La dilution des marques renommées( Télécharger le fichier original )par Marion Pinson CEIPI - M2 droit européen et international de la propriété intellectuelle 2012 |
B/. Une protection à la mesure de la gravité du risqueL'empreinte laissée par la marque dans l'esprit du consommateur n'est jamais indélébile. Si prodigieuse soit-elle, la force attractive de la marque renommée reste en effet fragile. Notons d'abord que plus le pouvoir d'attraction d'une marque est fort, plus le risque d'usurpation est élevé. Les marques renommées sont donc particulièrement sujettes aux cas d'usurpation, et notamment au préjudice de dilution. Mais plus que sa probabilité, c'est la gravité du préjudice de dilution qui est extrêmement préoccupant. Bien distincte du risque de confusion, ladilution est un préjudice beaucoup plus redoutable. Le titulaire d'une marque renommée a en effet beaucoup moins à craindre du risque de confusion que de la dilution car, « pernicieuse comme un poison lent »44(*), elle épuise la marque de l'intérieur en détruisant inexorablement son caractère distinctif. Or l'érosion de la distinctivité atteint la marque dans ce qu'elle a de plus précieux : sa force attractive, durement gagnée à force de temps et d'efforts publicitaires. Ce magnétisme commercial exercé sur les consommateurs est d'une telle importance qu'un fabricant dirait sûrement : « si je me trouvais dans l'alternative de perdre les fabriques ou de perdre la réputation que la société s'est créée par sa publicité constante pendant les vingt dernières années, je dirais certainement : brûlez les usines ! De nouvelles peuvent être construites en 90 jours mais notre publicité a pris des années et aucun capital ne peut suppléer à l'impression déterminée par elle »45(*). En effet, la diminution de la distinctivité d'une marque lui est fatale car « l'impression indélébile, laissée par un signe singulier, perd de sa netteté dans la mémoire du consommateur (...) la marque employée par des tiers devient commune. Or la banalité entraîne l'indifférence »46(*). Et l'indifférence, on le sait bien, est funeste aux marques. §2. Une protection nécessaire : la prise en compte des contraintes juridiquesLoin d'être seulement légitime, la protection contre la dilution est aussi nécessaire. D'une part, le droit des marques ne dispose pas d'instruments adaptés pour faire face au préjudice qui nous occupe. Le recours au risque de confusion, en effet, est loin d'être satisfaisant (A). D'autre part, le système de protection est bâti de telle manière qu'une marque non protégée contre l'atteinte à son caractère distinctif se verrait fortement amoindrie dans le cadre même de sa spécialité. La protection contre la dilution permet ainsi de garantir à la marque une protection optimale à l'encontre des concurrents (B). * 44 M. JATON, op. cit., p. 49. * 45 H. PORTET, op. cit., p. 8. * 46 H. PORTET, op. cit., p. 49. |
|