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La transposition dans l?ordre juridique national des directives cemac : une analyse sous le prisme de la pratique europeenne

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par GABRIEL CEDRIC MBOGNE CHEDJOU
Université de Yaoundé II/ Institut des Relations Internationales du Cameroun - Master en relations internationales option intégration régionale et management des institutions communautaires 2012
  

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B- Un acte singulier dans sa mise en oeuvre

Le «législateur communautaire» a notamment consacré en la directive communautaire, un acte juridique au faible pouvoir de pénétration des ordres juridiques nationaux, c'est-à-dire dépourvu d'effet direct (1), toutefois, cette position doit tout de même être relativisée, au regard de l'évolution de la jurisprudence communautaire, qui consacre sous certaines conditions l'effet direct des directives communautaires (2).

1- La transposition, condition de l'applicabilité directe de la directive communautaire

Il suffit de lire la définition que donne le législateur CEMAC de la directive, pour comprendre que ce dernier consacre un acte juridique qui ne peut produire tous ses effets que grâce à l'intervention des autorités nationales, un acte juridique au régime juridique réellement souple.

L'article 41 du traité CEMAC révisé dispose que : « Les directives lient tout Etat membre destinataire quant au résultat à atteindre tout en laissant aux instances nationales leur compétence en ce qui concerne la forme et les moyens ». Les directives CEMAC tout comme les directives UEMOA et européennes ne possèdent donc pas d'effet direct, et doivent passer par des mesures nationales de transposition pour être invoquées par un ressortissant communautaire devant une juridiction nationale.

Les directives lient les Etats destinataires par les résultats qu'elles fixent, le législateur communautaire en imposant ainsi aux Etats membres un impératif de résultat, respecte l'autonomie de ces derniers pour ce qui est des moyens à employer pour se conformer aux exigences communautaires.

78 CJCE Simmental, 9 mars 1978, aff. 106/77, Rec. p. 629.

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Le législateur CEMAC a notamment choisi cette formule et ce régime juridique pour la directive, dans le but de servir un objectif bien précis, l'harmonisation des législations nationales. Si le règlement semble plus efficace et plus utilisé notamment en zone CEMAC, il n'en reste pas moins que contrairement à la directive communautaire, il ne ménage aucunement les réalités ou les spécificités nationales. La directive a donc l'avantage de procéder à un simple encadrement par des principes communs, elle permet aux législations nationales de subsister sous réserve de leur mise à jour.

La directive ainsi agencée, cela semble judicieux, au regard notamment des domaines dans lesquels elle intervient, des domaines où la législation existante est complexe, volumineuse79 et nécessite d'être adaptée aux objectifs du traité.

Mais vouée à l'office des Etats membres, la transposition souffre assez souvent de manquements qui hypothèquent l'effet direct des directives, il peut s'agir du non respect des délais, d'une norme de transposition ou de pratiques nationales non conformes aux objectifs de la directive80, ou même d'une non transposition de la directive communautaire. Le juge communautaire a alors développé une solution particulière qui permet à la directive communautaire sous certaines conditions de bénéficier de l'effet direct.

2- L'effet direct de la directive communautaire

Les juges CEMAC et UEMOA n'ont pas encore eu à se prononcer sur l'effet direct des directives communautaires, c'est pourquoi la solution retenue ici est celle développée par la CJCE, notamment à partir de l'arrêt Van Duyn du 4 décembre 197481.

La CJCE établit des conditions à remplir par les dispositions de la directive concernée pour bénéficier de l'effet direct. Seules les dispositions suffisamment « précises et inconditionnelles » des directives produisent un effet direct et peuvent être invoquées par le justiciable « à défaut de mesures d'application prises dans les délais à l'encontre de toute

79 AUGROS (L.), « l'application des directives marchés publics des travaux en France et au Royaume Uni », IEP de Lyon, juin 2004, p.35.

80 Voir TATY (G.), Op. Cit.

Malgré l'harmonisation en zone CEMAC des législations des Etats membres en matière de TVA, on note : -l'augmentation unilatérale du taux de TVA (25%) part rapport à la fourchette de taux fixée par la direct ive communautaire (12 à 18%) ; -le non respect des privilèges ou avantages accordés aux institutions et organes internationaux par certaines conventions internationales ou sous régionales et accords de siège ; -la limitation unilatérale de la liste communautaire des produits exonérés ; -le non remboursement ou la non déductibilité des crédits de TVA. Voir TATY, Op. Cit.

81 SAURON (J-L.), L'application du droit de l'Union Européenne en France, édition La documentation française, Edition La documentation Française, collection « Réflexe Europe », 2ère édition, 2000, p.44.

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disposition nationale non conforme à la directive, ou encore en tant qu'elles sont de nature à définir des droits que les particuliers sont en mesure de faire valoir à l'égard de l'Etat »82.

Est notamment précis ce qui « énonce une obligation dans les termes non équivoques »83, et inconditionnelle « l'obligation qui n'est assortie d'aucune condition ni subordonnée, dans son exécution ou dans ses effets, à l'intervention d'aucun acte soit des institutions de la communauté, soit des Etats membres »84. Ces définitions laissent une marge d'interprétation large au juge communautaire ; en effet, le critère déterminant du caractère d'effet direct des dispositions de la directive concernée est l'étendue de la marge d'application que la directive laisse aux Etats membres.

La jurisprudence de la CJCE se fondant sur l'effet utile des directives, reconnait alors à certaines dispositions de celles-ci l'effet direct vertical ascendant, mais ne reconnait ni l'effet direct vertical descendant, ni l'effet direct horizontal.

L'effet direct vertical ascendant signifie que les justiciables peuvent se prévaloir envers les autorités publiques nationales des dispositions d'une directive non transposée. En effet, dans son arrêt du 26 février 1986, M.H Marshall c. Southampton et South-West Hampshire Area Health Authority (Teaching), Demande de décision préjudicielle, Court of Appeal, Royaume-Uni, la CJCE consacre la solution de « l'effet direct vertical ascendant » des dispositions précises et inconditionnelles d'une directive, et n'admet aucunement l'effet direct horizontal (en faveur d'un particulier à l'encontre d'un particulier), dans la mesure où la directive ne crée en aucun cas directement de droits et obligations dans le chef des particuliers85, le caractère contraignant de la directive ne vaut qu'à l'égard des Etats membres ; une justification qui vaut également pour le refus de la CJCE d'admettre l'effet direct vertical descendant (en faveur de l'Etat à l'encontre des particuliers).

Cette solution de la CJCE relativise ainsi la nécessité de la transposition, pour que la directive produise des effets directement dans le champ des particuliers, toutefois elle reste subordonnée à l'écoulement du délai de transposition. Il est également important de préciser que cette solution ne remplace aucunement l'obligation de transposition qui seule intègre matériellement les objectifs de la directive communautaire en droit national.

82 CJCE 19 janvier 1982, Ursula Becker, aff 8/81, Rec. p. 53.

83 CJCE 23 février 1994, Comitato di coordinamento per la difesa della cava, aff. 236/92, Rec. p. 497.

84 CJCE 3 avril 1968, Molkerei-Zentrale, aff. 28/67, Rec. p. 211.

85 Conseil d'Etat français 22 décembre 1978, aff Conhn-Bendit, Rec. p. 80.

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On ne peut qu'espérer tout de même, que le juge CEMAC au regard des réformes engagées depuis 2008, s'alignera sur la position de la CJCE afin de baliser de manière efficace l'usage au sein de la sous-région de cet acte, qui peut être appelé à se multiplier davantage, eu égard à la signification que revêt l'obligation de transposition pour les Etats membres.

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