I.3.2.2- Théorie de la
décentralisation
La décentralisation est un système
d'administration dans lequel le pouvoir de décision est exercé
à la fois, par l'État et par des personnes morales autonomes
soumises au contrôle, en principe de légalité, des
autorités étatiques. Cette disposition implique le transfert
d'attributions de l'Etat à des collectivités ou institutions
différentes de lui et bénéficiant, sous sa surveillance,
d'une certaine autonomie de gestion (BANQUE MONDIALE, 2011).
La décentralisation est le transfert du sommet vers le
bas, de certaines compétences de l'Etat au profit des
collectivités territoriales, des communautés locales et du
secteur privé dans le but d'améliorer les capacités de
fourniture des services en renforçant les capacités des
autorités locales, des communautés et groupes.
La théorie de la décentralisation part du
principe que pour amorcer un développement local participatif, il faut
accorder un certain pouvoir à des collectivités locales reconnues
par la constitution ou par la loi.
La décentralisation, vise ainsi à rendre les
services administratifs et techniques plus efficaces en organisant un transfert
de responsabilités du niveau central de ces services à leurs
représentants locaux (THOMAS et KOULIBALY, cités par CAMARA,
2007).
Pour SOUARE et alii, citant (DIENG, 2010), la
décentralisation consiste à reconnaître à
l'intérieur de la collectivité nationale, des
collectivités plus restreintes ayant leurs intérêts propres
non contradictoires avec l'intérêt national, mais distinct de
celui-ci.
Pour assurer cette décentralisation, il faudrait donner
à ces collectivités des moyens juridiques, administratifs et
financiers afin d'exprimer et de gérer leurs intérêts par
l'organe d'une représentation autonome, en respectant toutefois le cadre
d'un Etat unitaire.
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Cette autonomie se caractérise par trois conditions
essentielles. Toutefois, cela ne signifie pas indépendance.
En effet, la structure décentralisée jouit de
l'autonomie matérielle.
Elle dispose de la personnalité morale et d'un
patrimoine et d'affaires propres qualifiées le plus souvent d'affaires
locales par opposition aux affaires nationales gérées par
l'Etat.
Elle bénéficie également de
l'autonomie organique, c'est-à-dire qu'elle gère par
l'intermédiaire des organes qui sont propres ses affaires.
La structure décentralisée détient
l'autonomie fonctionnelle, c'est-à-dire qu'elle gère
plus ou moins librement ses affaires.
Selon la Banque Mondiale, il ya quatre types de
décentralisation, à savoir la décentralisation politique,
la décentralisation administrative, la décentralisation des
finances et la décentralisation du marché (comprenant la
décentralisation structurelle).
La décentralisation politique vise à
conférer aux citoyens ou à leurs élus plus de pouvoirs de
décision. Elle est souvent liée au pluralisme politique et au
gouvernement représentatif mais elle peut soutenir la
démocratisation en donnant aux citoyens ou à leurs élus
plus d'influence dans la formulation et l'exécution de la politique
d'une administration.
Les partisans de la décentralisation politique se
basent sur l'hypothèse que les décisions prises avec une plus
grande participation des administrés sont bien fondées et
répondent mieux aux besoins des intérêts divers de la
société que celles prises uniquement par les autorités
politiques au niveau central.
En plus, on suppose que la décentralisation politique
permet aux citoyens de mieux connaître les élus locaux et permet
aux élus de mieux connaître les besoins et les aspirations de
leurs électeurs.
La décentralisation administrative vise à
refaire la répartition, à différents échelons de
gouvernement, de responsabilités et de ressources financières,
pour assurer la fourniture de services publics.
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C'est le transfert de responsabilité de la
planification, du financement et de la gestion liée à certaines
fonctions du gouvernement central et de ses organes vers des unités
d'administration sur le terrain, des cellules ou niveaux subalternes de
l'administration, des autorités publiques semi-autonomes, des
municipalités ou des régions.
Les trois principales formes de décentralisation
administrative, à savoir la déconcentration, la
délégation et la dévolution ont chacune des
caractéristiques différentes.
La déconcentration, souvent considérée
comme la forme la plus faible de la décentralisation et plus
fréquemment utilisée dans les pays à gouvernement
unitaire, refait une répartition de pouvoirs de décision, de
responsabilités financières et de gestion entre les
différents échelons du gouvernement central. Elle peut être
simplement le transfert de responsabilités du gouvernement central
à des fonctionnaires qui travaillent dans les régions, provinces
ou districts, ou bien elle peut être la création d'une
administration sur le terrain dotée d'un pouvoir fort, ou encore une
entité administrative locale sous la supervision de
ministères.
La délégation de pouvoir est une forme plus
poussée de la décentralisation. Par la délégation,
les gouvernements centraux transfèrent le processus de prise de
décision et d'administration vers des organisations semi-autonomes qui,
en dernier ressort, doivent lui rendre des comptes.
Les gouvernements délèguent des
responsabilités lorsqu'ils créent des entreprises ou
sociétés publiques, des services chargés du logement, des
transports, des districts de services spéciaux, des secteurs scolaires
semi-autonomes, des sociétés de développement
régional ou des unités spéciales chargées de
l'exécution de projets. Généralement, ces organisations
ont beaucoup de pouvoir discrétionnaire quant aux prises de
décisions.
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Elles peuvent être exemptées des contraintes
auxquelles sont soumis les fonctionnaires ordinaires et peuvent se faire payer
directement par les usagers de services.
La dévolution est une troisième forme de
décentralisation.
Lorsque les gouvernements délèguent les
fonctions, ils transfèrent les pouvoirs de décision,
l'autorité en matière de finances et de gestion vers des
unités d'administration locales quasi-autonomes avec statut de
municipalité. Généralement, la dévolution
s'opère en transférant les responsabilités pour la
fourniture de services aux municipalités qui élisent leurs
propres maires et conseils, perçoivent leurs propres impôts, et
jouissent du pouvoir de prendre des décisions d'investissements. Dans un
système décentralisé par dévolution, les
administrations locales ont des limites géographiques précises et
juridiquement reconnues, à l'intérieur desquelles elles exercent
leur autorité et leurs fonctions publiques. C'est cette forme de
décentralisation qui soutend la plupart des décentralisations
politiques (BANQUE MONDIALE, 2011).
La décentralisation financière, la
répartition des ressources publiques et l'organisation des rapports
financiers entre l'Etat et les collectivités locales. Ce concept
recouvre la définition d'un champ de ressources propres pour les
collectivités locales, l'identification d'un champ de ressources
partagées entre l'Etat et les collectivités locales, et les
transferts des ressources du budget de l'Etat à celui des
collectivités locales.
La responsabilité des finances est une composante
fondamentale de la décentralisation. Pour que les administrations
locales et les organisations privées puissent exercer de manière
efficace les fonctions administratives décentralisées, elles
doivent disposer de revenus d'un niveau adéquat provenant soit de source
locale, soit d'un transfert du gouvernement central. Elles doivent de
même avoir le pouvoir de décision concernant les
dépenses.
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La décentralisation économique ou
décentralisation du marché se caractérise par la
privatisation et la dérégulation car elle consiste à
transférer des responsabilités des fonctions administratives du
secteur public au secteur privé.
La privatisation et la dérégulation42
sont, généralement, mais pas toujours, accompagnées de
libéralisation économique et de politiques de
développement du marché.
Elles permettent que des fonctions qui relevaient
primordialement ou exclusivement du gouvernement soient exercées par le
secteur privé, les communautés, les coopératives, les
associations volontaires privées et d'autres organisations non
gouvernementales.
L'objectif de la décentralisation est la prise en
charge par les populations elles-mêmes de la gestion de leurs propres
affaires.
Cette prise en charge implique, par conséquent,
d'organiser un transfert de compétence de pouvoir et moyens de l'Etat
central vers les entités territoriales auxquelles il est reconnu une
certaine autonomie. Ceci, dans le respect et les limites qui découlent
du caractère indivisible de l'Etat qui demeure le gardien de
l'unité politique et sociale pour l'ensemble du territoire du pays
(SOUARE et alii, 2010).
La décentralisation joue des rôles importants
dans l'augmentation de la participation des citoyens dans les activités
politiques, économiques et sociales dans les pays en
développement. Elle contribue à atténuer les goulots
d'étranglement dans les prises de décisions, là où
elle fonctionne efficacement. Elle permet aussi de réduire des
procédures bureaucratiques complexes et à accroître
l'attention des officiels sur les conditions et les besoins locaux.
42 Dérégulation est la suppression ou
l'assouplissement des règles qui régissent une activité
économique, notamment en matière tarifaire.
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Elle favorise ainsi une représentation politique des
divers groupes politiques, ethniques, religieux et culturels dans le processus
des prises de décision (BANQUE MONDIALE, 2011).
En somme, la théorie de la décentralisation
implique une nécessité de créer ou de renforcer au niveau
des collectivités décentralisées les capacités des
ressources humaines qui interviennent aux différents niveaux de
développement. Autrement dit, elle permet aux populations locales de
participer à leur développement.
Cette théorie donne place à celle dite du
développement local participatif.
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