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L'éducation primaire comme levier de développement. Analyse critique à  partir de l'Objectif OMD 2: « Assurer l'éducation primaire pour tous »

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par Corinne STEPHENNE
Université catholique de Louvain - Master 120 en sciences de la population et du développement,  2011
  

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2. PERSPECTIVE SOCIO-HISTORIQUE

Pour comprendre les enjeux liés au déploiement des systèmes d'éducation, nous souhaitons, dans cette section, pointer quelques repères clés de l'histoire de l'éducation.

2.1. Bref rappel historique de l'histoire de l'éducation

Des origines de l'éducation

Dans son livre J. Vial rappelle au chapitre premier consacré à << L'éducation <<primitive>>>> que << la fonction éducative est ce qui caractérise le mieux l'espèce humaine : le moyen de transmettre aux générations ultérieures les acquis du moment>> (Vial, 1995 : 5). A cette époque, l'éducation est étendue à toute la vie, elle est naturelle, dégagée de toute contrainte, déterminée par les nécessités sociales. Elle vise l'adaptation étroite de l'individu à la société, elle se fait par le jeu, l'imitation, la participation à la vie collective et l'initiation. Il aura fallu des millénaires pour l'invention d'un outil extraordinaire, le langage. Pour adaptative qu'elle soit, cette forme d'éducation n'en reste pas moins fermée sur elle-même, << ce qui congédie à la fois la personne et le reste de l'univers >> (1995 : 6).

Des formes d'éducation plus structurées apparaissent dès l'Antiquité, au IVème et IIIème millénaires avant J.-C.. L'éducation dans la vallée du Nil a pour objectifs << dans un ordre social rigide, ... de conduire à un métier>> ou d'enseigner la science et la religion, étroitement liées, aux prêtres, architectes, médecins et scribes. << Ce privilège de la culture (durera) jusqu'à l'époque moderne >> (Vial, 2010 : 9). L'éducation en Perse était réservée à la noblesse, elle était militaire, étatique et morale. L'éducation en Chine ancienne basée sur le respect de la tradition, de l'Etat et de la famille... est influencée, << au moment où se dessine une certaine émancipation de la masse populaire et par deux grands philosophes : Lao Tseu et Confusius >> (Vial, 2010 : 12), le premier dans le but de lutter contre l'ignorance, le deuxième dans le but d'enseigner une morale basée sur le bonheur du peuple (Vial, 2010 : 12).

lie la formation des élites en Europe à la démocratisation de l'enseignement

En réponse aux besoins des cités grecques et de l'Empire romain, l'école est vouée, à cette époque, à l'instruction des élites politiques et administratives. Au Moyen Âge, << la croissance des activités commerciales a aussi créé une demande d'alphabétisation >> ainsi, l'instruction est mise à portée des plus pauvres (Troger et Ruano-Borbalan, 2005 : 11). Il faudra attendre l'époque de la renaissance, au 16ème siècle, à la faveur de la création de l'imprimerie et en appui à la montée en puissance des Etats et à la construction des identités nationales, pour qu'un réel essor de l'éducation primaire se réalise (Charlier, 2010-2011 ; Troger et Ruano-Borbalan, 2005 : 13). Cependant, deux processus d'extension de l'école restent de mise, l'éducation des élites avec les universités et l'éducation de la population avec l'école primaire. Il faudra attendre la fin du 18ème siècle à la faveur de la révolution et le début du 19ème siècle pour que plusieurs lois relatives à l'éducation publique et à l'éducation primaire gratuite et obligatoire soient adoptées en France. Du point de vue des savoirs enseignés, les disciplines sont l'orthographe, les poids et les mesures et leurs visées concernent la constitution d'une identité nationale, les valeurs de la République et la diffusion de modes de pensées rationalisés en uniformisant les normes linguistiques, commerciales et techniques sur tout le territoire. Il s'agit également << d'inculquer l'esprit de méthode et de précision indispensable à la main d'oeuvre des nouvelles entreprises industrielles >> (Troger et Ruano-Borbalan, 2005 : 32-34). Ce n'est qu'au 20ème siècle, après la seconde guerre mondiale, que la démocratisation de l'enseignement aux différents niveaux s'installe

progressivement avec l'avènement des mathématiques et des disciplines scientifiques en réponse au besoin de former des cadres scientifiques et techniques nécessaires à l'affirmation militaire et industrielle du pays comme le souligna le général de Gaulle (Troger et Ruano-Borbalan, 2005 : 24, 37).

L'éducation en Afrique subsaharienne

Avant la période coloniale, l'éducation en Afrique au Sud du Sahara est assurée par la société toute entière, elle est globale et communautaire. Les savoirs sont transmis oralement au quotidien par la famille et la collectivité locale en liaison avec les besoins directs de la société. L'esprit communautaire, le maintien d'un équilibre, la religion et le sacré imprègnent l'éducation. Les enfants sont rapidement associés à la production et aux activités des adultes. Le programme d'éducation est en phase avec la structure sociétale locale, il « donnait à l'apprenant un sentiment d'appartenance à une collectivité, d'identité et d'accomplissement » (Bah Diallo, 2008 : 5). Deux formes d'éducation formelles coexistent. D'une part, sous l'influence de l'Islam, des écoles coraniques sont créées au XVIIème, XVIIIème siècles dans le but de dispenser des cours de théologie. D'autre part, des maisons d'initiation implantées dans des bâtiments désignés à cet effet permettent la pratique des rituels initiatiques dont la vocation est de former « aux moeurs sociales et culturelles de la tribu » (Uduku, 2004 : 2).

A partir du XIXème siècle, l'école calquée sur le modèle occidental s'installe en Afrique durant la période de la colonisation et est organisée au départ par les sociétés missionnaires. Implantées principalement dans les régions pauvres, les objectifs poursuivis sont le développement socio-économique par la conversion au christianisme des populations et la dispense de soins médicaux. Avec le déploiement des gouvernements coloniaux au XXème siècle, l'Etat renforce progressivement son contrôle sur la politique éducative. De nombreux établissements scolaires sont construits et ouverts en théorie à l'ensemble de la population indépendamment de la confession et de l'origine sociale. Dans les faits, la politique éducative répond à des objectifs stratégiques politiques. Ainsi, les écoles sont construites dans des zones moins isolées, une éducation faite pour les élites destinées à l'administration coloniale y est dispensée. Les programmes, déterminés par cette même administration coloniale, sont dépourvus de contenu africain et les enseignants sont des expatriés. Les prestigieux bâtiments scolaires, moins intégrés à la vie communautaire, incarnent la puissance

coloniale. En termes de résultats, les chiffres parlent d'eux-mêmes. Selon la Banque mondiale, le taux d'analphabétisme est supérieur à 90 % et le taux brut de scolarisation primaire est de 36 % mais avec des fortes disparités sous-régionales et entre zones urbaines et rurales.

Au moment de l'indépendance, les pays africains ont hérité << de systèmes éducatifs inadaptés à leurs réalités » (Bah Diallo, 2008 : 6).

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