I.3.2.3-Théorie du développement local
participatif
Le concept de développement local est apparu dans un
contexte où la vision centralisée de l'Etat était
critiquée par certains acteurs locaux.
Ces derniers considéraient que le développement
d'un territoire devait prendre en compte les besoins et les aspirations des
habitants.
Une nouvelle logique d'autonomie est alors revendiquée
vis-à-vis des centres décisionnels, politiques ou
économiques. Le développement local se rapporte ainsi à
des actions partenariales entre des acteurs intéressés à
l'amélioration des conditions de vie dans leur environnement
immédiat.
C'est vers la fin des années 1950 que prend forme la
théorie du développement endogène avec les chercheurs
comme John FRIEDMAN et Walter STÖHR.
Une approche volontariste, qui conçoit le
développement comme une démarche partant du bas et
privilégiant les ressources endogènes.
Celle-ci fait appel aux traditions industrielles locales et
insiste particulièrement sur la prise en compte des valeurs culturelles
et sur le recours à des modalités coopératives (Katalyn
KOLOSY, 1997).
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L'approche participative du développement local insiste
sur l'importance de la participation et de la responsabilisation des
populations dans toutes les actions de développement.
Cette théorie va au-delà du sens strict des
approches participatives telles que the Participatory Action Research (PAR),
the Participatory Rural Appraisal (PRA), et les Méthodes Actives de
Recherche et de Planification Participative (MARPP)).Celle-ci est maintenant
à la base de la plupart des méthodes et des outils mis au point
ces dernières décennies pour l'appui au développement
(recherche-développement, développement local, gestion des
ressources naturelles...) qu'ils s'en réclament explicitement ou pas.
D'abord, simples méthodes de recueil des informations
auprès des populations locales, les premières expériences
participatives ont progressivement intégré une participation de
plus en plus active des acteurs locaux, dans des méthodes toujours plus
formalisées de diagnostic participatif par la construction de la
concertation avec les populations rurales.
L'approche participative a dépassé le simple
diagnostic pour s'instituer en méthode de concertation pour
l'intervention et a abouti à des outils de planification locale de
développement (Mohammed Sidi SECK et Patrick D'AQUINO, 2001).
L'approche participative, est une approche de concertation,
d'ajustement continu et de compromis contractuels qui accompagne une action de
développement rural depuis la conception de l'idée de base.
C'est une succession de pratiques dictées par des
impératifs temporels spécifiques et définies à
travers un vécu réel sur le terrain (Mohammed BAJEDDI, 2002).
TREMBLAY, cité par (CHERIF, 2008), estime que
l'approche participative du développement local repose sur une
démarche volontaire d'acteurs se réunissant sur un territoire
pour envisager l'avenir de leur territoire.
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Il s'agit donc d'une vision du local dans le global, qui voit
le territoire comme un système de relations avec d'autres
systèmes et d'autres acteurs.
Pour cet auteur, les acteurs oeuvrent à
l'amélioration des conditions de vie de leurs populations. Ce qui passe
par le développement des activités de production, de la
santé, de l'éducation et l'approfondissement de la
démocratie et la gouvernance locale.
Du point de vue juridique, l'Organisation des Nations Unies
(ONU), dans son article 1 de la déclaration sur le droit au
développement lors de son l'Assemblée Générale du
04 Décembre 1986, stipule que:
« le droit au développement est un droit
inaliénable de l'homme en vertu duquel toute personne humaine et tous
les peuples ont le droit de participer et de contribuer à un
développement économique, social, culturel et politique dans
lequel tous les droits de l'homme et toutes les libertés fondamentales
puissent être pleinement réalisés et
bénéficier de ce développement ».
Cette déclaration trace les sillons du
développement participatif.
Ainsi, selon la BANQUE MONDIALE (1992), le
développement participatif est à la fois une fin et un moyen de
développement.
En avançant l'idée que le développement
participatif est une fin, elle entend le référer à une
sorte d'objectif idéal selon lequel le développement durable
résulterait de l'action responsable de citoyens politiquement mûrs
et qui agiraient à travers des institutions électives,
d'associations ou d'organismes, dans le cadre d'une société
démocratique et libre.
Toutefois, un tel objectif devrait être compris comme un
processus continu et de longue haleine, qui tendrait à améliorer
la capacité des communautés à s'autogérer.
La seconde idée est celle du développement
participatif conçu comme un moyen de développement. Cette
idée est beaucoup plus familière car c'est sous cette forme
qu'elle est apparue, il y a deux décennies, dans les politiques de
développement.
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Cependant, cette idée contiendrait une
nouveauté; celle de replacer les approches dans le contexte d'une
responsabilisation politique des communautés concernées. Alors
que précédemment, la responsabilisation politique ne concernait
que la gestion d'une activité et n'avait donc qu'un sens
opérationnel (CHERIF, 2008).
Malgré ses avancées considérables, la
démarche participative soulève plusieurs critiques.
La première interrogation, évoquée par
Mohammed Sidi SECK et Patrick D'AQUINO, se situe dans la pratique de cette
démarche sur le champ du développement.
En effet, la méthode " participative" telle
qu'employée sur le terrain se limite à de simples dialogues
"participatifs", "échanges ritualisés" où les acteurs
locaux ne font que valider, au mieux alimenter les analyses et les choix faits
par les agents extérieurs.
En réalité, une partie de ces problèmes
est due à l'ambiguïté constitutive du concept de la
"participation". Par définition, celui-ci spécifie la
présence obligatoire et centrale d'une intervention exogène,
à laquelle participent les acteurs locaux. Cette situation est peu
adaptée à l'émergence d'une dynamique endogène de
décision et de planification. L'autonomie des acteurs locaux est en fait
loin d'être totale, que ce soit dans la formulation des problèmes
et dans le choix des priorités ou dans la prise de décisions.
La participation est par essence différente de
l'autonomie : c'est toujours la formule d'un agent extérieur qui fait
participer aux diagnostics et aux politiques les acteurs locaux.
Par ailleurs, comme solution à ce problème, un
nouveau principe participatif est soutenu par Mohammed Sidi SECK et Patrick
D'AQUINO, qui est le principe d'endogénéité.
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Ce principe consiste à transformer l'acteur local en
décideur local dont la règle est que l'accompagnement technique
ne fixe aucun objectif préalable à sa démarche d'appui. Sa
sollicitation est d'être disponible pour une dynamique endogène de
prise de décision concertée sur le territoire.
Ici, ce sont les acteurs locaux qui fixent ce qu'ils
considèrent comme une priorité dans cette nouvelle prise ou
reprise de pouvoir sur leur espace et leurs ressources que la démarche
leur propose.
La seconde règle est que la planification territoriale
est avant tout une oeuvre politique et non technique, ce qui implique que
devant l'incertitude de l'avenir, la responsabilité de choix, avant
tout, politique et éthique doit être laissée aux
décideurs politiques légitimes.
La réussite de ces évolutions est dans la
reconnaissance de la participation des populations aux actions les concernant,
c'est-à-dire la volonté de remplacer la relation d'assistance
entre l'encadrement et les populations par une relation de partenariat,
basé sur une reconnaissance des savoirs, des perceptions et de la
légitimité des acteurs locaux. Seule une dynamique
réellement endogène pourra se pérenniser et se
démultiplier à une échelle raisonnable sans appui
extérieur permanent. Ceci vise à l'installation d'un processus
local et collectif de prise de décision. Elle permet aux populations
d'installer en amont un cadre stratégique de développement local
axé sur leurs propres aspirations.
La prise en compte des valeurs des populations
bénéficiaires dans les initiatives de développement est
une modalité essentielle du principe de la participation.
En effet, la démarche promue par la politique de lutte
contre la pauvreté intègre la prise en compte des besoins
exprimés par les bénéficiaires dans les initiatives de
développement. Cette démarche consiste à partir non des
modèles et théories de développement importés mais
des pratiques quotidiennes concrètes des populations
bénéficiaires.
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Elle exige la création au sein des communautés
d'accueil, des conditions pour une appropriation des initiatives de
développement qui leur sont destinées.
La démarche de la politique de lutte contre la
pauvreté s'affranchit de la tutelle exclusive des bureaucrates et
investit le terrain.
La participation en matière de lutte contre la
pauvreté vise à donner la parole aux populations
bénéficiaires, car celles-ci connaissent mieux que quiconque
leurs problèmes, leurs besoins.
A travers l'approche participative, le peuple devient un
véritable agent ou acteur de son développement par une
définition de ses besoins prioritaires et des actions appropriées
pour les satisfaire.
Le passage d'une conception du développement
privilégiant presque exclusivement les infrastructures
matérielles à une autre qui réserverait une place aux
structures sociales, de même que l'abandon progressif des modèles
occidentaux ethnocentriques de développement au profit du respect des
cultures locales, fait de la politique de lutte contre la pauvreté une
politique de développement orientée vers des projets de
développement tournés vers les acteurs locaux.
La participation des différents acteurs de la
société est également une modalité indispensable du
principe de la participation.
Elle ouvre de nouvelles perspectives quant à la
façon dont les initiatives de développement et les affaires
nationales en général devront être conduites.
En favorisant le respect du droit à l'information et
à l'expression, la participation atteint un premier objectif de la
politique de lutte contre la pauvreté, celui de s'attaquer à une
des dimensions de la pauvreté, celle de l'exclusion et de la
marginalisation.
La participation est supposée remédier aux
dysfonctionnements de la démocratie dans les pays pauvres.
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Elle devrait ainsi renforcer les capacités et le
pouvoir des corps intermédiaires (médias, syndicats,
associations, etc.) dans l'élaboration, le suivi, le contrôle,
l'évaluation et la réorientation des politiques. L'information,
suivant cette optique, rend explicite les choix publics et accroît la
transparence dans la gestion des affaires de l'Etat.
L'enjeu de la participation est d'assurer le principe de
responsabilité démocratique (accountability), rendant l'Etat
responsable de ses actions devant les citoyens.
La théorie du développement local participatif
évolue actuellement vers une approche d'éco-développement
participatif (Grigori LAZAREV et Mouloud ARAB, 2002 : 32 à 33).
Le concept d'éco-développement participatif est
une approche visant à un développement raisonné dans le
contexte d'une conservation de la biosphère et qui, sans contester
l'économie de marché met en question le laisser faire sans
régulation.
Cette notion de caractère holistique, souligne bien que
des progrès dans un domaine sont étroitement dépendants de
ceux réalisés dans d'autres domaines43.
La notion de participation apporte à
l'éco-développement sa dimension sociale et politique : elle
introduit une idée de liberté et de maîtrise des
décisions, et donc une finalité en termes de «
développement humain ».
Elle introduit aussi l'idée de sauvegarde de
l'environnement qui constitue une des conditions essentielles du
développement durable, qui doit être directement assumée
par les populations concernées44.
Les approches d'éco-développement participatif
se proposent d'associer les actions de développement directement
productives ou les actions à caractère social à des
activités de restauration de l'environnement.
43Grigori LAZAREV et Mouloud ARAB (2002),
Développement local et communautés rurales: approches et
instruments pour une dynamique de concertation, Paris, Karthala, page
32.
44Idid.
L'éco-développement participatif pose ainsi le
principe d'une sorte d'échange entre d'une part, des engagements des
populations à long terme de l'environnement et, d'autre part, des
avantages offrant une réponse plus immédiatement à
certains de leurs besoins sociaux et économiques.45
De tels avantages peuvent par exemple inclure des incitations
individuelles et développer des actions productives pour obtenir du
crédit ou des incitations collectives pour bénéficier
d'équipements sociaux ou d'infrastructures de service comme des chemins
de desserte ou un approvisionnement en eau potable.
Cette dernière théorie met en lumière un
développement du bas vers le haut et faisant appel aux ressources
localement disponibles. Elle insiste sur la participation des populations
à leur développement comme condition d'un développement
qui contribue à l'amélioration des conditions de vie.
En somme, ce cadre théorique regroupant les
théories du changement social, de la décentralisation et du
développement local participatif met en exergue la société
humaine en évolution dynamique.
Cette évolution est le fruit des rapports des
populations dans des rôles divers et diversifiés d'acteurs de
développement.
Ce cadre théorique donne place au volet
méthodologique du travail qui met en exergue les méthodes
d'analyse et les techniques d'investigation.
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45 Grigori LAZAREV et Mouloud ARAB (2002), op.cit.,
page 33.
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