§. 2. Une pratique qui semble donner une place
restreinte à la
réparation pour l'acquitté
Malgré le silence des textes au sujet de la
réparation du préjudice de l'acquitté, la pratique du TPIR
n'a pas toutefois cessé de confronter les questions relatives à
la réparation du préjudice des personnes poursuivies. Ainsi, des
réparations traitées étaient essentiellement
fondées sur des violations des droits de l'accusé avant ou en
cours de procès, en application d'une part de l'article 5 du
Règlement (A) et d'autre part, d'autres instruments de
droit de l'homme (B).
A. La réparation fondée sur l'article 5
du Rqglement
Sur la base de l'article 5 du Règlement dont la
porté a été déjà précisée, les
personnes poursuivies ont soulevé à plusieurs reprises les
violations du Statut, du Règlement et d'autres règlements
internes pour en réclamer la réparation. Il s'agissait notamment
de la violation du droit à être informé sans délai
des accusations formulées par le Procureur et dont la protection est
prévue par l'article 20. 4. a) du Statut167. Une telle
violation a été retenue dans trois affaires, notamment dans les
affaires de BARAYAGWIZA168, de SEMANZA169 et de
KAJELIJELI170. Aussi, au sens de la décision de la Chambre en
l'espèce, la violation du droit à un conseil de défense
prévu par l'article 44 bis du Règlement171
aurait pu constituer sans difficulté la base de l'indemnisation de
RWAMAKUBA si la condition du préjudice substantiel exigée par
l'article 5 du Règlement était remplie172.
Dans tous les cas, deux observations ne manquent pas d'attirer
l'attention au sujet de la réparation pour la personne acquittée.
L'interprétation de la jurisprudence ne pose aucun
167 Cfr. art. 20. 4 du Statut : « Toute personne contre
laquelle une accusation est portée en vertu du présent statut a
droit, en pleine égalité, au moins aux garanties suivantes : a)
À être informée, dans le plus court délai, dans une
langue qu'elle comprend et de façon détaillée, de la
nature et des motifs de l'accusation portée contre elle; ».
168 J. B. BARAYAGWIZA c. Le Procureur, Affaire
no ICTR-97-19-AR72, Chambre d'appel, Arrêt sur la demande en
révision, 31 mars 2000, par. 54-55.
169 L. SEMANZA c. Le Procureur, Affaire no
ICTR-97-20-A, Chambre d'appel, Arrêt sur l'appel de la décision
sur la requête en annulation de la procédure d'arrestation et de
détention illégales, 31 mai 2000, par. 127.
170 J. KAJELIJELI v. The Prosecutor, Case no
ICTR-98-44A-A, Appeal Chamber, Judgment on the appeal against the Judgment and
sentence in first instance, 23 may 2005, par. 251.
171 Le Procureur c. André RWAMAKUBA, supra
note 140, par. 38 Ó« Il est établi que le Greffier ne s'est
pas acquitté de l'obligation qui lui est faite à l'article 44
bis du Règlement de désigner un conseil de permanence
pour André RWAMAKUBA en attendant la désignation de son conseil
et que de ce fait, RWAMAKUBA n'a pas bénéficié de
l'assistance d'un défenseur pendant une période prolongée,
bien qu'accusé, ce qui a porte atteinte à ses droits fondamentaux
prévus à l'article 20. 4 c) du Statut. ».
172 Id., par. 39.
obstacle à ce qu'un ancien accusé
acquitté réclame une réparation découlant de la
violation de ses droits survenue avant ou en cours du
procès173. Cette jurisprudence fait dépendre la
détermination de la forme de réparation à une
décision définitive sur le fond et peut prendre la forme
d'indemnisation174. Cependant, comme dans tous ces cas, les
accusés ont été jugés coupables, aucune
indemnisation n'a été ordonnée à ce
jour175. Par contre dans l'affaire RWAMAKUBA où un
acquittement est également intervenu, l'indemnisation accordée se
fondait sur d'autres instruments internationaux et non pas sur les textes du
TPIR.
|