4.2. Analyse de la pertinence
Le développement endogène se présente
comme une alternative aux courants dominants. Il correspond à une
réappropriation, par les communautés locales, de leur territoire,
de leurs ressources et de la définition de leurs propres objectifs de
développement.
Cette approche correspond au développement territorial
ou local présenté par F. Leloup, L. Moyart et B. Pecqueur (2003)
qui se centre sur les relations horizontales au côté des relations
verticales.
Elle correspond aussi à l'approche définie par
R. Magnaghi qui défend le concept d'auto-soutenabilité. Ce
dernier «repose sur le postulat selon lequel une nouvelle relation
co-évolutive entre habitants-producteurs et territoire peut créer
un équilibre durable entre établissement humain et milieu, en
reliant les habitudes, les savoirs, et les techniques d'aujourd'hui à
une sagesse environnementale ancestrale » (2003 : 51).
Cette approche semble également rencontrer le point de
vue de M. Leroy32 qui note que les sommets des Nations Unies sur les
Objectifs du Millénaire de septembre 2010 s'est penché sur ce qui
fonctionne et ne fonctionne pas sur le terrain. << La conférence a
permis à chacun de se rendre compte que la meilleure garantie de
succès est de faire en sorte que les états et les
communautés locales `traduisent' les Objectifs en
stratégies et programmes adaptés à leur propre situation.
L'idée de `localiser les OMD' a reçu un
soutien important>> (La coopération belge au développement,
2010 : 6).
La question posée est de ce fait : comment
concrètement mettre en place une approche basée sur le territoire
?
A côté des coordinations verticales, il s'agit de
réfléchir aux coordinations horizontales (Leloup et al., 2003 :
100) et d'insuffler une gouvernance locale. A partir de la notion de
systèmes territoriaux, il s'agit de << la capacité d'un
territoire à se différencier des autres >> en s'appuyant
sur et en valorisant ses ressources spécifiques qui se fondent sur des
savoirs non reproductibles par opposition aux ressources standards ou
génériques. Il s'agit de créer << un avantage
collectif >> (F. Leloup et al., 2003 : 104-105).
Plus spécifiquement, plutôt que de parler de
droit à l'alimentation ou de sécurité alimentaire, G.
Ngalumulumé Tshiébué préfère parler de
souveraineté alimentaire :
« La souveraineté alimentaire est donc le
droit des populations à définir leurs politiques agricoles et
alimentaires, à protéger s'il le faut et réguler la
production et les échanges agricoles intérieurs en vue
d'atteindre des objectifs de développement durable, à
déterminer les marges d'autonomie et d'indépendance, à
limiter le dumping des produits sur les marchés et à donner aux
communautés locales la priorité concernant l'utilisation des
ressources et droits afférents ». (2008 : 262).
En lien avec la question des savoirs locaux liés
à l'agriculture, B. E. Dialla présente l'intérêt de
<< reconsidérer les conceptions culturelles dans leur dimension
fonctionnelle >> (2004 : 26). Les savoirs locaux sont pris en
considération dans une perspective de développement local. Il
présente leurs apports comme levier de participation: << La
familiarisation avec les savoirs locaux facilite la compréhension et la
communication entre les agents de développement et la population locale,
augmentant ainsi les possibilités d'une approche de développement
participative et durable>>
32 Représentant belge, Coordonateur spécial pour
les OMD
(Dialla : 15) et comme << facteur d'impulsion d'un
développement durable>> en démontrant leur apport dans
l'agriculture (2004 : 21).
lie la pertinence de
l'éducation
Dans l'approche du développement endogène, du
développement local ou territorial, le rôle de l'éducation
est important, particulièrement en lien avec les contenus
enseignés. J.-Ph. Peemans nous a communiqué, lors de son
entretien, quelques pistes concrètes liées aux capacités
des individus à se réapproprier leur histoire, à exploiter
leurs ressources locales et à négocier. F. Leloup, L. Moyart et
B. Pecqueur rappellent que << le paradigme renouvelé de
développement accorde un rôle tout aussi important aux facteurs
non économiques tels que la qualification individuelle et collective, la
transmission des savoirs et des savoir-faire traditionnels et actuels, le cadre
de vie, la perméabilité à l'innovation, la vitalité
communautaire, l'ouverture à la concertation et au partenariat, le mise
en réseau des PME... >> (2003 : 109) ; soit, autant de
compétences qui nécessitent des connaissances spécifiques
et universelles.
Cependant, si la question des contenus enseignés est
abordée, celle de l'organisation de l'éducation à
l'échelle locale n'est pas traitée.
En conclusion, le développement endogène aborde
la question du développement à partir de l'échelle locale
et non dans une perspective globale. La définition du
développement, associée à la notion de territoire devient
ainsi plurielle, et non plus universelle à l'instar des autres approches
du développement, sans toutefois se déconnecter de la dimension
globale qui est explicitement reconnue. Il réaffirme le caractère
multidimensionnel du développement et son enracinement dans les
communautés locales.
La plus-value de cette approche est de rappeler que le savoir
est associé à toute forme de déploiement sociétal
et de pouvoir. Elle valorise aussi les savoirs locaux comme ressources
pertinentes. Elle suggère de réfléchir aux contenus
à enseigner en lien direct avec les besoins des collectivités
locales. Dans le contexte des politiques d'éducation actuelles, il
serait très utile, en lien avec la qualité de l'éducation,
de réfléchir d'un point de vue pédagogique, aux contenus
et à l'organisation des systèmes. Ce qui pourrait s'avérer
complémentaire au futur rapport EPT 2012 consacré aux
compétences.
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