La dilution des marques renommées( Télécharger le fichier original )par Marion Pinson CEIPI - M2 droit européen et international de la propriété intellectuelle 2012 |
§2. L'indifférence d'autres critèresAlors que la Cour requiert la démonstration d'une modification du comportement économique du consommateur ou un risque sérieux qu'elle se produise, elle écarte explicitement d'autres critères. Seront ainsi écartés pour caractériser l'atteinte au pouvoir distinctif l'avantage économique tiré par l'usurpateur (A) ainsi que l'unicité de la marque antérieure (B). A/. L'indifférence de l'avantage économique tiré par l'usurpateurLa Cour de justice est claire sur ce point : si la preuve d'une atteinte au pouvoir distinctif de la marque renommée antérieure suppose la démonstration d'une modification du comportement économique du consommateur, « il est en revanche indifférent (...) que le titulaire de la marque postérieure tire ou non un réel avantage commercial du caractère distinctif de la marque antérieure »140(*).Cette solution est en accord avec les textes communautaires selon lesquels la preuve d'une faute et d'un préjudice est alternative et non cumulative.Par ailleurs, il est vrai qu'on ne voit pas en quoi il serait pertinent de prendre en compte la situation de l'usurpateur pour constater un préjudice de dilution. La doctrine a toutefois pu avoir une interprétation quelque peu alarmiste de l'arrêt Intel en pensant le contraire. Le professeur Caron comprend en effet le critère de la modification du comportement économique du consommateur comme un détournement des produits ou services désignés par la marque antérieure au profit de ceux désignés par le signe postérieur. Une telle preuve serait en effet très difficile, voire impossible à rapporter. Comment démontrer le déplacement d'une même clientèle pour des produits ou services différents ?141(*) Pourtant, le professeur fait dire à la Cour de justicejustement ce qu'elle réfute. Certes, ce critère implique que le consommateur se soit détourné des produits ou services de la marque renommée ; il faudra ainsi démontrer une baisse des ventes, mais sans pour autant indiquer vers qui le consommateur se sera reporté. D'ailleurs, si baisse de ventes il y a, elle se fera nécessairement au profit de marques concurrentes et non pas au profit du signe usurpé qui est utilisé dans un secteur d'activité différent de la marque renommée. Autrement dit, la Cour de justice exige la preuve du préjudice du titulaire mais pas celle d'un quelconquebénéfice tiré par l'usurpateur. Bien entendu, si la preuve cumulative d'une faute est exclue, sa preuve alternative est toujours possible. Car la dilution et le parasitisme constituent en quelque sorte les deux faces d'une même pièce. Si le titulaire échoue à démontrer un préjudice de dilution, il pourra toujours se tourner vers la faute en démontrant un profit indûment tiré du caractère distinctif de sa marque par le tiers usurpateur. * 140CJCE, 27 nov. 2008, Intel Corporation Inc., op. cit., pt. 78. * 141 C. CARON, op. cit. |
|