4. ANALYSE DE LA PERTINENCE DU DÉVELOPPEMENT
ENDOGÈNE
4.1. Présentation des grands principes et des
actions qui s'y rattachent
J.-Ph. Peemans, dans son essai publié en 2002, retrace
l'évolution de la pensée dominante sur le développement et
en critique les fondements à partir des courants opposés pour
aboutir à une définition alternative présentée dans
notre premier chapitre.
A l'encontre du développement par la croissance et le
progrès, il critique la conception basée sur << un ordre
global », un projet universel de modernisation et par la suite de
néo-modernisation défini au Nord pour le Sud, porté par
les acteurs dominants et auquel il faut se conformer. L'économie
mondialisée impose ses normes auxquelles doivent s'adapter les autres
composantes du développement, les aspects culturels, sociaux et
politiques (2002 : 158). << La pensée véhiculée est
un retard par rapport au système productiviste » (Peemans,
entretien 17 janvier 2011).
En ce qui concerne le développement humain, il ne
l'épargne pas non plus. << Initialement, on aurait pu penser que
cette idée allait entraîner une avancée qui permettrait de
définir une certaine autonomie du développement par rapport
à la croissance globalisée ... dans la pratique ces indicateurs
n'ont guère permis d'évoluer au-delà d'une conception du
bien-être très fonctionnalisée par rapport à la
croissance ». La dimension éducation des indices de
développement humain a eu pour effet de créer un consensus autour
de capital humain qui relève des théories économiques
(2002 : 172).
Quant à la lutte contre la pauvreté et les DSRP,
Documents stratégiques de réduction de la pauvreté, mis en
place par le Fonds monétaire international et la Banque mondiale, F.
Lapeyre souligne que cette nouvelle approche n'est autre que l'expression d'une
nouvelle forme de contrôle social et de création d'adhésion
au travers d'une démarche participative des populations de plus en plus
résistantes au projet néomodernisateur et aux exigences de
l'internationalisation de l'économie (----).
En réponse, J.-Ph. Peemans propose un
déplacement radical du regard vers les acteurs populaires pour une
approche forte en termes de développement humain et durable.
Quelques grands principes de mise en oeuvre du
développement endogène
Les grands thèmes liés au développement
endogène sont :
- le territoire, l'accès aux ressources, (2002 : 471, 475)
;
- la sécurisation collective et la sécurisation
des conditions de vie (2002 : 469, 471) ; la sécurisation des conditions
de vie incluant l'éducation au côté de l'alimentation,
l'habitat, la santé, la mobilité, le droit à l'emploi et
les services de proximité (2002 : 494) ;
- la valorisation du lien social et les moyens
d'autocontrôle social à un niveau local (2002 : 471) ;
- la valorisation de l'identité collective (2002 : 473)
;
- différentes formes de gouvernance locale: «
démocratie substantive »,
« gouvernance historique », « gouvernance
associative » (2002 : 485) ;
- une autre forme d'économie basée sur
l'économie sociale et populaire (2002 :
493) ;
- de nouveaux rapports de force entre les « acteurs du bas
» défendant des lieux de vie et les acteurs dominants » (2002
: 493) :
- de nouvelles formes de coopération entre le local et
le global: le niveau régional infranational comprenant les
stratégies intégrées de modes de production durables, la
sécurisation des conditions de vie et l'élaboration de «
chartes locales et régionales de « développement durable
», une relégitimation du rôle de l'Etat et un renforcement
des ententes régionales-continentales (2002 : 495- 497).
Un schéma des actions à mener aux différents
niveaux d'intervention est proposé en page 498 de son essai.
Le rôle de l'éducation dans le
développement endogène
De notre entretien avec J.-Ph. Peemans, nous avons extrait les
phrases ci-dessous qui montrent, par elles-mêmes, de l'importance de
l'investissement éducatif pour les communautés locales et dans
leurs relations avec le niveau global.:
« Oui, nous avons besoin d'écoles,
l'école a toujours existé dans toutes les cultures, elle n'est
pas une invention occidentale. Pas d'école signifie l'anomie,
l'anarchie. Au contraire, il faudrait un système d'éducation de
plus en plus fort.
La savoir, la tradition, le maîtrise de la culture
participent de la construction de l'identité et s'oppose à
l'exclusion. Ce qui est important, c'est la relation entre le savoir et le
pouvoir, la nature du savoir en fonction du pouvoir. Le savoir augmente le
rapport de force et permet de négocier d'égal à
égal. L'enseignement ne peut pas être dissocié de
l'éducation.
Or, la politique d'éducation actuelle s'inscrit
dans l'idéologie de la modernisation. Au Moyen-âge, le savoir des
artisans était très élaboré. Le savoir populaire
n'est pas un petit savoir.
Le problème, c'est la déqualification du
savoir. Depuis 200 ans, le savoir et le pouvoir des élites sont
dominants.
La vraie question est « L'école, pour quel savoir
et pour quel développement ? ».
- elle servirait à améliorer la qualité
de vie, la sécurité, la gestion de l'espace public ; Il faut se
resituer dans le local;
- une école structurée est une autre
école dans laquelle le territoire est important avec une
pédagogie de la construction collective d'un territoire et d'une
identité.
- La formation s'apparenterait à construire, à
mettre en valeur des
ressources locales, elle se centrerait sur les savoirs non
dé localisables ; - Pourquoi ne pas enseigner la
démocratie (populaire - substantive) à
l'école ?
- L'aspect diachronique est important: l'histoire est
importante car elle reconnaît la pluralité des acteurs » (17
janvier 2011).
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