5. CONCLUSIONS
La pertinence pour le développement de l'investissement
dans l'éducation primaire est mise à l'épreuve du principe
de réalité. L'objectif pose question, sa formulation pose
question ainsi que les modalités de sa mise en oeuvre. Les effets
potentiels de l'éducation à un niveau macro se dissolvent sur le
terrain sous la pression de difficultés endogènes, de contraintes
contextuelles et d'orientations internationales.
L'analyse des effets de l'éducation primaire sur la
croissance montre que si l'éducation primaire peut jouer un rôle
positif, il s'agirait plutôt, pour les pays à faible revenu et
pour l'Afrique subsaharienne, d'un «rapport vertueux conditionné ou
sous contrainte ». La qualité de l'institution scolaire et des
autres institutions est importante et le cadre environnemental doit être
porteur. Des financements sont nécessaires, la relation est ainsi
à double sens.
L'analyse des effets de l'éducation primaire sur le
développement humain nous enseigne que le déploiement des
services de base, la santé et l'éducation, n'aboutit pas en ligne
directe à des améliorations du bien-être humain. De
même, une augmentation des revenus n'entraîne pas
systématiquement une amélioration de la santé et de
l'éducation. Des institutions solides intermédiaires sont
nécessaires. La pauvreté n'est pas que monétaire, elle est
associée à des situations de déprivations d'ordre
structurel.
L'analyse des effets de l'éducation primaire dans la
lutte contre la pauvreté nous enseigne que l'investissement
éducatif entre en concurrence avec d'autres priorités
essentielles comme la sécurité alimentaire. Les enjeux de
l'éducation primaire des femmes sont fortement liés à la
santé et à la fécondité. Une approche de terrain
est essentielle pour questionner les coûts d'opportunité, les
motivations des parties prenantes, les savoirs enseignés et les
opportunités de travail sur le marché local. L'éducation a
besoin de l'économie pour se déployer et la dépendance
à l'extérieur engendre une grande vulnérabilité. Le
risque d'échec est réel du fait du manque de moyens et de
délais trop courts. Paradoxalement, la lutte contre la pauvreté
nous rappelle de la nécessité de définir une
stratégie économique locale.
L'approche par le développement endogène met en
exergue l'importance de l'éducation pour le développement local
et dans une perspective systémique. Les savoirs à enseigner sont
à penser en lien avec le territoire, le pouvoir et l'autonomisation.
L'éducation participe au déploiement des capacités des
populations à se définir un projet local et à tenir compte
de la mondialisation, elle renforce le pouvoir de négociation des
populations locales. Elle revalorise les savoirs empiriques et donne la
priorité aux contenus à enseigner.
En conclusion, l'éducation primaire ou de base est une
composante du développement mais au côté d'autres
composantes essentielles. Elle n'est pas à même, à elle
seule, de produire du développement à un niveau macro
économique à tout le moins dans des pays en situation
d'extrême pauvreté. Nos deux hypothèses de départ
restent bien pertinentes. Toutefois, nous pensons qu'il faudrait y adjoindre
une troisième liée à son ancrage dans la
réalité locale. La perspective sociologique adoptée dans
le prochain chapitre nous éclaire à ce sujet.
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