3.3. Analyse de l'efficience
Des ressources importantes mais
insuffisantes
A nouveau, un constat positif à l'échelle
globale peut être posé pour les pays d'Afrique subsaharienne.
L'Afrique subsaharienne a réalisé des efforts financiers
considérables pour déployer un système d'éducation
primaire accessible à toutes et tous. Mais ces efforts semblent vains
étant donné sa dynamique démographique. Pour rappel, le
taux de dépendance de l'Afrique subsaharienne était encore de
79,4% en 2008, même s'il a diminué de pratiquement 9% depuis 1990
(CUA et al., 2010 : 17). En comparaison avec les données de
l'enseignement de la Fédération Wallonie-Bruxelles de Belgique et
de l'OCDE, l'Afrique subsaharienne fournit les efforts les plus
élevés en pourcentage du PIB et pour l'enseignement primaire.
Suite à la crise financière de 2008, les Etats africains ont
été amené à trouver des« financements
alternatifs ». Les prêts consentis par les organisations
internationales à l'Afrique pour réaliser les OMD ont
considérablement augmenté. Ils ont quintuplés pour le FMI,
ils ont triplé pour la Banque mondiale par rapport aux niveaux d'avant
la crise, et la Banque africaine de développement a mis en place des
facilités de liquidité d'urgence. Comme mentionné dans le
rapport, ce n'est qu'avec le temps que l'équilibre budgétaire
pourra se rétablir et celui-ci reste précaire (CUA et al., 2010 :
2-3).
A cela, s'ajoute la contribution importante des ménages
dans l'éducation primaire. Celle-ci s'élève à 30%
des dépenses d'éducation à côté des
dépenses issues du secteur public et du secteur privé (CUA et
al., 2010 : 63). Ce qui est énorme et montre qu'une demande
d'enseignement existe réellement.
Par contre, nous constatons que les efforts et le respect des
engagements de la communauté internationale sont sujets à
variation et ont diminué suite à la crise.
Une efficacité technique sous
contrainte
A volume financier donné et avec un régime
démographique de haute natalité, que peut mettre en place un Etat
en termes de pilotage?
La fonction de production (O. Debande et V. Vandenberghe, 2008
: 112) nous enseigne que la masse salariale, soit de loin le principal poste
budgétaire dans l'enseignement, dépend du nombre d'enseignants,
du taux de participation des usagers, du taux d'encadrement, du niveau moyen de
rémunération et de l'évolution
démographique. Dans le cas précis de l'Afrique
subsaharienne, il y a pénurie d'enseignants et le niveau de
rémunération est faible, le taux de participation maximal et
l'évolution démographique croissante, il n'y a donc pas vraiment
de marges de manoeuvre. Elle nous enseigne aussi que le taux d'encadrement
<<version pédagogique » est différent du taux
d'encadrement <<version budgétaire » (rapport
élèves/enseignant ou élèves/personnel) (O. Debande
et V. Vandenberghe, 2008 : 113). L'encadrement est fonction de trois
paramètres : la taille de la classe, l'horaire des élèves
et l'horaire des professeurs. Dans le cas de l'Afrique subsaharienne, il
s'agirait de réduire les horaires des élèves. Cela est
déjà d'application dans certains cas.
Une brève analyse coûts/bénéfices
nous enseigne qu'une autre possibilité serait la diminution du rapport
élèves/enseignant en ramenant, par exemple, le pourcentage moyen
des dépenses hors enseignants au niveau de celui de la
Fédération WallonieBruxelles de Belgique. Mais cela ne
résout en rien le problème de pénurie d'enseignants
diplômés.
Quelles suggestions formuler ?
Cette brève analyse nous amène au constat que
peu d'alternatives sont possibles mais qu'il en existe. Ainsi, E. Duret (2005)
propose, entre autres, pour certains pays, de mobiliser de manière
accrue les ressources internes et d'utiliser de manière plus rationnelle
et efficiente les ressources notamment par la révision des ressources
entre les cycles (2005 : 70). Elle pointe aussi comme défis la
recomposition du corps enseignant et les questions de gestion administrative et
pédagogique en lien avec le contrôle social exercé par la
communauté éducative et la structure des responsabilités
(2005 : 77). Dans cette lignée, il nous semble qu'une réflexion
autour de l'organisation des systèmes d'enseignement, des objectifs
pédagogiques et des seuils minimaux d'acquis d'apprentissage devrait
pouvoir avoir lieu. Il s'agirait ici d'envisager l'ajustement au contexte local
plutôt que la conformité au niveau global.
Nous avons noté également une piste au travers
d'une réduction des coûts de pilotage pour certains pays, mais il
s'agit ici d'aller à l'encontre des recommandations des Nations Unies
visant à renforcer les capacités des planificateurs. En
complément, nous pourrions suggérer de revoir l'objectif
d'éducation primaire universelle d'ici à 2015 et donc, d'aborder
la délicate question de la pertinence de l'objectif dans sa formulation
actuelle. Mais supprimer la contrainte d'éducation primaire pour tous
semble improbable d'un point de vue éthique et l'éducation
primaire fait partie des
droits fondamentaux. Toutefois, un report
d'échéance devrait être envisageable. Enfin, il nous semble
que la communauté internationale pourrait réaffirmer ses
engagements.
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