A- Les textes communautaires
Aucune disposition du Traité de N'djamena du 16 mars
1994 ne fixait les conditions nécessaires à un contrôle
efficace de la CJC sur la transposition des directives CEMAC. Il en va de
même de son additif relatif au système institutionnel et juridique
de la CEMAC, de la Convention de Libreville du 5 juillet 1996 portant
création de la Cour de justice de la CEMAC, et de l'Acte additionnel
n°4/00-CCE-CJ-02 du 14 décembre 2000 portant règles de
procédure devant la chambre judiciaire de la Cour de Justice de la
CEMAC.
En effet, selon les termes de la Convention de Libreville du 5
juillet 1996 et de l'Acte additionnel n°4/00-CCE-CJ-02 du 14
décembre 2000, la CJC (Chambre judiciaire) pouvait
connaitre214 du recours préjudiciel en
interprétation215, du recours en « non-conformité
», du recours en responsabilité extracontractuelle. Monsieur Pierre
Kamtoh classait quant à lui, au rang des attributions contentieuses de
la CJC (Chambre judiciaire)216, le contentieux de la
légalité et de l'interprétation, le contentieux de la
fonction publique de la CEMAC, le règlement des litiges relatifs
à la réparation des dommages, le contentieux de la COBAC, et le
contentieux issu du contrôle des pratiques commerciales
anticoncurrentielles. On peut notamment constater l'absence du recours en
manquement.
214 Voir EBONGUE MAKOLLE (F.), droit supranational et ordre
juridique interne, regards sur l'expérience camerounaise en
matière d'intégration juridique (CEMAC, OHADA, COBAC, CIMA),
Mémoire en vue de l'obtention du D.E.S.S en relations internationales
(option diplomatie), IRIC, 2002, pp. 97-98.
215 Article 17 de la Convention de Libreville du 5 juillet
1996 portant création de la Cour de justice de la CEMAC.
216 KAMTOH (P.), « Cour de Justice de la CEMAC :
compétence et procédure de la chambre judiciaire »,
séminaire de sensibilisation, Libreville, octobre 2009, pp.
8-14.
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La CJC (Chambre judiciaire) ne disposait donc sur la
période considérée217, que du recours
préjudiciel en interprétation pour espérer se prononcer
sur l'application du droit communautaire par les Etats membres. Mais la CJC n'a
jamais été saisie d'un renvoi préjudiciel218,
par conséquent son contrôle sur la transposition des directives
CEMAC est resté inexistant.
La CJC dans sa configuration actuelle est l'oeuvre du
Traité CEMAC révisé de 2008, qui à son article 10
à la place de l'ancienne Cour de justice de la CEMAC bicamérale
(avec une chambre judiciaire et une chambre des comptes), énumère
deux nouvelles institutions, la Cour de justice et la Cour des comptes. La CJC
hérite alors pour l'essentiel, des attributions de l'ancienne Chambre
judiciaire de la Cour de justice de la CEMAC219. Mais le
Traité CEMAC révisé institue tout de même une
réelle innovation, avec la consécration en son article 4 al 2
d'un mécanisme de sanction, notamment « le recours en manquement
».
La CJC conformément à sa fonction
régulatrice, assure alors le respect du droit dans
l'interprétation et dans l'application du présent Traité
et des conventions subséquentes220, par les Etats membres,
les institutions et les organes de la CEMAC. Concrètement, il lui
incombe par exemple de se prononcer lorsqu'elle est saisie, sur la
conformité des activités des Etats membres aux directives
communautaires, soit par renvoi préjudiciel221, soit par la
voie du recours en manquement222.
Il subsiste tout de même un écueil à cette
évolution, et celui-ci est relatif au Traité CEMAC
révisé et aux Conventions subséquentes qui ne sont pas
encore entrés en vigueur. Les anciens textes restent donc encore en
vigueur, ce qui n'est pas pour amoindrir par ailleurs, la contingence du
contrôle de la CJC.
217 Entre 1999 et 2009.
218 Voir G. TATY, « le
règlement du contentieux communautaire par la méthode du recours
préjudiciel dans l'espace CEMAC », séminaire de
sensibilisation et de vulgarisation du droit communautaire de la CEMAC, Douala,
10 et 11 mars 2008.
219 KOAGNE ZOUAPET (A.), la recevabilité des
requêtes devant la Cour de justice de la CEMAC, Mémoire de
Master en Relations internationales, option contentieux international,
Yaoundé, IRIC, 2010, p.89.
220 Article 48 du Traité CEMAC révisé. Voir
l'article 220 TCE pour la CJCE.
221 La CJCE a développé la solution de l'effet
direct des directives communautaires, dans son arrêt Van Duyn du 4
décembre 1974, saisie d'une demande de décision
préjudicielle formée par la Chancery Division de la Hight Court
of Justice de l'Angleterre.
222 Saisie par un recours en manquement de la commission, la
CJCE a consacré la responsabilité de l'Etat membre
défaillant, dans son arrêt FRANCOVICH du 28 mai 1991, pour les
directives non transposées et qui n'ont pas de dispositions à
effet direct. Voir SAURON (J-L), Op. Cit. p.45.
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