ailleurs, quel serait
l'intérêt d'introduire toute une liste de pratiques restrictives
de concurrence à l'article L.442-6 du Code de commerce pour dire que
finalement elles peuvent se voir sanctionner par un seul de ses alinéas
? L'avis de la CEPC crée la confusion et remet même en cause la
volonté du législateur.
73. Il est certain que les dispositions de l'article L.
442-6, I, 2° du Code de commerce ressemblent à celles de
l'article L. 442-6, I, 4° du même code. Ce dernier
prévoit l'interdiction « d'obtenir ou tenter d'obtenir d'un
partenaire commercial un avantage quelconque ne correspondant à aucun
service commercial effectivement rendu ou manifestement disproportionné
au regard de la valeur du service rendu. » Si nous reprenons la
définition du déséquilibre significatif donnée par
la cour d'appel103, « le fait pour un opérateur
économique, d'imposer à un partenaire des conditions commerciales
telles que celui-ci ne reçoit qu'une contrepartie dont la valeur est
disproportionnée de manière importante à ce qu'il donne
», alors celui-ci pourrait parfaitement appréhender
101 CEPC, avis au 22 déc. 2008.
102 E. GICQUIAUD, art. Préc., p. 267.
103 CA Paris, 23 mai 2013, n° 12/01166.
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l'interdiction de l'alinéa 4°. «
L'obtention d'avantage quelconque ne correspondant à aucun service
commercial effectivement rendu ou manifestement disproportionné »
peut-être prohibée avec « le fait d'avoir une contrepartie
dont la valeur est disproportionnée. » Nous sommes pratiquement
face à un doublon. Il y a au moins une cohérence entre les
articles, puisque les deux sanctionnent un avantage ou une contrepartie «
manifestement disproportionnée. » Chacun des deux articles peut
être vu comme une sorte de règle spéciale visée
à l'alinéa 2° et une règle spéciale
à l'alinéa 4°. Le premier sanctionnant le
déséquilibre significatif en général et le second
plutôt chaque clause. Toutefois, cette similitude qui revient à
sanctionner une même situation juridique est source de confusion ainsi
que d'insécurité juridique. Lorsqu'un comportement entre dans le
champ d'application de ces articles, une difficulté de qualification
sera posée. Un conflit de norme sans solution se présente
alors.
Ces « doublons » sont le signe que le
législateur doit procéder à un « toilettage » de
l'article L. 442-6 du Code de commerce. Pour le Professeur Didier
Ferrier104, la loi Hamon105 aurait été
l'occasion de prendre en compte les rapports annuels de la CEPC pour
éliminer « certaines redondances. »
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