La dilution des marques renommées( Télécharger le fichier original )par Marion Pinson CEIPI - M2 droit européen et international de la propriété intellectuelle 2012 |
2) Une jurisprudence toujours favorable aux titulaires de marque renomméeSuite à la jurisprudence Intel, le premier arrêt qui retient un risque de dilution témoigne de cette approche très compréhensive de la protection. Le conflit opposait le titulaire de la marque renommée Botox au signe Botumax, tous deux utilisés dans le secteur pharmaceutique. Le Tribunal de première instance de l'Union européenne retient alors que « (...) l'élément verbal « botox » n'a aucune signification propre, mais constitue un terme fantaisiste auquel le public ne sera confronté qu'en relation avec les produits visés par la marque antérieure renommée. Par conséquent, l'utilisation de cet élément verbal ou d'un élément verbal similaire par une autre marque enregistrée pour des produits susceptibles de concerner le grand public conduira incontestablement à la dilution du caractère distinctif de la marque antérieure renommée »137(*). Cette argumentation des juges communautaires est trop lapidaire pour emporter l'adhésion. Pour retenir un préjudice de dilution, seules la distinctivité de la marque renommée et la similarité des signes sont examinées. Ainsi, non seulement le tribunal élude totalement le critère de la modification du comportement économique du consommateur, mais il n'explique à aucun moment en quoi l'emploi du signe Botumax porte atteinte au pouvoir distinctif de Botox. Plus récemment, le Tribunal de première instance de l'Union européenne a confirmé cette approche laxiste. Il considère ainsi que la non démonstration des effets économiques du rapprochement entre les marques en conflit n'empêche pas la caractérisation d'un préjudice de dilution138(*). Faisant ainsi clairement résistance aux exigences posées par la Cour de justice dans l'arrêt Intel, le Tribunal préfère se référer à son arrêt Citibankdans lequel il requiert la démonstration d'un risque futur de préjudice« sur la base de déductions logiques résultant d'une analyse des probabilités (...) ». Ce critère bien trouble, très pratique pour contourner les difficultés de preuve en matière de dilution, témoigne clairement d'une exigence à la baisse des juges communautaires de première instance. En revanche, les juges français semblent avoir compris la leçon et appliquent rigoureusement les critères dégagés par la Cour de justice, notamment celui de la modification dans le comportement économique du consommateur. La Chambre commerciale a ainsi pu statuer surl'usage litigieux de la marque renommée Agatha, représentant un petit chien désignant des bijoux et accessoires de mode,pour désigner des colliers et laisses pour chien. Elle affirme ainsi que « la preuve que l'usage d'un signe similaire à une marque antérieure de renommée porte ou risque de porter préjudice au caractère distinctif de cette marque suppose qu'il soit démontré que le comportement économique du consommateur moyen des produits pour lesquels la marque est enregistrée a été modifié consécutivement à l'usage de ce signe ». Elle décide alors que la ressemblance entre les signes et le lien établi entre eux par le consommateur moyen des articles vendus par le titulaire de la marque antérieurene constituent pas une preuve suffisante de dilution ou d'un risque de dilution du caractère distinctif de sa marque139(*). * 137TPIUE, 28 oct. 2010, aff. T-131/09, Farmeco c/ OHMI, Rec. II-00243, pt. 99. * 138 TPIUE, 22 mai 2012, aff. T-570/10, Environmental Manufacturing LLP c/ OHMI, pt. 53. * 139Com. 1er mars 2011, n° 10-14.967, SARL Agatha diffusion c/ SA René Martin. |
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