La loi de règlement en droit public financier camerounais.( Télécharger le fichier original )par Emmanuel Bela Kioyo Universite de yaounde 2 - Master2 2015 |
SECTION2 : LA CONSTATATION DES ECARTS SUR LA BASE DES CREDITSL'article 5 de la loi de règlement pour l'exercice 2013 dispose à la place de ce qui peut être qualifié de titre : « écarts dans la mise en des programmes pour l'année 2013 : base AE et CP ». C'est un autre angle sous lequel la loi de règlement constate l'exécution de la loi de finances pour l'année. Rappelons que cette dimension de la constatation n'est visible que dès 2013 car ce n'est qu'en 2013 que la loi portant régime financier de l'Etat entre en vigueur dans sa totalité. La loi de finances définit deux types de crédits et dispose au premier alinéa de l'article 10 que les crédits sont spécialisés par programme. La Directive CEMAC relative aux lois de finances qualifie cela de nouvelle méthode de présentation et de norme de vote de crédits ou encore d'enveloppe de spécialisation des crédits. Le principe de la spécialité budgétaire implique que chaque crédit soit destiné à un programme déterminé, elle permet alors de connaître la destination de chaque crédit même si son contenu a été modifié. Il apparaît donc nécessaire que pour avoir une image nette de l'exécution de la loi de finances initiale il faut étudier les programmes dans la dimension coût. Pour Jean Luc Albert, c'est l'occasion d'apprécier l'utilité de la dépense publique85(*). Les deux types de crédits reconnus par la loi portant régime financier de l'Etat sont la base sur laquelle nous fondons cette section, il est clair que la loi de règlement est l'acte qui constate les écartsdans la mise en oeuvre des programmes sur la base des AE(A) et des CP(B). §1. Le compte rendu de la gestion des autorisations d'engagementUne AE est selon l'article 15 alinéa2 de la loi de 2007, la limite supérieure des dépenses pouvant être engagées au cours d'une période n'excédant pas trois ans. Ce type de crédit est le fruit de la programmation pluriannuelle devenue ordinaire dans les lois de finances.L'approche pluriannuelle du budget a une grande valeur pour le législateur camerounais. Elle est également évoquée dès l'article 1er de la Directive relative aux lois de finances en zone CEMAC, qui dispose :« la présente Directive fixe les conditions dans lesquelles est arrêtée la politique budgétaire à moyen terme pourl'ensemble des finances publiques ». L'objectif de cette programmation pluriannuelle est d'intégrer l'action de l'Etat dans un cadre temporel de moyen terme et de prendre en compte, dès la formulation du budget, les impacts financiers des décisions publiques annuelles sur les exercices suivants86(*). En effet depuis quelques années, la nécessité de budgétiser des opérations qui allaient au-delà d'une année s'est révélée être un moyen indispensable pour un suivi minutieux de l'utilisation des crédits87(*). Les AE sont des limites de dépenses pouvant être engagées pour l'exécution des programmes élaborés dans un document de planification appelé le Cadre de dépenses à moyen termes qui est programmé pour une période de trois années88(*).En entreprenant de présenter les écarts dans la mise en oeuvre des programmes sur la base des autorisations d'engagement nous voulons prendre dans la loi de règlement des exemples concrets qui nous servirons d'échantillon, pour cela nous prendrons quelques chapitres repartis parmi lesorganes constitutionnels(A) qui se distinguent des autres chapitres constitués en grande partie des ministères(B). A. Le cas des autorisations d'engagement au sein des organes constitutionnelsLes organes constitutionnels sont une catégorie de chapitres crées par la Constitution. Pour qu'ils soient supprimés, il faut une modification de la loi constitutionnelle. Lorsque nous étudions les écarts relevés par la loi de règlement de 2013 sur la base des indicateurs, nous avons remarqué que les objectifs avaient des indicateurs libellés mais n'étaient pas mesurés. Cela était dû au fait que ces institutions n'agissaient pas sur un terrain directement lié à la vie des populations. Dans ce cas où nous relevons les écarts sur la base des crédits, on remarque que les crédits ont en effet été utilisés et la loi de règlement nous donne le taux de réalisation de chacun des objectifs. Pour le cas de la Présidence de la République, la loi de règlement constate l'existence et l'exécution de trois programmes parmi lesquels on a la « formulation et coordination del'action présidentielle 89(*)» dont l'objectif a été d'assurer la mise en oeuvre du programme des grandes réalisations. Pour le programme « formulation et coordination de l'action présidentielle » des Services rattachés à la Présidence de la République ayant pour objectif de veiller à la réalisation des projets des grandes réalisations90(*). Pour l'Assemblée Nationale la loi de règlement pour l'exercice 2013 recense deux programmes parmi lesquels, le « renforcement contrôle parlementaire de l'actiongouvernementale91(*) » ayant pour objectif de contribuer à l'efficacité des politiques publiques. Au vu de cet exposé, l'on s'aperçoit que des dépenses sont été engagées alors qu'aucun écart n'a été constaté sur la base des indicateurs. La question que l'on se pose est de savoir pourquoi l'Etat s'engage-t-il s'il n'y aura pas de résultat lié à l'usage des crédits ? La réponse se trouve dans l'étude des fonctions assignées à chaque chapitre. En effet les organes constitutionnels existent plus pour la création et la pérennisation de l'Etat. La Présidence de la République, l'Assemblée Nationale, le Premier Ministère, la Cour Suprême et le Conseil économique et social n'ont aucun contact direct avec les populations, ils permettent seulement de faciliter l'action des autres chapitres comme le précise l'indicateur permettant de mesurer la réalisation de l'objectif de renforcement de la conception et l'amélioration de la mise en oeuvre des politiques publiques au chapitre5 « Conseil économique et social » : « proportion desdemandes d'avis ayant obtenu une réponse du CES ». Ainsi les moyens utilisés ici sont employés aux procédures et contrôles exercés sur les chapitres dotés de fonctions issues des besoins des populations. * 85 J.L Albert, finances publiques, Dalloz, 4èmeéd. 2011, p356. Le programme est un dispositif qui permet d'exprimer le passage de la culture de moyen à la culture de résultat. C'est un dispositif qui permet de mesurer l'utilité et l'efficacité de la dépense publique. * 86Conférence Internationale sur les enjeux et défis de la mise en oeuvre de la Nouvelle Loi Organique relative aux Lois des Finances du Tchad Ndjamena, 29-30 Octobre 2011. www.cemac.int * 87 J.L Albert, Ibid. p356. la programmation de l'action gouvernementale est la voie par laquelle le législateur introduit une grande rationalité dans la gestion financière publique. * 88 Article 15 alinéa 2 de la loi portant régime financier et article 21 de la directive n°01/11-UEAC-190-CM-22 relative aux lois de finances en zone CEMAC. * 89Ce programme a reçu une dotation initiale de FCFA 16 436 460 308 et des engagements s'élevant à FCFA 13 978 147 797, ce qui donne un taux de réalisation de 97,10% en 2013 * 90Un montant initial d'autorisations d'engagement s'élevant à FCFA 3 922 369 500 et a connu un total des engagements s'élevant à FCFA 2 351 458 924, ce qui fait un taux de réalisation de 85,44% pour l'exercice 2013. * 91Ce programme a connu un montant initial d'autorisation d'engagement deFCFA 5 000 000 000 et a connu un taux de réalisation de 100%, cela veut dire que tous les dépenses ont été engagées pour l'exercice budgétaire de l'année 2013 |
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