La dilution des marques renommées( Télécharger le fichier original )par Marion Pinson CEIPI - M2 droit européen et international de la propriété intellectuelle 2012 |
1) La reconnaissance d'une similitude extrinsèqueLa similitude est une notion par essence subjective, puisqu'elle repose sur la perception de ressemblances visuelles, phonétiques et même conceptuelles. Elle offre donc l'avantage d'être malléable et a pu permettre à l'appréciation du risque de confusion de gagner en souplesse. L'acception classique de la similitude est dite intrinsèque. Elle se borne à observer les ressemblances entre les produits ou les services désignés par les signes. Cette conception stricte ne suffit pourtant pas à conférer une protection adaptée aux marques renommées car la seule différence de spécialité des marques écartait l'existence d'un risque de confusion. Les juges ont ainsi pu reconnaître une similitude dite extrinsèque, attachée non plus seulement à la nature des produits ou services en eux-mêmes mais à leur origine. Un risque de confusion peut ainsi être retenu lorsque le public risque de penser à tort que les produits, bien que différents, proviennent d'une seule et même entreprise ou encore lorsque, bien que conscient de deux entreprises distinctes, il pense qu'elles sont économiquement liées. La célèbre décision Lu est la première à témoigner de cette démarche extensive. Dans cette affaire,il était question de l'usurpation de la marque renommée Lu désignant des biscuits par le signe Luc désignant des biscottes et du pain d'épices. Lors de cette affaire, la cour d'appel de Paris a pu retenir une similitude en raison de ce que « les acheteurs [avaient] pu croire que les produits présentés, bien que différents de ceux qui leur [étaient] vendus d'ordinaire sous cette marque, émanaient de la même entreprise »23(*). Adoptant le même raisonnement, des gaufrettes pralinées Côté d'Or ont été considérées similaires au fameux chocolat Côté d'Or car ces produits étaient « suffisamment voisins par leur nature ou leur destination pour que les acheteurs puissent croire qu'ils [étaient] fabriqués ou mis en vente par l'entreprise propriétaire de la marque déposée »24(*). Cette solution fut confirmée par la Cour de justice des Communautés européennesdans un arrêt Canonlorsqu'elle affirma que « constitue un risque de confusion au sens de l'article 4.1° b) de la directive le risque que le public puisse croire que les produits ou services encause proviennent de la même entreprise ou, le cas échéant, d'entreprises liées économiquement »25(*). Cette acception extensive de la similitude se trouve tout à fait justifiée au regard de l'évolution des pratiques économiques. Il aurait été en effet possible de se passer de cette solution à l'époque où une marque ne correspondait qu'à un seul produit. Aujourd'hui toutefois, les entreprises diversifient leurs domaines d'activité ; le consommateur sait que la marque d'une même entreprise peut donc désigner toute une ligne de produits différents. Au vu de ce phénomène, l'apparition delanotion de confusion sur l'origine du produit est ainsi tout à fait opportune. * 23 CA Paris, 3 nov. 1958, JCP, 1958, II, 10862. * 24 CA Paris, 26 avril 1960, Gaz. Pal., 1960, II, 299. * 25 CJCE, 29 sept. 1998, aff. C-39/97, Canon Kabushiki Kaisha c/ Metro-Goldwyn-Mayer, Rec. 1998, I-5507, pt. 29. |
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